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Lettres à Juliette, (sans rapport avec une autre fanfic du nom de "les lettres à Juliette"...)

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Leia
view post Posted on 2/4/2013, 20:57 by: Leia
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On l’avait prévenu mais la réalité dépassait toutes ses craintes. De sa voiture, il pouvait entendre les cris perçants de sa femme qui jaillissaient de la maison. Il posa un pied sur le trottoir et une boule d’angoisse se mit à lui serrer impitoyablement le ventre. Il prit une profonde inspiration, salua d’un bref signe de tête les voisins qui, attirés par le vacarme, étaient sortis sur le perron, et s’engouffra dans sa demeure. Le majordome l’accueillit avec soulagement.

- Vous voilà enfin, monsieur !!! Je regrette, mais aucun de nous n’est parvenu à la calmer !...
- Où est-elle ? – demanda d’un ton grave Auguste Withmore en tendant son chapeau.
- Dans le salon, monsieur… Mais prenez garde, elle est violente…

Tout en longeant le couloir, l’homme d’affaires se dit que la question qu’il venait de poser n’était pas d’une grande utilité. Il lui suffisait de suivre les bruits de casse mêlés aux vociférations de son épouse qui retentissaient en écho dans toute la maison. Les domestiques, médusés, s’étaient regroupés devant l’entrée du salon et observaient, tétanisés, leur maîtresse en train de se déchaîner contre le mobilier. On pouvait lire dans leur regard la peur et l’incompréhension. Ils s’écartèrent en le voyant arriver. Il baissa la tête en entrant dans la pièce pour éviter un projectile qui alla s’écraser contre le mur derrière lui. L’intérieur ressemblait à un champ de bataille. Il avait du mal à croire qu’une seule personne ait pu tout mettre sens dessus dessous. Il regarda d’un air piteux les meubles retournés et les débris qui jonchaient le sol.

- Raaaaah ! Qu’est-ce que tu fiches ici, toi ???? Tu n’avais pas une réunion ce soir ??? – rugit-t-elle en l’apercevant, la bave aux lèvres et toute ébouriffée. Un instant, elle lui rappela les sorcières des contes de son enfance qui l’avaient terrorisé et il blêmit à cette évocation. Calmement, il lui répondit :
- J’en suis parti car on m’a informé que tu n’allais pas très bien…
- Qui t’a dit cela ??? C’est encore un des tes crétins de domestiques ! Il ment, ils mentent tous !!!! Je vais très bien !!!
- Tu n'en as pas vraiment l'air…
- Tu es contre moi toi aussi ??? Vous êtes tous contre moi !!! – hurla-t-elle, hystérique, en s’emparant d’un des derniers vases rescapés et en le fracassant par terre.
- Calme-toi, voyons ! – s’écria-t-il en reculant - Que s'est-il passé pour que tu sois dans cet état ???
- C’est mon oncle !... C'est Albert !!! Il… Il a osé !!!!
- Qu’a-t-il donc osé faire pour que cela te mette dans une telle furie ???
- Il… Il est venu ici tout à l’heure pour m’annoncer froidement qu’il me bannissait de la famille et qu’il me déshéritait !!!! Hiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!!!

Elle piétinait le sol avec rage tout en poussant des cris de cochon qu’on égorge. C’était effrayant. Le malheureux époux attendit une accalmie pour tenter de la raisonner.

- Pourquoi y accordes-tu autant d’importance ? Tu ne l’aimes pas de toute façon et tu détestes la plupart des membres de la famille !
- Tu es vraiment encore plus bête que je ne le pensais !!! – rétorqua-t-elle, dédaigneuse, en roulant des yeux vers le plafond.

Il se raidit en entendant ces mots et se retint, mâchoires crispées, de la gifler. Ce n’était pas la première fois qu’elle lui crachait tout son mépris au visage et il ne le supportait plus.

- Ne comprends-tu pas ce que représente le nom des André dans le pays ? – renchérit-elle - Nous sommes une famille très respectée et très influente ici. En être chassée, c’est devenir une moins que rien, une paria que plus personne ne voudra accueillir en société. On va me fuir comme la peste !...
- Tu restes la femme d’Auguste Withmore. Ce n’est pas rien, je te le rappelle.
- En effet ! – gémit-elle dans un tremolo - Un parvenu qui a fait fortune pendant la guerre ! Il y a plus honorable comme lignée !!!
- Tu ne fais pas autant la fine bouche quand il s’agit de dépenser mon argent ! – répliqua-t-il sèchement, vexé - Mais dis-moi, « Sa Majesté », quel crime as-tu commis pour que ton oncle t’inflige un tel châtiment ?
- C’est… C’est à cause de cette chipie, de cette Candy !!!
- Encore ??? mais quand vas-tu donc cesser d’en être après cette fille ? Cela relève de l’obsession !
- Tu insinues que je suis folle ???
- Je n’ai malheureusement pas à le faire. Je n’ai qu’à t’écouter parler, qu’à te regarder agir de manière irresponsable pour constater que ta haine pour cette pauvre fille t’a fait perdre complètement la tête ! Tu n’as plus aucune notion des limites !…
- Toi aussi, tu prends sa défense ? – demanda-t-elle, menaçante, en s’approchant de lui.
- Je ne prends la défense de personne… - dit-il en reculant un peu plus. Le regard torve qu’elle lui adressait n’annonçait rien de bon – Pourquoi ne la laisses-tu pas tranquille ? Elle vit si loin de toi, dans son coin perdu de l’Illinois. Mais que te faut-il de plus ?

Les yeux rougis et exorbités, la lèvre tremblante, elle lui répondit d’une voix étrange, ténébreuse, qui lui figea le sang.

- Je veux… Je veux… Je veux que cette sainte nitouche qui m’a volé tout ce j’avais de cher souffre les pires maux ! Je veux ruiner sa vie, la lui rendre misérable, consumée par le malheur, et qu’elle vive honteusement dans l’opprobre !!!
- Mon dieu, Elisa ! – glapit son époux, une goutte de sueur perlant de son front – Te rends-tu compte que ce que tu souhaites si ardemment pourrait bien de se retourner contre toi et que cette existence pitoyable à laquelle tu aspires pour elle risque de devenir la tienne ???

Elle secoua vigoureusement la tête.

- Cela n’arrivera jamais !!!
- Comment peux-tu en être si sûre ? Regarde où tes manigances t’ont conduite ! Tu n’as même plus de famille !

Pour toute réponse, elle se mit à le fixer avec un regard halluciné et il comprit rapidement qu’il était en danger. Il fit un pas en arrière et buta contre un buffet. D’un geste vif, Elisa le saisit à la gorge et elle commença à serrer, serrer…

- Il suffirait simplement – dit-elle, pupilles dilatées et dents serrées, un rictus machiavélique aux lèvres - qu’il… qu’il lui arrive quelque chose… Un accident, par exemple…
- Tu es folle !!! Lâche-moi ! – parvint-il à articuler en essayant de se dégager. Mais Elisa, mue par la rage qui décuplait ses forces, serrait de plus en plus fort. Sa vision à lui commençait à se troubler. Il émit un faible râle, agonisant et sentit qu’il perdait conscience, quand des bras puissants s’emparèrent de lui et le libérèrent de la prise démente de sa femme. L’air pénétra immédiatement dans ses poumons et il se laissa tomber lourdement par terre, peinant à retrouver une respiration normale. Dans un semi-brouillard, il distingua son épouse au sol, maintenue par deux domestiques qui s’efforçaient de l’empêcher de bouger tandis qu’elle hurlait comme une possédée, tapant des pieds et crachant à la cantonade des insultes à faire rougir un charretier. Son majordome s’était précipité vers lui et le prenant par le bras, l’aida à se relever.

- Tout va bien, monsieur ?

Auguste Withmore, hébété, regardait avec consternation le spectacle affligeant qui s’offrait à lui. Quand il reprit ses esprits, il se tourna vers son domestique et lui dit :

- Walter, veuillez, je vous prie, contacter l’hôpital Bellevue et leur demander de nous envoyer une ambulance avec deux de leurs plus solides infirmiers…
- L’hôpital Bellevue ? Mais c’est un hôpital psychiatrique ???

Le regard entendu que lui rendit le maître de maison mit un terme à ses interrogations et le majordome tourna les talons, dissimulant avec peine une moue de satisfaction…

*********



L’assistant du comte Contarini se présenta, dès l’aube, sur le quai de la gare de Venise, le cœur rempli d’espoir. La veille, il avait cherché Terry dans toute la ville, s’était rendu au port d’où l’on embarquait quotidiennement pour l’étranger, jusqu’à prendre l’initiative de contacter le Duc de Grandchester à Londres. Aucune trace de lui… Son dernier espoir résidait dans le contrôleur, qui, selon le guichetier, officiait sur le train susceptible d’avoir transporté Terry. L'employé de gare se souvenait bien du jeune homme qu’il avait vu partir au petit matin, sans direction précise.

- Il voulait aller vers le nord, rien de plus.- avait-il confié à Roberto – Revenez demain, à la première heure. Mon collègue sera là et pourra mieux vous éclairer.

Roberto tressaillit en entendant le train entrer en gare, celui-là même que Terry avait pris la veille. Dès que la locomotive s’arrêta, il monta dans un wagon et se mit à chercher le contrôleur. Il finit par l’apercevoir alors qu’il aidait une vieille dame à monter à bord.

- Pardon monsieur, j’aurais besoin d’un renseignement.
- Bien entendu. En quoi puis-je vous être utile ?
- Il se trouve qu’un de mes amis a pris ce train hier matin et je souhaiterais le retrouver car il a oublié chez moi quelque chose de grande valeur.
- Vous n’avez pas son adresse ?
- Non. Il est anglais et voyage beaucoup. C’est un jeune homme très bien de sa personne, d’environ vingt-cinq ans, d’assez grande taille, brun, aux yeux clairs.

Le contrôleur réfléchit un instant en se caressant le menton, puis répondit :

- Il y avait bien hier un jeune anglais qui ressemble à votre description… Il est parti avec une troupe de théâtre qui se rendait à Vérone…
- Vérone ???
- Oui. Il y a un festival là-bas en ce moment…
- Vous êtes bien certain de ce que vous dîtes ? C’était bien ce jeune homme ???
- Ecoutez… Je ne peux pas être catégorique, cependant je peux affirmer que de si bonne heure, ce train transporte des gens qui vont à leur travail plutôt que de touristes. Et hier matin, ce garçon et la troupe étaient bien les seuls anglais qui voyageaient !

Roberto se retint de pousser un cri de joie. Tous ses efforts, toutes ces heures épuisantes à rechercher le fils du Duc de Grandchester étaient enfin récompensés. Il allait pouvoir le retrouver et lui révéler le sombre complot dont il avait été victime. Muni des télégrammes qu’Albert et Georges avaient échangés avec le comte, il allait pouvoir lui apporter la preuve incontestable que tout ce en quoi il avait cru n’était que le fruit du plan machiavélique ourdi par une odieuse personne, une certaine Elisa Withmore. Il avait hâte de lui annoncer la nouvelle et de voir le bonheur et le soulagement resplendir sur son visage. Tout tremblant d’émotion, il s’adressa au contrôleur occupé à ajuster sa casquette.

- Auriez-vous l’amabilité de me vendre un billet pour Vérone ?

Fin de la deuxième partie du chapitre 10



Edited by Leia - 15/4/2016, 23:55
 
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