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Le bonheur ne dépend que de nous

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view post Posted on 25/7/2014, 11:05
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Annecy (Haute-Savoie) France

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Le bonheur ne dépend que de nous



Une suite revisitée du dessin animé après que Candy se soit rendue au Grand théâtre à Chicago où jouait Terry dans le roi Lear.



*****


Chapitre1


Les retrouvailles




Candy avait vu partir le fiacre emportant Terry et sa partenaire Susanna, sans pouvoir rien faire pour l’empêcher. Après cette bousculade devant le théâtre, ces filles criant son nom et elle, piétinée, poussée et sa voix pas assez forte pour passer au dessus du tumulte. Pourtant il avait regardé trois fois vers elle mais il ne l’avait pas vue, entendue ou... reconnue, s’il l’avait oubliée.

C’est ce qu’elle se disait, assise sur le bord de la fontaine, pleine de doutes et de tristesse en revoyant la belle Susanna Marlowe à ses côtés et la voix de cette chipie d’Elisa lui dire que l’actrice était au mieux avec Terry. Mais elle ne pouvait pas le croire vraiment, elle ne le pourrait que si c’était lui qui lui disait. Elle revécut en pensées tout ce qu’elle avait vécu avec ce jeune homme au collège St Paul de Londres. Oui, il avait été compliqué, pénible, impossible les premiers temps mais... il l’avait embrassée, lui avait dit qu’il éprouvait des sentiments pour elle et promis que l’avenir c’était eux deux. Puis il s’était sacrifié pour qu’elle ne soit pas renvoyée du collège après la dernière manigance d’Elisa. Et ça avait mis enfin cette évidence en elle, elle l’aimait aussi, depuis le premier regard sur le pont du bateau mais sans pouvoir se l’avouer vu sa muflerie alors mais sans possibilité depuis de l’oublier un seul jour. Elle était certaine depuis son départ de Londres que jamais elle ne serait heureuse sans lui et n’imaginait pas qu’il puisse avoir changé, lui si fier, si droit, si semblable à elle-même.

Revenant au présent, elle songea alors à chercher l’hôtel où il dormirait cette nuit mais en se voyant, si pâle, si décoiffée et si poussiéreuse dans la vitrine d’une boutique, elle renonça. Un de ses souliers avait le talon cassé depuis la bousculade des admiratrices et surtout sa collègue la remplaçait à la réception de l’hôpital Ste Johanna, sans autorisation de ses chefs et si Flanny le découvrait, elle allait être fâchée et déçue encore. Elle repartit donc à pieds et le cœur au bord des larmes d’avoir encore raté de si peu le bonheur.

***



Terry avait compris que Candy était à Chicago grâce à la présence d’Elisa au gala de charité, du mouchoir à son chiffre trouvé sur un des fauteuils du troisième balcon qu’elle avait perdu et qu’il lui avait donné en Ecosse. Et enfin d’Alistair, Archibald et Annie qu’il avait vus dans la rue après s’y être précipité pour la trouver. Il était alors parti pour l’hôpital Ste Johanna pour la voir. Il se fit refouler par ce serpent à lunettes de Flanny mais grâce à l’autre fille plus gentille il pensait que Candy allait bientôt rentrer et l’attendit devant l’entrée principale. Il s’assit sur les marches et revécut ses meilleurs souvenirs d’elle pour patienter. Mais près d’une heure après il commença à démoraliser. Il se releva pour la énième fois, donna de colère des coups de pieds dans les cailloux, retourna derrière la grille scruter chaque bout de la rue. Encore une fois, personne ne venait et la nuit se faisait toujours plus noire. Il soupira, regrettant encore de ne pas l’avoir enlevée et emmenée avec lui à New York car depuis son départ de Londres, il ne cessait de penser à elle et était sûr qu’elle était faite pour lui, qu’il l’aimerait pour toujours et à jamais. Il ferma les yeux, la vit à nouveau dans sa belle robe de Juliette danser dans ses bras et espéra très fort qu’en les rouvrant, elle apparaîtrait dans le présent pour lui dire qu’elle ressentait cette même certitude au cœur. Il les rouvrit lentement, les plissa pour scruter l’obscurité et faillit hurler de joie. Oui, son vœu était réalisé car cette silhouette au loin, ses cheveux d’or ondulant sur ses épaules graciles et sa robe longue balayant le sol, c’était elle, c’était Candy, sa princesse Juliette. Mais il s’affola en la voyant boiter, la tête baissée, semblant pleurer et la robe déchirée au bras. Il sentit alors son sang bouillonner car il songea à une agression, un accident. Et il se mit à crier:

_ Candy! Qui t’a mise dans cet état? Qui t’as fait ça?

Elle sursauta si fort en relevant les yeux, les écarquilla puis s’immobilisa sur place de stupeur. Elle reconnut cette voix, cette silhouette, cet air furieux et inquiet, ce regard de braise. Elle poussa un cri, mit ses mains sur ses joues brûlantes et murmura à peine:

_ Oh Terry! Tu es là!

Il arriva en courant, toujours les yeux sombres et l’air en colère et inquiet.

_ Qui Candy? Dis-le moi, je vais aller lui casser la figure!

_ C’est toi! S’exclama-t-elle en riant et lui sautant au cou. Oui c’est toi, c’est de ta faute, enfin, de toute tes furies d’admiratrices. Mais je m’en fiche bien maintenant! Oh Terry! Ce que je suis heureuse de te revoir enfin. Terry!

Il resta un moment sans réagir, le temps de tout comprendre. Puis il se dit qu’elle était vraiment heureuse de le voir, accrochée à son cou, riant, pleurant, et si réelle, si belle, encore plus faite pour lui.

_ De ma faute? Balbutia-t-il le cœur battant. Alors... tu étais bien à la sortie du théâtre?

_ Oui et soi tu es sourd, soi tu as fait exprès de ne pas m’entendre, maudit animal. Je croyais pourtant avoir une voix qui porte. Mais... que je suis heureuse maintenant!

_ C’est vrai? Fit-il avec encore plus d’espoir et l’œil maintenant bleu, admiratif et si intimidant qu’elle rosit.

_ Heu... oui... Qu’est-ce qu’il y a d’étrange, nous... étions amis non?

_ Amis? Oui mais... enfin, un peu plus non?

_ Heu... oui, peut-être ! Dit-elle encore plus rose en voulant discrètement lâcher son cou, ce qu’il ne voulut pas, alors il mit ses bras autour de sa taille fine et la serra plus prêt. Puis il lui sourit avec tant de douceur qu’elle oublia sa timidité tant elle lisait sa sincérité de cœur.

_ Candy! Est-ce que tu vas encore me gifler si... Oh tant pis, tu es si belle!

Et il refit comme en Ecosse, la souleva pour atteindre ses lèvres et l’embrassa. Une seconde, trois, cinq, dix et pas de gifle. Alors il osa plus, chercha sa langue mais là elle tourna la tête, très rouge mais pas l’air fâchée ou outragée.

_ Candy, je... Pardonne-moi, je suis trop pressé mais tu m’as tant manqué.

_ Toi aussi Terry, énormément. Mais pourquoi es-tu ici? Comment as-tu su que j’y travaille? Tu m’y attendais?

_ Bien sûr. C’est Annie qui me l’a dit et puis... tu as perdu ça au théâtre.

_ Oh! Elle reconnut le mouchoir. C’est vrai, j’ai du le lâcher en voulant courir vers les coulisses pour te voir mais je n’ai pas eu de chance, entre le technicien, tante Elroy, Eliza et tes admiratrices! Mais je t’ai vu sur scène et tu as été magnifique Terry, merveilleux!

_ Merci Candy. Il la regardait avec extase, fier qu’elle ait tant fait pour pouvoir le voir ce soir. Il lâcha sa taille mais prit sa main dans la sienne et la regarda encore plus admirativement.

_ Alors tu vas devenir infirmière? Mademoiselle tâches de son, une jolie infirmière ! Ca ne m’étonne pas au fond, tu m’as déjà soigné au collège, tu es douée pour ça. Mais au fait, il y a une de tes collègues, un serpent à lunettes, qui m’a chassé tout à l’heure et qui avait l’air furieux que tu sois sortie sans autorisation.

_ Flanny! Oh! Ca va être ma fête alors! Mais, bon, ce ne sera pas la première fois et au point où j’en suis, elle attendra bien encore un peu. Dire que je voulais aller à tous les hôtels de la ville pour te chercher, j’ai bien fait de rentrer finalement.

_ Oh oui. Et moi d’avoir eu la patience d’attendre plus d’une heure! Mais qu’est-ce qu’une heure? Je t’attends depuis si longtemps.

_ C’est toi qui es parti sans me dire au revoir Terry. Moi je t’ai raté sur le port de Southampton, je suis arrivée trop tard et... je l’ai bien regretté.

_ Il le fallait Candy. Pour aller chacun vers notre destin mais... j’aimerai que celui-ci nous... réunisse encore et peut-être.... pour toujours. Je... t’aime Candy. Voilà, je l’ai dit.

_ Oh! Terry! Moi aussi, je t’aime! Oui, ce n’était pas si difficile à dire après tout.

Elle était quand même rouge comme une pivoine mais Terry si heureux d’entendre ça. Alors il redevint hardi, la reprit dans ses bras et l’embrassa à nouveau. Et cette fois elle le laissa lui donner son premier vrai baiser d’amoureux et trouva ça agréable et chaud. Alors elle remit ses mains autour de son cou et le prolongea en devenant active aussi. Il fut ravi et épaté ensuite en la regardant.

_ Et bien! Où as-tu appris ça?

_ Terry!

Il rit de son air outragé et reprit vite sa bouche pour un nouveau baiser qu’elle ne refusa pas une seconde. Puis il retourna se délecter de ses prunelles émeraudes et caressa une mèche de ses boucles d’or en disant avec tant de douceur dans la voix:

_ Mon amour, ma Candy, veux-tu m’épouser?

_ Quoi? Tout de suite?

_ Ca me plairait mais si tu acceptes déjà dès maintenant d’être ma fiancée, en attendant que tu aies ton diplôme d’infirmière et moi être un plus grand acteur, je serai le plus heureux du monde. Oui, dis-moi que toi et moi c’est pour toujours, je dois repartir bientôt mais je ne veux plus qu’on se quitte vraiment.

_ Terry! Oui, je veux être ta fiancée avant de pouvoir être ta femme pour toujours, je sais déjà que je t’aime pour toujours.

Il eut un air encore plus heureux, la fit tourner un peu dans ses bras, l’embrassa puis mit son bras autour de sa taille et marcha au hasard avec elle pour savourer ce bonheur. Puis il revint sur terre.

_ Candy, je ne veux pas qu’on te renvoie de ma faute, rentre maintenant.

_ Oui Terry mais je vais me débrouiller pour te revoir avant ton départ. Quand pars-tu?

_ Demain à midi pile, le train pour Springfield et je dors à l’hôtel Lincoln.
_ Je ne peux pas te dire d’heure mais je te promets que je ne raterai pas ce rendez-vous là Terry, foi de Candy.

_ A tout à l’heure ma chérie, je t’aime. File maintenant.

Elle lui sourit mais lui vola encore un baiser avant de partir en courant, puis sauta en criant :

_ Hourra ! Jusqu’à l’entrée de l’hôpital.

Il éclata de rire, elle n’avait pas changé d’un pouce, elle était juste plus belle et presque une femme sous sa robe longue et légère, si désirable. Il se sentit aussi heureux qu’elle mais sa nature plus réservée se contenta de le manifester en partant en sifflant et rêvant. Le trajet lui sembla court alors qu’il mit une heure pour rentrer à l’hôtel et dut revenir à la réalité en voyant Susanna devant la porte de sa chambre.

_Terry! Où étais-tu? J’étais inquiète!

_ Je me suis promené. Dois-je te rendre des comptes Susanna?

_ Heu... non mais tu aurais pu me le dire tout à l’heure, tu es parti si vite après que je t’ai donné ce mouchoir. Tu as parlé de quelqu’un que tu voulais revoir, une certaine... Candy je crois. Qui est-elle? Tu l’as revue?

_ Oui Susanna, je l’ai enfin retrouvée mais ça ne te regarde pas. Excuse-moi, je vais me coucher maintenant.

Elle le regarda lui passer devant et rentrer dans sa chambre. Il avait l’air si heureux, il souriait et c’était la première fois qu’elle le voyait ainsi. Elle pâlit, regarda ses mains et s’en couvrit les joues.

« Oh non! Terry! Ne me fais pas ça, je t’aime tellement! »

***



Candy s’était fait grondée par Flanny Hamilton, elle avait fait profil bas devant elle, trop heureuse pour s’inquiéter de son ton courroucé, ses remarques sur son inconscience, ses menaces que si elle recommençait elle en informerait ses supérieurs. Elle remit vite son uniforme et fit son travail avec soin et ardeur pour ne plus se faire remarquer. Mais elle rêvait si fort qu’elle en oubliait ce qu’elle faisait, fit parfois deux fois la même chose ou retournait sur ses pas pour vérifier qu’elle n’avait oublié aucun malade. Enfin, à dix heures, elle osa aller demander deux heures de pause au lieu d’une, à sa chef et celle-ci lui accorda. Flanny lui fit encore la remarque que si la chef avait su qu’elle avait négligé sa garde de nuit, il en aurait été tout autre et qu’elle avait vraiment un toupet et un laisser aller sans limites. Candy la remercia de s’être tue et lui assura que ça ne se produirait plus jamais, que depuis hier ses absences n’étaient que par nécessité car tout son avenir en dépendait. Flanny lâcha alors un rire moqueur et dit:

_ Pour un stupide jeune homme si imbu de lui-même!

_ Il n’est ni stupide, ni imbu de lui-même Flanny. Pas plus que vous n’êtes vous imbue de vous même et sans cœur comme vous vous efforcez à le montrer. Nous sommes comme la vie nous a fait Flanny. Je vous admire et vous respecte pour votre professionnalisme et votre droiture mais je vous aime aussi beaucoup parce que je sais que vous êtes généreuse et que vous devez cacher vos blessures sous cette carapace par peur de souffrir encore. Mais vous cherchez le bonheur et l’amour comme tout le monde en vérité.

_ Sornettes! Je ne crois pas aux contes de fées moi, tout ça c’est bon pour les écervelées nées dans la soie et l’or. Ma réalité est ici, avec les malades, seul mon travail m’intéresse. Vous verrez bien Candy, la vie n’est pas un conte de fée, tôt ou tard, il vous abandonnera pour une autre et il ne vous restera que votre travail.

_ Jamais Flanny! On voit bien que vous ne le connaissez pas, il est droit et fidèle, comme moi, rien ne pourra nous séparer, rien qu’on puisse empêcher. J’espère que vous rencontrerez un jour quelqu’un d’aussi droit que lui, vous ou moi Flanny. Oui je vous le souhaite de tout mon cœur.

Elle sourit en voyant sa collègue hausser pour la deuxième fois les épaules et la laissa pour retourner vers son bonheur. Elle revêtit une robe simple mais jolie, coiffa ses cheveux en arrière avec juste deux pinces pour dégager ses tempes et mit quelques gouttes de parfum à la rose dans son cou. Elle prit son sac et fila trouver un fiacre qui l’emporta à l’hôtel. Elle fit la moue quand l’homme à l’accueil lui dit que monsieur Grandchester était parti il y a dix minutes sans préciser où il allait. Elle espéra qu’il n’ait pas eu l’idée de retourner la voir à l’hôpital et demanda à pouvoir l’attendre ici, ce qu’il accepta. Un quart d’heure après, elle reconnut Susanna Marlowe qui descendait l’escalier. Candy l’observa discrètement du canapé où elle s’était assise. L’actrice semblait déçue, triste ou embêtée. Puis elle regarda vers elle, l’observa quelques secondes puis vint lui demander si elle pouvait lui être utile.

_ Non, merci mademoiselle, j’attends un ami, il ne devrait pas tarder je pense.

_ Ah! C’est drôle, moi aussi j’attends quelqu’un mais allez savoir où il est encore parti, c’est sa manie de disparaître. Mais il sera bien obligé de revenir avant midi, il y a encore ses affaires dans sa chambre.

Candy comprit qu’elle parlait aussi de Terry et se sentit gênée de sa confidence. Mais elle trouva aussi déplacé qu’elle entre dans la chambre de Terry sans sa permission pour voir si ses affaires y étaient. Elle l’étudia alors plus en détails et trop curieuse lui demanda:

_ Votre ami, c’est quelqu’un de... spécial pour vous?

_ Spécial? Heu… oui, très spécial, très cher à mon cœur. Et le votre?

_ Moi aussi mademoiselle, oui, un ami vraiment très cher à mon cœur aussi.

_ Alors je vous souhaite qu’il arrive bientôt. Mais...

C’est alors que Terry entra, elle le vit la première et s’écria:

_ Ah! Voilà Terry. Excusez-moi mademoiselle, c’est lui que j’attendais et il veut sûrement me parler, il vient vers moi. Ter...

Elle se tut soudainement en voyant que le grand sourire de Terry qui se précipitait bien vers elle n’était pas pour elle mais pour cette fille. Candy se sentit gênée en la voyant pâlir quand Terry lui passa devant sans même un bonjour. Il prit la main de Candy qui se leva et reçut son merveilleux sourire et ses mots si doux encore:

_ Chérie! Je ne pensais pas que tu pourrais venir si tôt, j’ai fait une course indispensable, viens, j’ai encore tant de choses à te dire.

Candy s’empourpra en voyant le regard de Susanna virer à l’effroi et au désespoir mais ne put retirer sa main de celle de Terry et le suivit en lui offrant aussi un beau sourire avant. Ils grimpèrent vite les escaliers, il accéléra encore dans le couloir, ouvrit sa porte et elle ne vit tout de suite rien d’autre que ses prunelles marines puis ses lèvres douces l’emporter encore au paradis. Elle reprit à peine sa respiration et elle le vit sortir de sa poche une petite boite et lui mettre dans les mains. Il lui dit encore avec tendresse:

_ Candy, tu as accepté d’être ma fiancée avant d’être mon épouse pour toujours. Ceci est le symbole que tu l’es et surtout un gage de mon amour éternel et profond. C’était ça ma course urgente. Elle te plaît?

_ Oh oui! Terry! Elle est magnifique, je suis si fière d’être ta fiancée, je t’aime plus que tout mon amour.

Il sourit et lui passa à l’annulaire gauche, le fin anneau d’or serti d’une petite émeraude du vert de ses yeux, puis essuya ses larmes de bonheur et la serra fort dans ses bras. Et c’est elle qui décida ensuite qu’il fallait rajouter un baiser à cet instant féerique. Et celui-ci, il le vécut en se disant que quand ce serait le moment, cette déesse blonde lui ensorcellerait autant les sens que le cœur tant elle apprenait vite. Il savoura pour l’instant juste un peu de son cou si gracieux et aromatisé à la rose, en le respirant et le gravant dans sa mémoire pour rêver plus après.
Puis, vu l’heure tardive, il prépara son sac en lui demandant de raconter tout ce qu’elle avait vécu depuis leur séparation à Londres. Il apprit donc sa traversée mouvementée, leur autre impossible rencontre à la maison Pony, la naissance de sa vocation, son acharnement à la rendre possible et enfin il y a peu, une descente en rappel d’une tour avec un médecin officier. Ce dernier souvenir ne le fit plus sourire mais devenir ironique.

_ Alors, heureusement que je suis arrivé à temps, sinon qui me dit que tu n’aurais pas fini par aller le rejoindre en France!

_ Moi je te le dis Terry, il m’a juste aidée et invitée à danser.

_ Et à qui pensais -tu en dansant avec lui?

_ A personne. Je l’ai juste écouté me dire qu’il y avait plus important à faire que de risquer sa vie pour une valise, lui qui partait ensuite sur le front pour sauver des vies en savait quelque chose. Oh! Terry! Crois-tu que redevenir jaloux maintenant soit utile? A qui est-ce que je viens de me fiancer? Qui ai-je embrassé? Personne à part toi, jamais!

_ Oh! Chérie, excuse-moi, c’est idiot, c’est juste ce départ qui me rend encore cynique, je viens à peine de te retrouver. Tu pourrais passer ton examen à New York tu sais, ce ne sont pas les hôpitaux qui y manquent.

_ Je m’en doute mais tu l’as dit hier, nous devons suivre notre destin commencé avant de n’en faire plus qu’un bientôt. Terry, je ne peux pas partir maintenant, je me suis donnée beaucoup de mal pour être à cette école, mademoiselle Pony et mademoiselle Mary Jane qui m’ont aidée en me faisant confiance méritent que je finisse ici ce que j’ai commencé. Je dois d’abord obtenir mon diplôme avant de te rejoindre mais ce ne sera pas si long tu verras.

_ Oui, sans doute. Tu es fidèle en tout ma Candy, j’admire trop ça de toi pour vouloir que tu me suives, tu n’es pas une tête de linotte tout le temps, si réfléchie et forte dans les épreuves. De toute façon, je ne suis pas prêt non plus, je dois nous trouver un bel appartement, mon studio est trop petit et pas digne de toi.

_ Je ne veux vivre qu’avec toi et je serai bien n’importe où si c’est avec toi. Tu dois suivre ta voie et elle est déjà tracée, tu vas devenir le grand acteur que tu veux être et que tu es déjà. Le reste suivra tout seul parce que tu as le talent et le courage en toi. Moi je serai infirmière pareillement, ensuite on verra si je pourrai l’être aussi à New York.

_ Bien sûr ma princesse, jamais je ne t’empêcherai de faire ce qui te rend heureuse, que je sois grand acteur ou pas.

_ Alors je sais déjà que je serai la plus heureuse des femmes. Et toi Terry? A part le théâtre, où en es-tu avec ta mère?

_ Dois-t-on parler d’elle maintenant? Il nous reste peu de temps, je t’écrirais tout plus tard.

_ D’accord mais dis-moi juste si tu lui en veux encore?

_ Moins mais ce n’est pas simple. Il y a toujours ce secret, l’absence et je tiens à devenir acteur sans son aide, juste ses gênes. Mais je... l’aime telle qu’elle est et je suis en paix et prêt à plus avec le temps, voilà Candy.

_ Je suis heureuse de l’entendre Terry, je ne veux que te voir heureux, l’es-tu?

_ Maintenant le plus heureux du monde. Sans toi, je ne le serai jamais ma chérie.

_ Ni moi sans toi mon amour. Je le sais depuis ton départ, je t’aime et je n’ai aimé personne au monde comme toi. Je ne veux plus que personne ne puisse nous séparer pour toujours, comme l’a fait Elisa, jamais.

_ Personne ne le pourra ma Candy, je suis du genre à aimer peu de monde mais sincèrement, fidèlement et pour toujours. Et si cette vipère et son frère osent encore te faire du mal, je leur ferai regretter. Promets-moi de tout me dire pour préserver notre bonheur, chérie !

_ Je te le promets mon amour, je ne serai plus si naïve et généreuse avec tout le monde maintenant que je ne suis plus seule, que nous sommes deux et bientôt une famille.

_ Celle qui nous a tant manqué à tous les deux. Nous allons nous la construire nous même et elle sera pleine d’amour et de rires, je te le promets.

_ Oh Terry! J’ai tant confiance en toi, en nous, je t’aime et maintenant c’est moi qui déprime de te quitter. Mais... non, je ne veux pas te donner un souvenir de tristesse alors que je suis si heureuse. Et j’allais oublier.

Elle essuya sa larme et sortit une photo de son sac et lui tendit.

_ C’est Alistair qui m’a prise en uniforme il y a peu, un appareil de son invention et qui marche!

_ Sacré inventeur! Il est génial et toi la plus belle infirmière du monde. Tout le monde doit vouloir t’avoir pour infirmière plutôt que ce serpent à lunettes.

_ Terry! Ne sois pas méchant, Flanny n’est pas si austère, elle se camoufle derrière ce masque pour se protéger, comme toi avant.

_ Bon, je ne vais pas insister alors, tu vois mieux derrière les masques que quiconque, donc c’est possible. Alors je lui souhaite de trouver son âme sœur à ta collègue. Bon, j’ai fini mon sac et je n’ai pas de photos sur moi, je t’en enverrai pendant la tournée.

_ J’y compte bien Terry même si je ne risque pas d’oublier tes traits ni ce jour magique et inoubliable.

_ Je penserai à toi à chaque seconde, ton merveilleux sourire, tes yeux si profonds, tes cheveux d’or et tes merveilleuses tâches de son sont gravées à vie dans mon cœur, ma princesse.

_ Et mon nez Terry? Que penses-tu de mon nez?

Il sourit et se pencha vers elle pour embrasser son petit nez.

_ Le plus joli nez du monde, même Cléopâtre en est jalouse.

_ Pourtant, quelqu’un a dit un jour qu’il était drôle.

_ Quelqu’un de stupide alors. Il est divin ton nez, tes tâches de rousseur te vont à ravir et tu es pour moi la plus belle fille du monde et la plus parfaite en tout, mon élue, ma princesse, mon âme sœur, l’amour de ma vie.

Elle se noya dans ses yeux bleus puis reçut ce nouveau merveilleux baiser avec plus de passion et d’audace, ce qui fit encore plus rendre ivre d’espoir le jeune homme. Mais quelqu’un frappa à la porte et cria qu’il fallait partir hélas!

_ Oh! Zut alors!

_ Oui mais ce n’est pas encore la fin mon chéri, je t’accompagne jusqu’à la gare et jusqu’à la dernière seconde.

_ Génial! Alors en route ma dulcinée, partons chercher un fiacre rien que pour nous.

Il attrapa son sac, prit Candy par la main puis l’entraîna en bas et chercha un fiacre de vide. Susanna pâlit en les voyant et Candy se sentit gênée pour elle. Mais Terry ne sembla pas la voir, fit monter sa fiancée dans le dernier fiacre de libre et s’installa à ses côtés. Candy vit encore Susanna bien embarrassée et eut pitié d’elle.

_ Terry, je crois que ta partenaire n’a pas trouvé de place, tu devrais la faire monter avec nous.

_ Zut, Susanna! Bon, si c’est toi qui me le demandes, d’accord.

Son ton était on ne peut plus agrémenté de déplaisir et sa moue significative mais il obéit et redescendit dire à l’actrice qu’elle pouvait monter. Celle-ci retrouva d’un coup le sourire et l’espoir et eut l’audace de s’asseoir à côté de Candy, une fois montée. Terry faillit lui dire d’aller ailleurs mais le regard doux de Candy lui fit comprendre que ce n’était pas grave. Et puis en fait il préféra sa place et profita de sa chance pour ne cesser de regarder sa dulcinée, s’en gaver la mémoire et la trouver toujours plus parfaite pour lui. Susanna se sentit encore humiliée mais quand Candy lui adressa la parole par politesse, elle trouva tout de même fierté puis piques. Candy était encore gênée en ayant compris l’intérêt qu’elle avait pour Terry, non partagé et voulut montrer qu’elle n’était pas son ennemie.

_ J’ai beaucoup aimé votre prestation hier mademoiselle Marlowe, vous étiez très convaincante dans votre rôle.

_ Alors vous avez vu la pièce? Dit-elle avec surprise.

_ Oui, j’ai pu la voir heureusement, j’ai beaucoup aimé et applaudi le plus fort possible pour tous les acteurs.

_ Et vous étiez face à la scène ou dans un balcon privé?

_ Non, j’étais au troisième balcon, en fait.

_ Au poulailler! C’était interdit au public il me semble vu que nous jouions devant des notables de la ville. En plus vous avez du avoir une vue déplorable de si haut non?

Terry la regarda alors avec un brin de mépris et clama:

_ Candy n’a pas de problème de vue, elle a vu ce qu’elle voulait voir. Et sache que si ça n’avait été que moi, le poulailler, comme tu dis, aurait été empli de ceux qui aiment autant le théâtre sans être notable.

Candy se sentit fière de son fiancé mais eut de la peine pour Susanna après si sèche répartie de Terry. Mais l’actrice reprit d’un ton doucereux:

_ Ne te fâches pas Terry, j’ai dit ça sans voir mal, ton amie a eu raison, l’essentiel est d’avoir vu la pièce.

_ C’est certain ! Approuva-t-il en prenant la main de Candy, l’essentiel est qu’elle m’aie vu et que nous nous soyons retrouvé enfin.

Candy lui sourit mais sentit la voix de Susanna plus rauque quand elle reprit la parole.

_Et vous vous connaissez donc depuis longtemps et vous étiez perdu de vue alors?

_ C’est ça ! Approuva Terry encore. De vue seulement Susanna mais ça n’arrivera plus jamais maintenant.

Elle attendit une suite mais Terry s’était remis dans la contemplation de sa fiancée et elle vit son sourire si lumineux, jamais vu avant et hélas juste à cette fille. Candy se sentit encore un peu triste pour elle mais en repensant à ce que lui avait jeté Elisa au visage, se dit qu’elle avait encore menti car Terry n’était pas au mieux avec elle mais par contre, Susanna le voudrait bien mais seul Terry décidait de son cœur. Alors elle oublia Susanna qui se mit à regarder par la fenêtre tout le reste du trajet et elle admira aussi chaque seconde de son si beau fiancé.


Arrivés à la gare, Terry en sauta, aida Candy à descendre puis fit pareil avec Susanna qui sentit une seconde encore l’espoir mais qui disparut encore vite vu que Terry entraînait Candy par la taille plus loin sur le quai. Elle sentit des larmes de rage pointer à ses yeux et rumina:

« Oh! Non! Il l’aime, c’est évident ! Je ne comprend pas ce qu’il lui trouve, elle fait gamine, n’est pas aussi belle que moi et est plate comme une galette. Non, c’est impossible qu’il choisisse cette fille pour la vie, elle ne saura pas lui donner ce que moi je peux. Je vais me battre Terry, ne crois pas que je peux renoncer si vite, je te veux, je t’aurai par tous les moyens !»

Elle redressa le menton, le regard déterminé en les regardant encore se parler et ne vit pas qu’elle n’était pas la seule à s’intéresser au couple. Elisa était aussi sur le quai, avait vu Terry tenir la taille de Candy et lui passer devant le nez et était en rage. Mais elle, exprima tout haut ce qu’elle pensait:

_ Terry avec cette fille d’écurie! Oh! Elle va me le payer cette intrigante!

Susanna l’entendit, la reconnut et vint près d’elle.

_ Vous avez dit : fille d’écurie mademoiselle, vous connaissez cette Candy?

_ Oh! Susanna Marlowe! S’étonna-t-elle. Oui je connais cette fille, elle a été domestique chez mes parents. C’est une voleuse, une menteuse, une intrigante, une parvenue et une meurtrière. Elle a déjà causé la mort de mon cousin Anthony après l’avoir enjôlé sous ses airs de sainte Nitouche. Et à Londres elle a aussi obligé Terry à quitter le collège pour qu’elle n’y soit pas renvoyée et elle a du encore lui raconter des mensonges pour qu’il lui pardonne. Ce n’est pas possible sinon qu’il se soit encore entiché d’elle, il faudrait enfin qu’il voit clair avec cette pimbêche.

_ Et vous, vous aimez Terry mademoiselle?

_ Est-ce que ça vous regarde ? S’écria la rousse d’un ton outragé.

_ Du calme, je ne suis pas stupide, votre réaction est claire. Mais réfléchissez mademoiselle, à deux nous aurions plus de chances d’écarter cette Candy de Terry. Ne croyez-vous pas qu’il vaudrait mieux qu’il soit avec moi plutôt qu’elle si vous vous n’avez pas cette chance ?

Elisa réfléchit puis trouva que ça valait en effet mieux que Terry fréquente n’importe quelle fille plutôt que Candy.

_ Que proposez-vous?

_ D’être alliées et de se tenir au courant de tout ce qui pourra faire séparer ces deux là. Je vais vous donner mon adresse à New York, envoyez-moi tout sur elle et moi je ferai pareil de lui.

_ Entendu. Un conseil avec Terry, il aime l’audace, n’en manquez pas et vous pourrez peut-être l’avoir.

_ Merci du conseil et à bientôt mademoiselle.

Elle lui tendit un papier et Elisa lui donna sa carte en échange.

Plus loin Candy et Terry ne s’aperçurent de rien, trop pris l’un à l’autre pour ces dernières secondes. Il hésita longtemps mais dès que le sifflet du départ retentit, il chassa ses derniers scrupules et l’embrassa à nouveau devant tout le monde. Malgré sa surprise, Candy ne put le repousser. Désormais, dès qu’il posait ses lèvres sur les siennes, elle ressentait un trop grand plaisir et ne pouvait plus s’en détacher. Susanna leur lança un regard assassin et fulmina encore intérieurement en montant dans le train. Elisa siffla des noms d’oiseaux sur Candy en tapant du pied de rage. D’autres comédiens les virent et sourirent, tout comme Robert Hattaway, le metteur en scène de la troupe Stratford, qui les trouva charmants et comprit mieux maintenant pourquoi son poulain était si souvent rêveur. Mais le train démarrait et Candy émergea des bras de Terry et le poussa pour qu’il y monte. Il sauta sur le marchepieds mais y resta, les yeux brillants de larmes, ce qui la fit en verser aussi quelques unes.

_ Mon amour ! Dit-il, je t’aime pour l’éternité.

_ Moi aussi Terry ! Moi aussi mon amour ! A bientôt.

Ils restèrent soudés du regard jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus se voir puis Terry alla s’asseoir dans un wagon vide. Mais Susanna, redevenue confiante vu Candy loin maintenant, vint le rejoindre et troubler sa rêverie deux minutes après.

_ Oh! Terry, je suis contente qu’on parte, Chicago n’est pas une ville très belle, je trouve.

_ La plus belle du monde ! Dit-il les yeux encore plus rêveurs en regardant les champs verts à la fenêtre, verts comme les yeux de sa princesse.

Susanna fit la grimace, essaya encore de le détourner de ses pensées mais rien à faire. Un quart d’heure après ses tentatives de conversations sans réponses, il ferma les yeux pour revivre ses souvenirs dans sa tête, elle soupira mais resta avec lui, au moins elle pouvait le regarder.

***



Candy, avant de quitter la gare, dut subir les foudres d’Elisa, en rage.

_ Petite traînée! Embrasser Terry devant tout le monde! Quand je le dirai à Grand Tante Elroy, elle va te chasser de la famille une bonne fois pour toute!

_ Elle l’a déjà fait hier Elisa, souviens-toi, c’est moi qui en suis partie. Alors que veux-tu que me fassent tes menaces?

_ Bien sûr, je comprends maintenant, tu te fiches de la fortune des André maintenant, tu vises celle du duc de Grandchester désormais! Duchesse, c’est encore mieux pour une parvenue comme toi!

_ Tu dis vraiment n’importe quoi Elisa ! Terry n’est plus en Angleterre, ce n’est pas lui qui va devenir le futur duc de Grandchester. Et puis il se fiche autant que moi de titres et fortune, il ne dépend de personne et réussira seul, comme moi. Maintenant, laisse-moi passer, j’ai du travail. Va donc t’occuper de ton ennuyeux destin, achète-toi des robes et des rubans puisque tu ne sais faire que ça à part manigancer tes mauvais coups.

_ Espèce de fille d’écurie, d’intrigante, de traînée! Tu me le paieras!

Candy ignora cette nouvelle menace en haussant les épaules mais se dit qu’il faudrait tout de même se tenir sur ses gardes désormais car elle semblait encore plus jalouse et haineuse que d’habitude.


A suivre

Edited by Diogène - 8/12/2016, 15:57
 
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*****


Chapitre 2


Le temps d’apprendre




Le lendemain de ces merveilleuses retrouvailles, Candy reprit son travail le cœur léger mais une rumeur entendue dans un couloir la terrorisa. Il venait d’arriver paraît-il, un blessé grave et elle faillit s’évanouir en entendant que cet homme était Terrence Grandchester et qu’il était tombé d’un train. Epouvantée, elle se précipita à son chevet et fut soulagée car bien que seuls les yeux de l’homme étaient visibles, ces deux yeux noirs n’étaient pas ceux de Terry, si bleus. Mais l’homme la regardait avec grande méfiance quand il eut compris qu’elle savait qu’il n’était pas Terrence Grandchester. Elle n’eut pas le temps de lui parler davantage, Elisa débarqua dans la chambre et s’empressa de la chasser et lui interdire d’approcher Terry de prêt ou de loin. Elle la fit même changer de service par sécurité et lui montra bien avant, par son air satisfait et vainqueur, qu’elle avait déjà réussi à remettre à sa place cette fille d’écurie !


Comme Candy savait qu’il ne s’agissait pas de Terry, elle laissa Elisa à ses illusions mais s’inquiéta tout de même pour ce patient en de si mauvaises mains.
Quand elle reçut la visite d’un vieux monsieur qui s’avéra en fait, Alistair déguisé, elle apprit que Terry était bien sur scène la veille à Springfield, donc ce ne pouvait être lui. Candy confirma qu’elle le savait mais qu’elle s’inquiétait pour le blessé entre les mains d’Elisa, qui semblait avoir peur d’être reconnu. Plus tard, sa collègue Nathalie remit à Candy un billet du mystérieux blessé. Candy partit le voir, Elisa s’était absentée et elle reconnut enfin cet homme qui lui dit qu’ils s’étaient vu à New York, c’était Charlie Sanders, un ami d’enfance de Terry. Il s’était évadé en sautant du train pour ne pas aller dans un centre pour délinquants et lorsque l’hôpital lui avait demandé son nom, il avait nommé Terry. Candy lui promit de garder son secret mais Elisa revint et fut en colère de trouver Candy dans le service. Heureusement, Flanny la chassa car elle se fichait bien de ses menaces et de son nom. Seulement le soir, Elisa réussit à revenir et se rendit cette fois compte que le blessé n’était pas Terry. Et quand elle comprit, elle s’empressa d’aller le dénoncer à la police en espérant ainsi aussi faire de la peine à Candy et même la faire renvoyer de l’hôpital vu qu’elle était sa complice. Candy dut ensuite subir la colère et les insultes de Charlie lorsqu’on vint l’arrêter, elle eut beau essayer de lui dire que ce n’était pas elle qui l’avait dénoncé, il n’en crut mot. Heureusement le médecin du service arriva, le docteur Bobson, et empêcha qu’on emmène Charlie car il n’était pas encore guéri de sa commotion cérébrale. Candy comprit seule que c’était Elisa qui l’avait dénoncé mais Charlie continua ensuite à la croire coupable. Puis Elisa, sûre d’elle, revint mettre sous le nez de Candy la facture des soins qu’elle avait payé pour Charlie en croyant que c’était Terry. Comme Candy refusa de payer cette dette qui ne la concernait pas, Elisa déclara qu’elle allait donc l’adresser à la maison Pony pour se faire rembourser. Candy pâlit mais l’envoya promener en lui disant qu’elle allait trouver l’argent pour la payer. Elisa se sentit si contente d’elle qu’elle laissa un délai à Candy, pensant ainsi qu’elle allait devoir vendre tout ce qu’elle avait pour payer ou même emprunter à tout le monde, voir même voler.
Mais Candy était honnête et fière, elle choisit d’essayer de fabriquer des fleurs en papier comme elle avait vu une femme le faire. Hélas, elle n’était pas habile pour ça et perdit des heures pour bien piètre résultat. Mais une nuit où elle découpait encore ses fleurs dans du papier crépon, elle surprit Charlie, un couteau à la main, qui essayait de s’enfuir de l’hôpital. Elle essaya de l’arrêter, il la poussa, elle tomba. Charlie se retourna finalement et en voyant les fleurs sur la table, il revint, la releva et comprit dans ses yeux si doux et suppliants, que ce n’était pas elle qui l’avait dénoncé. Il lui raconta alors sa vie, pleine de mauvaises circonstances et rencontres. Et surtout de sa mère qui fabriquait aussi des fleurs pour le nourrir quand il était petit. Du coup, Charlie resta et l’aida à faire de belles fleurs. Hélas, ça ne rapportait pas assez pour payer Elisa et Candy pensa alors à aller demander au directeur de l’hôpital un acompte sur sa paie du mois prochain.
Mais la providence lui évita de le faire car ce quatrième jour après le départ de Terry, elle trouva dans son casier recevant le courrier, une lettre de lui qui lui apporta autant de joie que de soulagement pour ce souci d’argent.


Terry avait envoyé sa lettre de Springfield et celle-ci contenait en plus un chèque pour payer les frais d’hospitalisation de Charlie. Il disait dans sa longue missive qu’un journaliste lui avait appris, après la représentation du roi Lear à Springfield, toute l’histoire de celui qui se faisait passer pour lui à Chicago. Il avait donc vite écrit sa lettre pour rassurer sa fiancée sur sa santé puis il avait pensé que Charlie aurait besoin d’argent mais comme il était trop fier, il ne l’accepterait pas de sa main. Terry raconta à Candy que Charlie l’avait plusieurs fois aidé lors de ses premières années de vie à New York, puis l’avait revu dans ses deux derniers voyage là-bas. Il l’assurait que Charlie était un type droit et gentil quand on lui faisait confiance, il n’y avait que la vie et les galères qui l’avaient fait devenir un peu voyou. Candy le savait déjà et s’empressa d’aller payer cette facture à Elisa mais à peine passée la porte d’entrée de l’hôpital, elle se heurta à Daniel qui, justement, venait lui dire de payer au plus tard demain sous peine de représailles. Candy lui montra le chèque, Daniel fit la grimace car sa sœur avait espéré qu’elle ne puisse pas payer. Mais Candy ne lui donna pas le chèque, elle se méfia et préféra aller voir la trésorerie de l’hôpital pour payer directement la facture des soins de Charlie et de leur dire de rembourser Elisa Legrand eux même. Elle eut raison car quand Daniel rapporta à sa sœur le reçu de la facture pour les soins de Charlie, celle-ci, furieuse, dit à son frère qu’il n’avait pas été malin pour ne pas avoir su prendre le chèque à Candy. Elisa se dit ensuite que ce n’était que partie remise pour se débarrasser de cette Candy de malheur.


Une fois la facture payée, il restait un peu d’argent pour acheter de la limonade à la fraise, la boisson favorite de Charlie selon Terry. Mais quand elle entra dans la chambre avec ses bouteilles et le sourire, elle la trouva vide, Charlie était parti en laissant deux belles fleurs en papier sur le lit. Candy fut triste mais se dit que Charlie allait peut-être retrouver sa mère pour lui dire qu’il n’était pas un mauvais fils. Finalement, elle partagea les limonades avec le sympathique docteur Bobson puis retourna lire la lettre de Terry.


Cette lettre contenait, outre le récit de son amitié pour Charlie, plein de mots d’amour mais aussi une photo de lui devant le théâtre où il avait joué, faite en urgence mais qui la rendit encore émue. Elle la mit dans un cadre et la posa sur sa table de chevet pour le voir à chaque réveil et l’embrasser à chaque coucher. Elle reçut ensuite une nouvelle lettre de chaque nouvelle étape : Indianapolis, Colombus, Pittsburgh, Philadelphie. Puis, le mois suivant, après Trenton, une de New York, la tournée étant finie. Alors, elle prit un après-midi de repos et lui en écrivit une de dix pages, racontant tout ce qu’elle n’avait pas eu le temps de lui dire de sa vie, de la profondeur de son amour et de sa foi en lui.



Après Charlie, dans son travail, Candy fut encore confrontée à la misère, celle d’un enfant qui avait volé un flacon de médicaments dans la pharmacie de l’hôpital tout en se faisant passer pour un patient aimant jouer aux cartes la nuit. Mais ce flacon était un poison mortel, Candy arriva heureusement à temps au chevet de la mère de Tony, malade du cœur et tout finit bien car le docteur Bobson paya les frais pour soigner cette pauvre femme.


Candy se rendait de plus en plus compte que les gens pauvres ne pouvaient pas toujours se soigner, sauf si certains, comme ce bon docteur Bobson, se montraient plus généreux et solidaires. Elle se promit de toujours faire ainsi aussi pour exercer son métier.


Quelques jours après, l’hôpital Ste Johanna songea à envoyer une infirmière en Europe car la guerre y faisait rage. Candy se dit qu’elle ne pouvait pas partir car Terry serait trop malheureux si elle faisait ça. Puis elle vit Flanny avancer d’un pas et se proposer. Candy la vit l’œil bien décidé et allait ouvrir la bouche pour lui demander d’y renoncer mais un médecin vint annoncer que finalement, ce serait reporté au mois prochain car une des infirmières venait de se casser le poignet droit à cause de la négligence de quelqu’un ayant laissé traîné un sac de billes à terre, ainsi une autre infirmière devrait la remplacer un mois. L’effectif était trop restreint pour se passer de l’une d’elle et on envoya Flanny effectuer ce remplacement. Celle-ci s’inclina sur cette décision et Candy se sentit à la fois soulagée et honteuse car elle se souvint avoir vu ce sac de billes tout à l’heure, l’avait ramassé pour le ranger dans le tiroir des objets trouvés mais l’avait reposé plus loin à cause de la sonnerie qui signalait la pause qu’elle attendait impatiemment pour pouvoir lire sur un arbre, la nouvelle lettre de Terry arrivée ce matin.


Tout en ressassant tout cela un peu plus tard et après avoir vu que l’infirmière au poignet cassé ne serait pas longtemps invalide et n’aurait pas de séquelles, elle se dit que finalement, c’était une bonne chose d’avoir oublié ce sac de billes vu que ça avait permis de garder Flanny ici.


Le lendemain, elle se leva en ayant envie de parler à Flanny pour savoir pourquoi elle voulait partir sur le front mais l’arrivée d’un blessé arrêta son projet. Un homme avait été amené parmi des blessés rescapés d’un déraillement de train bombardé sur le front italien. Puis il avait été mis dans la chambre zéro réservée aux vagabonds et criminels car il disait être amnésique et on le soupçonnait d’être un espion. Lorsque Candy le vit, son cœur fut bouleversé. Malgré son visage sans barbe ni moustache, ni lunettes sombres, elle le reconnut facilement, cet homme amnésique et inconscient bandé au front, c’était Albert ! Elle trouva aussi Bup, le putois, à ses côtés et le cacha dans sa chambre. Le professeur Léonard, le directeur de l’hôpital Ste Johanna, lui dit qu’étant donné qu’il était amnésique, qu’on avait pas pu l’identifier et qu’il n’avait pas d’argent sur lui, il resterai dans la chambre zéro, une chambre insalubre, sans soleil, pour les criminels et les vagabonds. Candy lui affirma qu’elle connaissait bien ce patient, il n’était pas un criminel, c’était Albert. Seulement, elle ignorait son nom et son adresse alors ça ne rassura pas le professeur Léonard car une rumeur disait aussi qu’il y avait un espion dans ce train et il n’était pas exclu que cet amnésique ne soit cet espion. Candy refusa de croire pareille rumeur, elle le dit clairement à ses collègues d’ailleurs, Albert était son ami depuis longtemps et elle n’avait pas besoin de savoir son nom et toute sa vie pour savoir qui il était au fond de lui.


Quand Alistair, Archibald et Annie débarquèrent dans le couloir en se faisant passer pour des patients avec leurs faux bandages, elle leur raconta son inquiétude pour Albert. Il partirent le voir discrètement et le reconnurent aussi. Puis, Candy suivit ses amis dans la cour de l’hôpital où l’attendait une surprise : Patricia O Brian. Candy fut heureuse de revoir son amie revenue de Londres car la guerre en Europe s’étendait, malheureusement.


Un peu plus tard, Candy découvrit qu’Albert s’était réveillé mais il ne la reconnut pas alors, elle ne lui dit pas qu’elle le connaissait et l’appela Albert en prétextant que c’était le prénom de son frère.


Les jours qui suivirent, Albert essaya de se souvenir de qui il était et de son passé mais ses maux de tête le fatiguaient et Candy lui dit d’être patient, il guérira avec le temps et ses souvenirs reviendront peu à peu.


Le début des examens arriva aussi et Candy dut y consacrer tout son temps de libre. Elle était déjà certaine de sa vocation depuis un moment mais maintenant, fiancée à son Terry, elle devait aussi se surpasser pour lui, qu’il soit fier d’elle.

***



Terry avait gagné un peu d’argent avec son premier rôle d’acteur mais pas de quoi encore permettre de louer un plus grand appartement que son modeste studio. Il écuma les annonces mais ce qu’il visait pour Candy était encore au dessus de ses moyens. Au théâtre, il n’y avait aucune nouvelle pièce de prévue alors il prit un travail de nuit, docker au port. Au début, ce fut difficile ces nuits à décharger les bateaux mais il ne se découragea pas, porté par ses projets et en pouvant travailler en rêvant à Candy, c’était plus facile. Il acquit vite du muscle et de la résistance et au port on respecta pareille volonté sans jamais se plaindre. Le matin, il dormait, l’après-midi il se rendait au théâtre, voir les auditions éventuelles puis rentrait écrire à sa belle. Il économisait chaque sou, n’achetait rien d’indispensable et ça fit parler autour de lui. On le disait radin et fier vu sa solitude mais il s’en fichait, habitué à ignorer depuis longtemps les critiques et à être tel qu’il aimait être. Seule sa Candy pouvait l’influencer, elle l’aimait comme il était mais pour elle, il essayait quand même d’être poli et moins susceptible avec ceux qui semblaient sincères. Alors il accepta la présence de Susanna qui ne manquait pas de venir le voir tous les jours et qu’il pensa une amie sincère. Et même s’il n’était pas bavard avec elle, il restait poli de ses babillages incessants et au moins souriant à défaut de jovial. Mais son culot semblait sans limites et il retenait souvent des réparties sèches face à sa curiosité et ses demandes répétées de savoir son avis sur ses tenues, coiffures et autres colifichets. Mais quand elle débarqua chez lui sans même frapper à la porte, il faillit l’injurier et la jeter dehors car il était en train de s’habiller et était encore torse nu et juste boutonné du pantalon. Mais elle ne sembla pas s’en soucier et il l’oublia aussi vu ce qu’elle cria et brandit devant ses yeux, un papier qui disait que Roméo et Juliette allait être la prochaine pièce jouée par la troupe Stratford. Il lui prit le papier des mains et le lut. Les auditions commençaient aujourd’hui, il sentit la joie l’envahir et ne vit pas le sourire admiratif de Susanna et son regard fixé sur le torse imberbe et les muscles bien dessinés du jeune homme.

_ Roméo et Juliette! S’exclama-t-il en revoyant sa Candy en Juliette. Puis juste dans sa tête:

« Ce rôle est pour moi, ma Juliette viendra me voir ici et je ne pourrai que le jouer mieux qu’un autre vu que je ressens l’amour de Roméo pour celle qu’il aime. »

Susanna tenta de le sortir de son rêve en s’enthousiasmant fort à l’idée d’avoir le rôle de Juliette, qu’il soit son Roméo et réaliser ainsi son grand rêve. Il ne l’entendit pas, il enfila vite sa chemise puis une veste et partit sans s’occuper d’elle.

_ Où vas-tu Terry? Attends-moi!

Elle courut, dévala l’escalier et réussit à le rejoindre en bas. Il dit enfin qu’il allait auditionner pour le rôle titre et se débrouiller pour l’avoir car il connaissait par cœur le texte et était fait pour ce rôle vu qu’il avait aussi sa Juliette depuis longtemps et pour toujours dans le cœur. Susanna blêmit mais se jura que si elle décrochait le rôle de Juliette, il la verrait enfin vraiment et lui ferait oublier sa Candy bien trop gamine.

***



Candy reçut une lettre de Terry la veille de ses examens et fut heureuse et certaine que son Terry aurait le rôle de Roméo vu qu’il était le sien à jamais et que plus elle apprenait de lui, plus elle le trouvait parfait en tout. Elle ne pouvait plus lui écrire de lettre pour lui dire alors elle courut envoyer un télégramme empli d’amour. Le soir, elle pria de toutes ses forces en révisant ses livres de médecine et rêvant à ce demain si merveilleux.


Elle réussit ses examens et obtint son diplôme d’infirmière qu’elle fêta avec ses amis Archibald, Alistair, Annie et Patricia. Ils passèrent un bel après midi, Candy reçut son baptême de l’air dans le nouvel avion d’Alistair, qui ne vola pas longtemps encore, ils durent sauter en parachute mais tout se finit bien et malgré sa grande peur, Candy n’en gardera qu’un beau souvenir.
Elle n’ avait encore rien dit de ses fiançailles avec Terry mais sa belle bague mise toute la journée pour se donner plus de force à réussir et pas retirée le soir pour rester encore en osmose avec Terry qui passait son audition, attira les curiosités. Elle se sentait de toute façon prête à le révéler et fut fière qu’ils l’acceptent facilement et soient heureux pour elle, même Archibald qui était quand même moins ravi que les autres.


Mais ils avaient du en parler entre eux plus tard et se faire espionner par Elisa car elle vint deux jours après faire une nouvelle scène à l’hôpital. Elle lui cria au visage qu’elle n’était pas fiancée à Terry car elle n’avait pas eu l’autorisation de l’oncle William pour le pouvoir. Qu’il n’avait pas encore décidé de rendre caduc l’acte d’adoption et ne le ferait sûrement pas, quoi que dise grand tante Elroy vu qu’il avait du choisir son héritière en vue d’avoir une descendance et donc la marier avec un héritier du même rang et pas un acteur de théâtre. Candy haussa les épaules mais plus tard elle s’inquiéta tout de même de ce qu’avait dit Elisa de plus probable, qu’elle ne pouvait se marier sans l’autorisation de son tuteur s’il le restait, avant sa majorité, à vingt et un ans, donc pas avant quatre longues années. Alors elle écrivit une lettre à l’oncle William pour lui demander la permission de pouvoir se marier avec qui elle voulait ou alors de lui rendre sa liberté s’il préférait choisir hors des critères du cœur. Dans ce cas là, mademoiselle Pony redevenait sa tutrice et elle ne doutait pas qu’elle accepterait le bonheur de sa protégée. Elle posta la lettre à l’attention de Georges Johnson à Lakewood car il était le seul à savoir où était son employeur et à pouvoir le contacter.

***



Terry décrocha le rôle de Roméo et les critiques et rumeurs envahirent le théâtre car on avait reconnu Eléonore Baker dans la salle pendant son audition et on imagina d’abord qu’il était son amant puis un plus malin vit la ressemblance des yeux et en conclut qu’il était le fils de la célèbre actrice qui l’avait donc pistonné. Terry s’en ficha d’abord puis fut surpris quand Susanna clama haut et fort à tous que Terry avait eu le rôle parce qu’il était meilleur qu’eux, comme elle avait eu celui de Juliette juste par son talent. En effet, elle avait été choisie aussi et elle était maintenant si certaine que plus rien ne pourrait lui enlever ses rêves, même pas Candy, qu’elle impressionna tout le monde. Terry était content pour elle et pensa qu’elle était vraiment une bonne copine alors il fit un effort pour lui faire plaisir en l’invitant à dîner pour fêter ça. Elle retint trop de joie mais était si heureuse qu’elle osa encore un peu plus. D’abord elle se pomponna longuement et mit une robe très décolletée pour qu’il voit qu’elle était femme, elle. Terry trouva qu’elle était trop parfumée et maquillée mais garda ses opinions et resta souriant et à son écoute tout le dîner. Mais il le trouva long et encore la conversation de Susanna guère passionnante. Il tenta bien de lui parler un peu de lui mais n’y arriva pas, elle semblait ne vouloir savoir que des stupidités et il n’était pas à l’aise comme avec sa Candy si perspicace. Elle crut pourtant qu’il était sous son charme vu son sourire perpétuel et se permit au retour de se suspendre de façon possessive à son bras, simuler un risque de chute pour qu’il la retienne, ce qu’il fit mais sans rester plus à la serrer comme elle avait cru. Mais ça ne l’empêcha pas de tenter de se faire inviter ensuite chez lui pour un dernier verre. Il refusa poliment mais lui dit franchement que d’une part, il n’y avait rien à boire chez lui et d’une autre, qu’il devait maintenant écrire à Candy pour lui raconter sa réussite, même si elle n’en avait jamais douté. Susanna cacha sa rage, répondit à son au revoir pressé, le regarda courir et sûrement grimper quatre à quatre les marches pour ce maudit projet et piétina ensuite le sol en serrant les poings et pleurnichant sur son malheur. Mais elle repartit, déjà à nouveau prête à trouver autre chose pour ruiner cette histoire qui n’en finissait plus et l’avoir à elle.


Terry se dépêcha de télégraphier à Candy pour lui annoncer qu’il avait décroché le rôle de Roméo, Susanna, celui de Juliette et il lui promettait de lui envoyer un billet pour la pièce qui aurait lieu fin novembre. Il lui dit de bien travailler jusque là pour avoir droit à un congé et la félicitait d’avoir décroché son diplôme.

***




Candy reçut le télégramme de Terry et folle de joie, elle partit le lire à Albert qui semblait aimer qu’elle lui raconte ses journées, ses amis et son fiancé. Il n’avait toujours pas retrouvé un seul souvenir mais il était plus calme.


Mais c’était une erreur de le penser car le lendemain, Albert avait disparu de l’hôpital, il était parti et n’avait laissé qu’une note disant qu’il préférait rechercher sa mémoire seul sans être un poids pour personne. Candy partit alors à sa recherche, Archibald et Alistair, qu’elle rencontra se disputant avec Daniel, décidèrent de l’aider à chercher Albert. Après longtemps à errer dans les rues, Candy songea qu’il avait plutôt du partir à la recherche de la nature vu son caractère. Elle pensa au lac Michigan et en longea les berges dans le parc longtemps, sans succès. Puis, abattue en pensant qu’elle ne le retrouvera jamais, elle se mit à pleurer puis l’appela plusieurs fois. Personne ne lui répondit, elle se sentit anéantie. Mais en relevant la tête, elle vit Albert qui s’avançait vers elle et lui demanda pourquoi elle s’inquiétait et était si triste pour un inconnu qu’elle ne connaissait pas il y quelques jours ?


Elle décida alors de lui dire la vérité, qu’elle le connaissait depuis des années, qu’il lui avait sauvée la vie enfant, qu’il l’avait consolée souvent, qu’il était comme un frère pour elle. Albert fut ému d’entendre tout ça mais ça ne le renseigna guère sur son identité. Il semblait n’être qu’un vagabond errant dans cette région avec pour seule compagnie la plupart du temps, un putois. Mais il accepta tout de même de retourner à l’hôpital. Archibald et Alistair les y attendaient dans la nouvelle invention de ce dernier, un fourgon aménagé pour pouvoir y dormir, y vivre, une sorte de maison roulante en fait.
(Le premier camping-car, campervan ou autocaravane pour touristes n’arrive qu’en 1930 mais l’invention date de 1901 pour les travailleurs itinérants ou quelques riches originaux et de constructions artisanales et donc de modèles uniques)


Le professeur Léonard les accueillit aussi mais pour avertir Albert qu’il était guéri et n’avait plus de raisons de rester ici, surtout sans argent pour payer. Et de toutes façons, la chambre zéro n’existait plus, on l’avait transformée en débarras.


Une fois dehors, Albert pensa encore à partir pour ne pas causer d’ennuis mais Alistair proposa qu’il dorme dans son fourgon en attendant. Albert accepta finalement, Candy le borda puis courut dans sa chambre pour écrire une lettre à Terry, pour lui demander si elle pouvait chercher un appartement pour pouvoir soigner Albert.

***



A New York, Susanna se sentait comme une reine depuis qu’elle avait eu le rôle de Juliette et qu’elle allait jouer aux côtés de Terry, son Roméo.
Ce midi elle partit chez lui le moral haut et la concierge lui demanda si elle pouvait monter son courrier au jeune homme car elle avait mal aux jambes ces temps. Susanna accepta d’abord sans idée derrière la tête mais en regardant les deux lettres en grimpant les marches et en voyant que l’une d’elle était de Candy car son nom était derrière l’enveloppe, elle sentit un nouveau relent de haine et la curiosité déborda. L’autre lettre venait d’un concessionnaire automobile et ne l’intéressa pas mais la lettre épaisse de cette fille lui brûlait les doigts. Elle pensa d’abord la brûler, la détruire pour qu’il pense que sa « chérie» commençait à l’oublier mais elle se dit que la concierge le saurait ou que la prochaine missive clarifierait les choses et ne changerait rien à la fin. Mais pouvoir la lire serait un atout, plus elle en saurait sur cette fille mieux ça vaudrait car Elisa ne savait au fond pas grand chose et il est vrai, surtout des idées reçues dues à sa haine, voir des mensonges. Alors elle décacheta avec précaution l’enveloppe et parcourut vite les quatre pages. D’abord elle grimaça de dégoût tant ces mots si clairs dégoulinaient d’amour mais elle fut attentive à tout et ne regretta pas sa patience ensuite. Candy racontait qu’un certain Albert, blessé et amnésique, qu’elle avait soigné seule car on en voulait plus à la clinique vu qu’il n’avait pas de quoi payer les frais, devait encore recevoir ses soins. Ainsi elle avait pensé à prendre un appartement avec lui pour encore s’en occuper et le guérir de son amnésie et demandait à Terry son autorisation. Susanna ricana en imaginant la réaction de Terry, fier, orgueilleux et forcément jaloux. Jamais il n’accepterai pareil affront, sa fiancée vivant avec un homme qui n’était pas de sa famille, un genre de vagabond, c’était inconcevable. Elisa avait donc raison, cette fille était sans morale, une traînée et cette fois elle avait trop demandé, elle allait perdre. Susanna se hâta alors de recoller l’enveloppe et se rua chez Terry pour lui donner ces merveilleuses nouvelles. Elle frappa mais vu l’absence de réponse, entra en sachant qu’il ne fermait jamais à clef. Il dormait mais sursauta vu comme elle fit claquer ensuite la porte. Il grogna alors qu’elle aurait pu frapper.

_ Si Terry, j’ai frappé mais vu que tu n’as pas répondu, je suis entrée pour te réveiller car il est plus de midi, nous avons une répétition à quatorze heures et tu as du courrier à lire avant, regarde !

Il oublia tout en reconnaissant la fine écriture de sa belle sur l’enveloppe devant ses yeux. Il la prit, posa celle du concessionnaire automobile sur son chevet et décacheta avec hâte l’autre. Puis il allait dire à Susanna qu’il la remerciait et la rejoindrait au théâtre mais elle était déjà partie vers le coin cuisine pour, semble-t il, préparer du café alors il la laissa faire et se leva pour s’asseoir sur son lit et lire sa lettre. Susanna surveillait discrètement ses réactions et apprécia son air surpris puis inquiet. Mais ce fut fugace et il termina sa missive par un sourire et son air rêveur habituel. Susanna en fut surprise et déçue, comment pouvait-il croire encore en la « pureté» de Candy qui se fichait de lui ? Mais elle ravala son sentiment vu qu’elle ne pouvait le lui dire et se consola en fixant son torse vu qu’il était encore juste en pantalon de pyjama. Terry finit par sentir son regard et se leva alors vite pour mettre un polo et ne répondit pas à son sourire qui le mit mal à l’aise. Il la remercia quand même vu qu’elle lui tendit un café, le but vite et dit:

_ Maintenant je préférerai que tu me laisses Susanna, merci encore mais je vais prendre une douche, je te retrouverai au théâtre à quatorze heures.

_ Je peux t’attendre ici Terry, je ferai la vaisselle en attendant que tu sois prêt, un peu de ménage aussi.

_ J’ai déjà une femme de ménage Susanna, ma logeuse. Ne te donne pas cette peine, merci mais à tout à l’heure.

Cette fois, elle ne trouva plus rien à dire, il avait repris son regard dur alors elle obéit mais se jura de surveiller mieux tout ce courrier.

Terry soupira, pour la première fois il se prit à penser que Susanna voulait peut-être plus qu’être son amie. Il se demanda si Candy avait vu ça à Chicago, en tout cas elle n’avait rien évoqué et lui faisait entière confiance vu qu’elle lui disait même souvent de saluer Susanna de sa part. Maintenant qu’il la connaissait comme personne, il était certain qu’elle plaignait Susanna et voulait tout de même qu’elle puisse au moins l’avoir en ami plutôt que rien du tout. C’était Candy, généreuse et pas du genre à vouloir écarter quelqu’un parce qu’il pouvait vouloir la même chose qu’elle car confiante et entière. Il se sentit encore plus fier, non, personne ne pouvait prendre sa place dans son cœur, pas plus que lui pouvait imaginer n’importe quoi quand ce cœur d’or voulait aider son meilleur ami de toute une vie, ce cher Albert. Il connaissait Albert, son ami aussi à Londres et bien que désolé de son amnésie, il ne s’inquiétait pas qu’il puisse vivre sous le même toit que Candy. Alors il prit vite sa douche et écrivit ensuite à son adorée qu’elle devait faire ce que son cœur lui dictait, sans s’occuper des mauvaises langues car il avait foi en elle et en son talent pour guérir Albert.

***



Candy reçut cette lettre trois jours après. Elle s’inquiéta quand elle lut qu’il n’était pas question qu’elle vive sous le même toit qu’un homme, mais soupira et le traita d’animal après avoir lu la suite : personne sauf notre grand ami Albert. Il rajoutait:

« Prends bien soin de lui, j’espère aussi le revoir bientôt, tendres baisers ma chérie, ton Terry. »

Mais pour son autre question, celle adressée à son tuteur pour pouvoir se marier, elle ne reçut qu’un mot de Georges Johnson trois jours après celle de Terry. Il disait que monsieur William était à l’étranger et qu’il lui transmettrait son message à son retour, prochainement. C’était vague mais elle mit de côté ce problème car l’urgent était maintenant de trouver un appartement et ce fut plus difficile qu’elle ne le pensait. Dès qu’elle disait par honnêteté qu’Albert n’était ni son mari ni son frère, on leur fermait la porte. Mais grâce à Archibald, Annie, Alistair et Patricia, ils n’eurent pas à dormir à la belle étoile. Le propriétaire, monsieur Thomas, une fois bien compris que c’était pour soigner Albert d’une amnésie due à la guerre en Italie, accepta enfin de louer son bel appartement meublé avec deux chambres car sa fille vivait là-bas. Ils purent y emménager le soir même de l’accord. Albert apprit donc plein de choses de sa vie grâce à ses amis et surtout Candy mais encore rien de sa propre mémoire. Mais suite à ce choix de vie, la jeune infirmière fut renvoyée de l’hôpital Ste Johanna par le directeur qui lui avait bien dit avant qu’elle quitte sa chambre à l’hôpital, qu’il ne pouvait tolérer du personnel aux mœurs aussi libre. Albert se sentit ensuite coupable et voulut partir mais Candy l’en dissuada en lui faisant lire la lettre de Terry.

_ Vous voyez Albert, mon fiancé nous fait confiance car il sait qui vous êtes, il vous a pris comme modèle à Londres après que vous l’avez secouru et êtes devenu son ami. Terry est très méfiant de nature sauf quand il a vu le fond du cœur de quelqu’un et lui a donné sa confiance pour toujours. Il vous respecte Albert et moi qui sait autant qui vous êtes depuis toute petite, je vous demande de me faire autant confiance, comme à Terry, en nous laissant faire ce qui est le mieux pour vous guérir. Vous m’avez tant aidée Albert, sans vous je ne serai peut-être pas là, en tout cas moins heureuse et confiante. Ceux qui m’importent nous font confiance et ceux qui voudraient que nous soyons aussi sournois que leur âme ne comptent pas. Du travail, j’en retrouverai Albert, ne vous inquiétez pas. Par contre, physiquement, vous êtes maintenant en condition d’en exercer un aussi et je pense que ça serait mieux pour votre mental. Vous adoriez soigner les animaux, vous pourriez essayer à nouveau de travailler dans un zoo, il y en a un pas loin. Mais soyez patient pour la mémoire, elle reviendra peu à peu mais mieux avec quelqu’un qui vous connaît que seul.

_ Chère Candy, vous êtes un ange. Je reste alors et je vais dès demain chercher du travail au zoo car c’est vrai, même sans mémoire, je sens que la nature et les animaux sont mon univers. D’ailleurs, j’ai toujours trouvé normal qu’un putois me suive et lui aussi vu qu’il ne m’a pas encore asphyxié, c’est une preuve.

***



Elisa venait de lire la nouvelle lettre de Susanna Marlowe et elle ricana en apprenant que Candy avait décidé de cohabiter avec un amnésique vagabond et que Terry n’avait semble-t-il pas de problème avec cette idée. Pour Elisa, ça signifiait simplement que Terry n’était pas si amoureux d’elle et que c’était une bonne occasion pour de se débarrasser de cette orpheline de malheur en propageant comme il le fallait cette information.

***


Avant de chercher du travail ailleurs, Candy retourna à l’hôpital et tenta d’abord de discuter avec le directeur de Ste Johanna pour qu’il la réintègre. Il resta sourd à ses revendications puis suppliques alors elle alla demander une place de femme de ménage à la place au chef du personnel.

Lorsque le professeur Léonard la reconnut dans son bureau, il voulut encore la renvoyer mais une infirmière vint lui dire que Catherine, une volontaire engagée au front français six mois plus tôt venait de mourir là-bas. Et lorsque les collègues plus anciennes l’apprirent ainsi que le renvoi de Candy, elles intervinrent pour dire au directeur qu’il n’était pas normal de renvoyer une infirmière qui voulait s’investir pour soigner un blessé de guerre amnésique. Le directeur, touché au cœur, accepta alors de réintégrer Candy pour respecter la mémoire de Catherine.

Mais le lendemain, il la convoqua à nouveau en lui annonçant cette fois que la famille Legrand avait demandé à ce qu’elle soit renvoyée aussi pour comportement immoral et insultant à la famille André. Candy lui expliqua qu’elle attendait justement que son oncle adoptif la libère de cette tutelle ou lui dise clairement qu’il accepte sa façon de vivre. Elle lui dit aussi brièvement que les Legrand ne cherchaient qu’à nuire et se venger d’elle. Le directeur admit que leur demande avait été écrite de façon prétentieuse et méchante mais il ne pouvait pas plus aller à l’encontre de gens ayant un certain pouvoir dans cette ville. Désabusée, Candy abandonna le combat mais vida d’abord son sac au professeur Léonard.

_ J’ai compris, monsieur le directeur que ce n’est pas vous qui dirigez cet hôpital mais les puissants, les plus aisés, les donneurs de leçons. Très bien, je ne veux pas que vous ayez des problèmes d’autorité de ma faute, vous avez déjà assez pris sur vous et été compréhensif. Je vais chercher du travail ailleurs et si on ne veut plus de moi comme infirmière dans cette ville à cause de cette famille qu’on m’a imposée et qui ne m’a jamais traitée autrement qu’en domestique et en étrangère, je redeviendrai à nouveau domestique alors mais pour des gens plus respectueux des autres. Il n’y a pas de sot métier monsieur le directeur, il n’y a que de sottes gens vous savez !

Le directeur semblait bien désolé et hésitant mais elle sortit fièrement et se trouva nez à nez face à Flanny.

_ Bravo Candy! Lui dit-elle en la regardant avec admiration. Excusez-moi d’avoir écouté aux portes mais permettez-moi de ne pas vous laisser seule dans ce combat et d’être votre amie.

Puis en entrant dans le bureau et s’adressant au directeur:

_ Oui monsieur, moi aussi je vous donne ma démission si vous renvoyez Candy parce qu’elle fait son métier avec cœur et honnêteté. Je ne veux pas travailler là où des familles qui se prennent pour le nombril du monde décident sans raisons valable, qui on doit soigner ! Choisissez, si Candy n’est pas tout de suite réintégrée, je pars aussi !

_ Oh! Flanny!

Candy était émue et fière, le directeur était rouge et s’écria:

_ Ah! C’est ainsi! On me prend pour un lèche bottes! Très bien! Candy, vous reprenez votre poste dès demain matin et Flanny tout de suite! Et les Legrand! Qu’ils aillent au diable!

_ Bravo monsieur! Clama vivement Flanny avant de filer sous le regard clair du directeur et des larmes de Candy qui put tout de même lui dire vite:


_ Merci Flanny, je savais que tu étais mon amie.

Et depuis ce jour, Flanny est devenue l’amie de Candy. Peu à peu, elle perdit sa froideur et s’épancha sur son épaule. Ses parents étaient alcooliques et l’avaient rejetée parce qu’elle avait voulu sortir de cette extrême pauvreté où elle était née, par des études et un travail honnête. Elle avait connu l’enfermement, la faim, le froid et avait travaillé avec acharnement et rigueur pour pouvoir être ici. Candy la présenta ensuite à Albert et ils devinrent facilement amis aussi. Elle vint donc régulièrement le voir et aider Candy à lui faire travailler sa mémoire et partager avec eux joie et plaisir. Quand elle lut la dernière lettre envoyée par Terry, elle reconnut avoir été injuste et glaciale avec lui, alors qu’il était bien gentil. Candy la consola, Terry avait aussi son caractère et s’emportait vite mais en ne se contentant pas de l’apparence et des idées toutes faites sur les autres, on arrivait à trouver des amis sincères et authentiques.

***



Mais à New York, Terry n’avait pas autant d’amis. Susanna lisait chaque nouvelle lettre de Candy sans qu’il le sache. Elle était de plus en plus en colère de lire que rien n’avait fait faiblir leurs sentiments, au contraire, chacune étant encore plus enflammée que la précédente. Et cette dernière où Candy écrivait : «comme elle avait hâte de venir applaudir Terry à New York fin novembre et lui donner mille baisers de sa vraie Juliette», lui donna la nausée et précipita encore son degré d’audace. Un jour, elle vint chez lui vers onze heures du matin pour être sûre qu’il dorme encore. Vu qu’il ne fermait pas à clef, elle entra facilement mais sans bruits, le regarda dormir et fut ravie de voir qu’il était encore torse nu. Alors elle se déshabilla entièrement, se glissa sous les draps et contre lui, puis le caressa sur la poitrine et sous la ceinture à travers son pyjama. Il sembla d’abord insensible puis bougea en ronchonnant alors elle rajouta des baisers sur sa bouche en gémissant de désir mais il se dressa avec fureur et d’un regard effrayant de dégoût.

_ Susanna! Qu’est-ce qui te prend? Tu es complètement cinglée ma parole!

Elle avait pensé dans sa tête calmer ses protestations par des contacts le rendant désireux comme tout homme normal et au moins, en cas de forte opposition, se servir de la nature pour le culpabiliser mais elle n’avait pas eu le temps de savoir vu comme il l’avait repoussée et la regardait avec horreur. Alors elle l’accusa.

_ Oui je suis cinglée Terry, tu me rends folle, je suis folle de toi, je t’aime et tu me fais souffrir en ne pensant qu’à cette Candy de malheur!

_ Sors d’ici tout de suite! Hurla-t-il en voyant qu’elle était nue et repoussait le drap pour lui montrer ses formes.

_ Terry je t’en prie, tu ne peux pas dire ça, regarde-moi, je suis plutôt jolie non? Plus formée que ta.... fiancée pour l’instant et je peux te donner ce qu’elle ne peut pas encore, juste pour le plaisir, elle n’en saura rien, je te le jure.

_ Ca ne va pas non? Et même si elle ne le savait jamais, moi je n’ai pas envie de ça avec toi, je ne t’aime pas et ne t’aimerai jamais !

_ Mais regarde-moi enfin Terry! N’ai-je pas un corps fait pour donner du plaisir? Laisse-toi juste faire. Je vais t’apprendre l’amour avec une vraie femme et même si tu ne m’aimes jamais d’amour, c’est égal, moi je te veux pour deux mon Roméo, tu es fait pour moi, nous allons être Roméo et Juliette et tu verras qu’on sera encore meilleurs si on s’aime aussi en vrai !

_ Tu es décidément cinglée Susanna, je ne serai jamais ton Roméo, on sera juste un couple au théâtre et pour moi, que ce soit toi ou n’importe quelle autre actrice pour jouer Juliette, c’est égal car je ne vois et entend que Candy quand je joue. Et puis, tu n’as rien à m’apprendre, je sais ce que je veux savoir de l’amour et surtout que cet acte vaut vraiment le coup avec quelqu’un qu’on adore ! Il ne suffit pas d’être jolie pour me donner du désir, surtout si l’intérieur est aussi fade que le tien. Maintenant fiche le camp Susanna, où je vais être vraiment très peu gentleman.

Elle faillit jouer les pleureuses pour lui faire pitié mais son regard était si noir et glacial qu’elle piqua une crise.

_ Alors tu ne veux donc que cette maudite infirmière, cette fille d’écurie voleuse et menteuse qui se moque bien de toi en vivant avec un clochard amnésique et qui peut-être, fait avec lui ce que tu refuses bêtement avec moi!

Puis elle prit peur en voyant que son regard pouvait être encore plus inquiétant.

_ Quoi? Qui t’a dit ça Susanna? Qui?

Elle réfléchit très vite pour se sortir de là ou il pourrait la tuer tant il semblait le vouloir.

_ Heu... C’est Elisa. C’est sa cousine, elle a tenu à m’écrire tout de Candy pour... te protéger d’elle car elle dit qu’elle est dangereuse.

_ Espèce de punaise! S’exclama-t-il en se levant de dégoût. Et toi tu es aussi mesquine que ce cafard, tu n’es pas que folle, tu es une vipère pour correspondre et croire en Elisa Legrand !

_ Mais je pensais juste à ton bien Terry, je ne pouvais pas savoir qu’Elisa est comme tu dis? Elle m’a dit que Candy savait jouer les ingénues mais qu’elle manigançait pour ses intérêts et avait même été jusqu’à pousser son cousin Anthony à prendre trop de risques à cheval jusqu’à ce qu’il se tue, pour être la seule héritière des André.

_ N’importe quoi! Si tu n’as pas vu que c’était Elisa la vipère qui manigance toujours par jalousie envers Candy qui est un ange de pureté, alors c’est qu’en plus tu es complètement idiote ! J’ai déjà assez subi le prix des complots d’ Elisa en Angleterre pour en être sûr et je te conseille de cesser toute correspondance avec elle où je vais devenir vraiment méchant !

_ Mais Terry, c’est injuste ! Tu me traites comme une ennemie alors que je t’ai permis d’entrer dans la troupe Stratford, tu as oublié? Tu ne peux pas me détester avec ce que tu me dois !

_ Et maintenant tu veux que je te doive quelque chose ? Alors, c’est certain, tu n’es pas une victime d’Elisa, tu es son égale. Susanna, je ne le redirai plus, rhabille-toi très vite et file où je te jette dehors ainsi.

Cette fois elle n’osa plus le contrarier, elle pleura et enfila sa robe rapidement. Mais avant de sortir, elle tenta encore de l’amadouer.

_ Pardonne-moi Terry! Elle mit ses mains sur son visage en pleurant vraiment mais trop théâtralement. Je t’en prie, ne me déteste pas, je te jure que je ne croirai plus jamais Elisa, je m’excuse mais je t’aimais vraiment et j’ai en effet perdu la tête depuis qu’on joue, j’ai tout confondu.

_ Je te pardonne cette confusion Susanna mais pas tes complots avec mes ennemis. Jamais plus je ne te ferai confiance, jamais plus tu n’entreras ici et nous ne nous verrons plus qu’au théâtre pour le travail et rien d’autre. C’est clair?

_ Oui Terry.

Elle sentit alors de vraies larmes avec une vraie douleur venir en elle en tuant ses derniers espoirs et elle ne put supporter plus et s’enfuit en courant.

Terry soupira en réalisant à quoi il avait échappé et s’inquiéta fort pour Candy à la merci de sa cousine toujours si sournoise et haineuse. Alors il décida d’écrire immédiatement à sa fiancée pour qu’elle soit sur ses gardes mais sans raconter ce qu’il venait de vivre avec Susanna. Il lui dirait quand elle viendrait, maintenant il valait mieux qu’elle l’ignore car en aurait de la peine et de l’inquiétude en plus pour lui. Mais il lui dit quand même qu’Elisa écrivait à Susanna des tas de mensonges et qu’elle se méfie plus d’elle et n’hésite pas à demander l’aide d’Albert, Archibald et Alistair si besoin, enfin tous ses amis sincères qui l’aimaient car il ne pardonnerait pas qu’on lui fasse encore du mal et accourrait au moindre doute.

***



Candy reçut cette lettre trois jours plus tard. Elle pâlit en comprenant que Susanna n’avait donc pas renoncé à son béguin pour Terry vu qu’elle correspondait avec Elisa pour savoir plus. Mais quoi que Susanna ait tenté, il était certain qu’elle avait échoué et elle la plaignit encore plus d’avoir mis Terry en colère et donc perdu son amitié.

« Mon pauvre amour! Hélas, elle ne sera certainement pas la dernière à tomber amoureuse de toi, il y en aura plein d’autres après la pièce même si elles ne peuvent t’aimer que pour l’apparence sans te connaître vraiment. Moi je t’ai aimé dès le premier regard aussi mais si je n’avais pas réussi à percer ce qu’il y avait dans ton cœur, je t’aurai vite oublié. Tu m’as choisie entre toutes mon Terry et tu n’es pas non plus le genre à ne voir que l’extérieur, c’est prouvé avec Susanna. Mon dieu, je vais devoir faire des efforts tout de même, il faudra que je sois à la hauteur en étant ton épouse mon élu, toi si beau et futur étoile de Broadway! Jusqu’à présent je ne me souciais guère d’élégance et beauté mais maintenant je ferai aussi plus attention car bien que je sais que tu m’aimes pour moi même, ça compte aussi d’être jolie et lire de l’admiration dans tes beaux yeux bleus. Quand à Elisa, rassure-toi mon amour, maintenant je sais que me nuire c’est te nuire, alors je ne me laisserai plus faire, je sortirais mes griffes à la moindre attaque!»

*****



A suivre

Edited by Diogène - 8/12/2016, 15:58
 
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*****


Chapitre 3



Si tu n’avais pas existé




Mais avant de se soucier d’Elisa, il y eut pour Candy une grande tristesse. C’est Flanny qui en fut la cause, en choisissant à nouveau de partir comme infirmière militaire sur le front français. Elle n’avait pas changé d’idée et une fois l’infirmière au poignet cassé, guérie et qu’elle reprit son poste, Flanny proposa à nouveau sa candidature pour partir comme infirmière militaire sur le front français. Candy essaya bien de l’en dissuader mais elle comprenait tant son choix, elle aurait fait de même si il n’y avait pas eu Terry et Albert ayant besoin d’elle. Flanny lui dit ensuite qu’elle le devait car elle était la seule à ne plus avoir de famille qui l’attendait et que ses amis le comprendraient et ne lui en voudraient pas car elle y allait heureuse et bien décidée à en revenir une fois son devoir réalisé. Candy accepta donc son choix et la garda à la maison ces quelques jours avant son départ pour enrichir encore leur amitié. Elle lui parla de Michael, le médecin parti il y a quelques mois et Flanny promit de tenter de le voir et lui transmettre les amitiés de son amie. Elles se dirent l’essentiel et se quittèrent sans larmes car confiantes l’une en l’autre et éternellement amies.

***



Terry allait envoyer sa lettre contenant l’invitation pour Roméo et Juliette et le billet de train à Candy quand il assista à quelque chose qui l’arrêta dans son geste de glisser l’enveloppe dans la boite postale. Un petit garçon venait de s’échapper des bras de sa mère ou de sa nounou devant lui et il se précipita sur la route pour la traverser et aller, semble-t-il vers un marchand de ballons. Seulement, Terry vit aussi une voiture foncer à vive allure vers l’enfant et il n’hésita pas, il traversa aussi, prit l’enfant dans ses bras et se jeta de côté avec lui si rapidement que la voiture passa un quart de seconde après sans même freiner et le métal de la portière frôla le bras de Terry. La femme avait crié mais tout avait été si vite qu’elle avait encore le bras en l’air et la bouche ouverte quand Terry lui ramena l’enfant. Elle explosa de larmes et de remerciements envers le jeune homme qu’elle regarda en héros et serra fort sa main par reconnaissance. Terry lui dit que c’était normal et qu’elle avait un beau petit garçon mais ne voulait pas de récompense. Elle lui proposa quand même d’au moins venir boire quelque chose chez elle pour se réchauffer car elle habitait à deux pas. Terry accepta surtout car elle semblait encore bien flageolante après sa frayeur et pour s’assurer qu’elle rentre intacte chez elle.

La dame habitait un immeuble cossu mais pas trop, classe moyenne avec tout le confort et calme mais sans luxe inutile et ostentatoire. Un immeuble de huit étages avec ascenseur, gardien, parking et même un jardin agréable derrière. Central Park n’était qu’à cinq minutes, Broadway vingt minutes à pieds. Madame Barrett, Kate de son prénom, dit à Terry que son époux d’origine britannique comme elle, travaillait au consulat anglais de New York en tant que premier adjoint du consul et devait souvent faire des déplacements entre Philadelphie et Washington pour son travail. Ils vivaient ici depuis deux ans avec Jonathan, leur fils de quatre ans et auparavant ils vivaient à Londres. Kate Barrett demanda au bout de peu de temps à Terry s’il n’en venait pas aussi car elle crut reconnaître quelques onces d’accent anglais dans ses brèves paroles. Terry sourit et lui dit alors son origine puis à l’aise avec elle vu sa gentillesse, précisa son métier et sa future pièce. Kate lâcha alors un sourire d’évidence car elle pensait bien avoir vu quelque part son visage. Elle regretta de ne pas avoir pu voir le roi Lear mais juste l’affiche et se promit de voir Roméo et Juliette, avec si possible son époux. Terry pensa lui proposer de l’inviter mais il se souvint de son budget limité et se contenta de lui dire de ne pas oublier de venir le voir dans sa loge après la représentation et lui dire son impression. Kate sourit et promit d’être sincère mais lui avoua que déjà elle le trouvait parfait pour le rôle, pour sa belle et élégante allure mais aussi pour une impression qu’il tenait aussi le rôle côté cœur. Terry rosit un peu mais sentit que Kate ne cherchait pas à le flatter ou l’idolâtrer pour avoir sauvé son fils mais avait un fond intuitif et généreux, comme Candy et il sentit en lui aussi une envie d’avoir une amie comme elle et de lui parler de son cœur. Alors il se lança et oublia vite sa réserve car Kate l’écouta avec cœur et raison. Et quand il aborda innocemment son désir de trouver un appartement digne de sa fiancée, elle s’écria que ça tombait bien car il y en avait un à louer juste au dessus. Terry l’écouta le décrire et songea qu’il devait être idéal mais certainement trop cher pour lui. Quand Kate lui proposa d’aller le visiter, Terry fut gêné et avoua qu’il ne pouvait encore s’imaginer vivre un tel standing. Kate sourit et lui dit qu’elle ignorait encore quel loyer en voulait le propriétaire mais que ça ne coûtait rien d’aller tout de même le voir vu qu’elle avait un double des clefs. Terry accepta alors et une fois vu ce qu’il trouva encore plus idéal, il regretta vraiment de devoir l’oublier. Il y avait trois belles chambres, un grand salon, une cuisine toute équipée, une salle de bain avec baignoire, des toilettes modernes, une petite pièce pouvant faire bureau et une terrasse donnant sur le jardin et sur Central Park, plein sud. Terry ne put cacher un soupir et Kate sourit en lui disant qu’elle allait demander ce soir au propriétaire quel loyer il voulait et qu’elle le lui dirait demain, s’il acceptait de revenir dîner et rencontrer son époux. Terry accepta l’invitation mais refusa ensuite sa demande de lui offrir quelque chose pour lui prouver sa gratitude d’avoir été si courageux et habile pour sauver Jonathan. Kate lui prit la main et lui dit dans les yeux qu’elle ne cherchait pas à payer une dette mais éprouvait une vraie sympathie pour lui et aimerait vraiment lui faire un vrai plaisir du cœur. Terry ne put lui résister et se dit que ce serait mieux si Candy venait avec Albert mais il n’avait eu qu’une invitation gratuite pour la pièce. Alors il demanda à Kate le prix d’une autre place de théâtre et d’un aller retour en train depuis Chicago afin que sa fiancée puisse aussi emmener son meilleur ami amnésique car elle culpabiliserait à le laisser seul. Kate sourit encore de tant de prévenance pour le plaisir de sa dulcinée et espérait qu’elle aussi soit autant généreuse et idéale pour ce beau jeune homme. Elle glissa alors un gros billet dans sa poche pour ne pas le gêner et lui dit dans l’oreille d’offrir un beau bouquet à Candy si il y en avait trop puis le reconduit à la porte en lui répétant de ne pas oublier de revenir demain soir.

Terry ressortit heureux d’avoir enfin une amie à New York et remit le lendemain dans l’enveloppe les autres billets de train et de théâtre plus un post-scriptum à sa lettre avant de la poster. Mais sitôt la lettre partie, il se souvint qu’il n’avait qu’un petit studio et qu’il n’avait pas encore trouvé d’hôtel pas trop cher mais suffisamment confortable pour Candy et qu’il faudrait aussi maintenant une chambre en plus pour Albert. Une fois rentré il compta ses économies et renonça à acheter cette voiture qu’il avait repérée, tant pis, ça attendrait, il marcherait encore et ses invités circuleraient en taxi ou fiacre.

Le lendemain soir, il déposa un gros bouquet de roses blanches dans les mains de son hôtesse qui lui sourit avec tendresse en le traitant d’incorrigible cœur noble. Jonathan arriva en courant et se pendit à son cou en criant:

_ C’est Roméo qui m’a sauvé de la méchante voiture!

Un homme d’environ trente-cinq ans le suivit en arborant un visage plein de bonté et de reconnaissance et le remercia en l’étreignant et le priant de vouloir accepter son respect éternel pour avoir sauvé son fils. Terry fut alors aussi vite à l’aise avec lui qu’avec sa femme car ils respiraient autant la sincérité, la simplicité et le bon goût. Le repas était aussi excellent, Kate cuisinant seule et très bien, il n’y avait pas de bonne pour servir et pas par pauvreté apparemment. Quand Kate aborda la question de l’appartement du dessus, Terry faillit lâcher sa cuillère du délicieux flan au chocolat. Il pensa avoir mal entendu car le loyer réclamé du propriétaire était à peine plus élevé que celui qu’il versait à sa logeuse pour le studio. Kate répéta une deuxième fois ce chiffre et certifia que ce n’était pas une erreur. Terry resta alors bouche bée et regarda James Barrett qui souriait puis hocha la tête pour confirmer. Terry osa alors dire que le propriétaire ne devait pas avoir toute sa tête car son appartement valait au moins le double en loyer que ce qu’il en demandait. Puis il vit les Barrett rire et James lui avoua que le propriétaire c’était lui et qu’il avait toute sa tête. Il préférait seulement que son locataire soit quelqu’un de sûr et quoi de mieux qu’ un ami qui pourrait prendre soin de sa famille lors de ses absences et le rassurer plutôt qu’un peu d’argent en plus dans les poches ? Terry fut flatté mais n’arriva pas à accepter tout de suite pareille offre. Kate rajouta alors qu’elle aimerait vraiment qu’il accepte par amitié pour elle et lui permette plus tard de pouvoir aussi avoir une amie comme Candy dans l’immeuble et se sentir moins seule. Terry admit qu’il aimerait accepter mais à condition que James accepte aussi de réviser à la hausse le loyer en fonction des revenus du locataire, donc l’augmenter quand il gagnerait mieux sa vie. James rit et topa le contrat par une accolade, Kate applaudit puis lui posa un baiser sur la joue et Jonathan sauta dans tous les sens en chantant sa joie d’avoir son nouvel ami près de lui.


Terry songea ensuite qu’il n’avait plus besoin de chercher un hôtel car l’appartement avait trois chambres, donc une pour chacun de ses invités et même une pour lui. De plus, il était partiellement meublé, la plus grande chambre qu’il réservait à sa dulcinée l’était entièrement avec un grand lit, une armoire, une coiffeuse et une commode. Et pour ce qu’il manquait, Kate trouva tout de suite un canapé lit pour la deuxième, un lit de camp pour la troisième et d’autres choses dont de la vaisselle supposée en trop chez elle. Et chaque jour elle apporta un nouvel ustensile ou objet si bien que quand Terry y emménagea, à la fin de la semaine suivante, rien ne semblait manquer pour accueillir ses invités. Enfin, il put acheter la voiture idéale vu qu’il était «riche» et put même y rajouter un nouveau costume pour être élégant dans les grandes occasions comme le soir de la première après la pièce et voir l’admiration dans les émeraudes de sa princesse. En attendant ce jour merveilleux, il écrivit une longue lettre pour raconter toutes ces nouveautés à sa belle et lui donner sa nouvelle adresse.

***



Candy venait de recevoir les invitations et billets de train et les montra tout de suite à Albert qui fut étonné que Terry l’invite aussi. Il ne put donc refuser car Candy le prévint que si Terry l’avait voulu c’était qu’il le fallait où il serait vexé et Terry vexé c’était terrible! Albert accepta donc ce voyage en se promettant de s’éclipser le plus souvent possible là bas pour laisser les amoureux profiter un peu d’eux même car ils en avaient bien besoin. Candy avait obtenu deux semaines de congés fin novembre et début décembre car elle était volontaire pour assurer les nuits de Noël et nouvel an en échange. Albert obtint cinq jours de congés pour pouvoir voir la pièce mais reviendrai à Chicago plus tôt que Candy.

Mais avant ce voyage, Candy en accepta un autre pour son directeur qui l’envoya à Miami chez un confrère et ami qui avait besoin d’une infirmière quelques jours pour soigner sa nièce. Vu qu’en plus, ce docteur Kliss avait influé pour éviter au directeur d’être limogé suite à son refus de renvoyer Candy sur ordre des Legrand, celle-ci accepta cette mission avec reconnaissance.

Mais elle ne fut donc pas là le lendemain quand la lettre de Terry arriva et Albert en fut bien embêté. Il ne l’ouvrit bien sûr pas mais se demanda si elle pouvait attendre le retour de Candy et devant son doute, décida d’envoyer un télégramme express à Terry par prudence pour lui dire que Candy était absente, qu’elle aurait la lettre en fin de semaine et qu’il ne devait pas s’inquiéter.

***



Ce soir au théâtre, Terry trouvait que Susanna était vraiment mauvaise, encore plus que la veille. Depuis qu’il l’avait chassée de chez lui, elle jouait mal et si au début il mit ça sur sa honte, il pensa plutôt que c’était sa haine désormais envers lui qui faisait son incapacité à rendre crédible son jeu d’amoureuse passionnée. Car il constata bien vite qu’elle le haïssait de l’avoir méprisée et humiliée. D’abord, elle eut encore l’audace un soir où il répétait et se croyait seul sur la scène afin de trouver le meilleur angle et mouvement du corps pour que Candy sache que c’était pour elle seulement cette tirade d’amour, de venir l’interrompre en sifflant avec rage qu’il n’oublie pas que Roméo et Juliette étaient des amants maudits et qu’il vivrait donc la même fin qu’eux avec sa Candy puisqu’ils se prenaient pour eux. Il haussa les épaules et lui répondit qu’elle, en tout cas, ne risquait pas de connaître la passion vu son âme mesquine et superficielle comme Elisa la laide aigrie, car déjà sa soit disant beauté craquait sous un rictus mauvais. Susanna le foudroya encore du regard et répliqua qu’au moins, elle, savait ce qu’était le plaisir et qu’il aurait un jour des regrets quand il aura vu son infirmière s’empâter sous les grossesses et la routine vu son peu de talent évident pour la volupté. Il préféra ignorer cette répartie stupide où il finirait par la gifler tant elle était venimeuse. Il la regarda juste avec pitié en reprenant son jeu et revoyant dans sa tête sa belle Juliette en robe blanche diaphane et ses cheveux volant au vent, comme à leur première rencontre sur le RMS Mauretania. Puis il sentit l’arôme de ses baisers les plus fougueux, frissonna puis rit en se disant:

« Candy pas douée pour la volupté! Mais elle est née pour l’amour ma Juliette! Elle est la déesse de l’amour et je ne suis pas prêt de me lasser d’elle ! Le seul regret aurait été de la rater et heureusement, elle m’a choisi pour la vie car je suis né pour elle et elle pour moi. »

Et il reprit son rôle de Roméo et déclama bien fort sur la scène en ignorant Susanna :

« Beauté trop précieuse pour la possession, trop exquise pour la terre! Telle la colombe de neige dans une troupe de corneilles, telle apparaît cette jeune dame au milieu de ses compagnes... Mon cœur a-t-il aimé jusqu’ici? Non; Jurez-le mes yeux! Car jusqu’à ce soir je n’avais pas vu la vraie beauté.»

Susanna repartit encore plus haineuse en le maudissant de tous les drames possibles mais Terry était hermétique, uni à sa Juliette et heureux.

Et il réussit, lui, à encore améliorer son jeu, sa gestuelle et sublimer son personnage alors que Susanna, emprisonnée dans sa haine toujours plus grande, ne faisait que régresser. Robert Hattaway eut de la patience avec elle mais la prévint devant Terry et d’autres acteurs que si elle ne s’améliorait pas demain soir, il lui enlèverait le rôle et le donnerait à Karen car elle avait été aussi bonne qu’elle à l’audition et n’avait comme seul handicap de ne pas être blonde, ce que Robert avait pensé mieux mais qu’au fond, une Juliette rousse était possible. Suzanna pâlit, elle qui se croyait la meilleure actrice de toute la troupe. Elle regarda Terry mais il semblait se ficher encore totalement d’elle. Puis elle eut peur en pensant à sa mère qui serait furieuse si elle perdait son rôle vedette, elle qui visait si haut pour sa fille. Alors elle ravala sa rage et honte et promit à Robert que demain elle aurait retrouvé tous ses moyens. Terry eut droit de son directeur à des félicitations pour sa prestation mais en plus il rajouta très fort qu’il avait vraiment travaillé comme un professionnel depuis son arrivée et réussi à être déjà un grand acteur consciencieux et sans l’aide de personne. Certains baissèrent alors la tête vu leurs accusations qu’Eléonore Baker soit responsable du choix de Robert et Susanna cacha son dépit qu’il soit autant doué, quels que soient ses partenaires. Mais Terry avait besoin d’une certitude et demanda ensuite à Robert de lui parler en privé.

_ Terry, lui dit-il droit dans les yeux dans son bureau, jamais Eléonore Baker n’a interféré pour que tu ais ton rôle, bien au contraire.

_ Comment ça? Fit le jeune homme maintenant pris d’un autre doute.

_ Non, elle ne m’a pas non plus dit de ne pas te choisir, rassure-toi.

Puis en le voyant toujours indécis:

_ Bon, je vais te dire mot pour mot ce qu’elle m’a dit car je crains que sinon tu n’imagines toujours des erreurs. Et pourtant, elle m’en voudrait car ce qu’elle m’a dit, elle voulait que tu l’ignores et je la trahis par idée que ce sera mieux pour vous deux. Mais veux-tu vraiment l’entendre Terry, la vérité de ta mère?

Bien que tout le monde dans ce théâtre sache ce secret devenu de polichinelle, Terry se sentit ému d’entendre Robert dire « ta mère » mais aussi de se sentir enfin quelqu’un pour elle.

_ Oui Robert, je veux savoir le vrai quel qu’il soit car rien n’est pire que l’ignorance.

_ Et bien, elle m’a dit avant ton audition, ceci:

« Soyez très exigent avec Terry, soyez sans pitié avec lui car bien que je sais déjà qu’il a le don, je ne veux pas qu’il fasse ce métier autrement que si chez lui, c’est plus qu’une vocation et une passion mais toute sa vie, comme pour moi. Car hélas, j’ai sacrifié mon fils et ma vie personnelle, mais ça je le referai encore mais pas de perdre Terry. Pourtant je ne m’imagine toujours pas vivre sans être actrice même si ce métier m’a pris mon plus cher trésor, je ne peux pas le détester pour autant car qui aurai-je été sans mon âme, même près de lui, sinon une mauvaise mère tout de même? Mais maintenant, il n’a plus besoin de moi et s’il a choisi ce métier qui lui a pris sa mère c’est qu’il fallait donc faire ce que j’ai fait, sauf ce qui n’est pas que de ma faute. J’aime Terry quoi qu’il fera Robert mais je lui ai assez fait de mal, je n’interférerai plus dans sa vie sans qu’il le veuille. Je veux juste le voir pour savoir s’il a l’âme et le cœur assez fort pour réussir ce que j’ai raté. Il est libre mais son bonheur m’importe plus que ce métier désormais, même dans l’ombre je serai là vu que je n’ai plus droit à plus. Voilà mon secret Robert, je préfère qu’il croit encore que je suis égoïste si ça le rend plus fort et en paix. Je compte donc sur vous pour le garder pour vous et traiter Terry avec justesse mais rigueur.»

_Voilà Terry, maintenant tu sais qui est ta mère aujourd’hui, bonne chance.

_ Merci Robert, je vais essayer de la saisir.



En sortant du théâtre, Terry téléphona depuis un bar et la gouvernante lui ayant dit que madame Baker était chez elle et ne sortirait pas ce soir, il partit dans sa voiture après avoir dit:

_ Dites-lui juste que son fils a envie de la voir.

Sur le trajet, il songea que Candy avait vraiment toujours raison côté cœur, c’était bon d’avoir le courage de savoir et montrer ses sentiments car les fuir ne faisait que souffrir. Il arriva tout de même avec le trac au ventre et espéra arriver à dire enfin le vrai. Mais dès qu’il vit son visage derrière la porte, venue elle-même lui ouvrir et l’air inquiet mais plein d’espoir, il sentit les derniers verrous de son cœur se briser.

_ Bonsoir maman, j’aimerai qu’on continue ce qu’on a commencé en Ecosse, si tu en as envie !

_ Oh Terry! Mon fils! Mon cher enfant! Oui, j’ai envie de revivre ce bonheur avec toi, tu m’as tant manqué!

_ Toi aussi ! dit-il d’un sourire tendre qui la fit oser se jeter dans ses bras.

Il la serra fort, heureux de se souvenir du parfum de ses cheveux. Puis il lui dit sans la lâcher:

_ Oui, c’est stupide de se voir si peu en vivant si près mais j’avais besoin de temps, de me prouver des choses et surtout... réaliser mes projets les plus chers dont un plus cher que le théâtre, avoir une famille de cœur avec celle que j’aime et qui m’aime sans conditions.

_ Ton amie d’Ecosse? Candy? Dit-elle, davantage en l’affirmant que le questionnant après l’avoir lâché pour le voir et sourire de ses yeux plein d’étoiles.

_ Oui mère. Candy est ma meilleure chance dans la vie, sans elle je ne serai pas là.

_ Je sais mon fils, je suis bien d’accord, tu as choisi la meilleure des routes, Candy est un ange. Elle vit aussi ici?

_ Non pas encore. Maman, j’aimerai te dire tout en détails mais... pourrais-tu avant me permettre d’entrer plutôt que le dire sur le palier?

_ Oh! Quelle idiote je fais! Pardonne-moi mon chéri, je suis si heureuse. Entre, mon Terry.

Puis elle cria:

Martha! Mettez deux couverts! Finalement je meurs de faim ce soir et mon fils aussi!

***



Candy s’aperçut très vite que la nièce du docteur Kliss n’était ni une petite fille ni malade. Karen Kliss avait dix-huit ans, était actrice et sa dépression était en fait un désespoir et une profonde colère de n’avoir pas obtenu le rôle de Juliette à New York. Candy trouva le monde vraiment petit en l’écoutant mais ne lui dit pas tout de suite qu’elle connaissait Terry et Susanna Marlowe, que Karen détestait de tout son cœur. Elle pensait être victime d’un complot de cette actrice car se trouvait bien meilleure qu’elle. Tant qu’elle accusa et critiqua Susanna, Candy se tut mais lorsqu’elle dit que Terrence Grandchester devait aussi y être pour quelque chose vu qu’il était le petit ami de Susanna, voir son amant, elle s’indigna.

_ Non Karen, je vous interdis d’accuser Terry de vos misères, c’est faux, il n’est pas le petit ami de Susanna et encore moins... j’en suis absolument certaine!

_ Terry! S’exclama Karen avec surprise. Vous appelez Terry, Terrence Grandchester! Alors vous le connaissez?

_ Oui et très bien Karen. Il n’y est pour rien, croyez-moi.

_ Très bien? Il est donc... votre petit ami à vous?

_ Heu, oui. En fait il est mon fiancé Karen et c’est quelqu’un d’irréprochable.

_ Ca alors! Enfin la chance est de mon côté alors! Car vous au moins devez bien penser que cette Marlowe est une imposture! Car ce que j’ai avancé, ce n’est pas moi qui l’ai imaginé, c’est ce qu’elle m’a dit il y a un mois, qu’elle était la petite amie de Terrence, quel culot a cette fille!

_ En effet Karen! Fit Candy en soupirant car cette fois elle n’avait plus envie d’avoir pitié de Susanna, devinant qu’elle avait du causer plus d’ennuis à Terry qu’elle ne l’avait supposé.

_ Vous voyez que j’ai raison Candy, on a conspiré contre moi et puisque Terrence n’y est pour rien, c’est forcément Susanna qui a manœuvré, avec tous ses mensonges pour me voler mon rôle.

_ Je ne sais pas Karen mais... c’est possible en effet. Mais je ne peux l’accuser sans preuves quoi qu’elle mente, ni vous. Je ne suis pas non plus compétente pour dire si vous êtes meilleure actrice qu’elle mais Terry le sait peut-être. Et si je lui demandais par télégramme pour être sûre?

_ Il n’a pas assisté aux auditions de Juliette, ni pour moi ni Susanna d’ailleurs car Robert n’accepte jamais de public aux auditions. Sauf pour Terrence, enfin pour Eléonore Baker qui a voulu, il paraît, voir ce prodige. J’imagine que vous savez qui elle est Candy?

_ Oui, Karen. Terry m’a écrit que le secret est dévoilé au théâtre, elle est sa mère et je suis contente qu’elle y soit allée car quoi qu’il n’en soit pas encore entièrement conscient, ça a du l’aider à se surpasser encore.

_ Oh pour moi il n’y a jamais eu de doute, Terrence est le meilleur de la troupe et il a eu son rôle sans influences car Robert a du nez, sauf pour Susanna. Je sais qu’il choisit toujours le meilleur à chaque rôle mais cette fois, il a du se faire aveugler par cette blondasse plus vicieuse qu’une vipère. Savez-vous qu’elle s’est aussi vantée ce jour là, en disant que bien que ce soit vrai que Terrence avait eu le rôle par talent, que c’était quand même grâce à elle s’il était rentré dans la troupe. Sornettes! Elle a juste ouvert la porte à Terrence, Robert accorde toujours cinq minutes à qui veut une audition pour savoir s’il a du talent, pas besoin de Susanna! Ah! Je suis tout de même bien contente qu’elle se soit pris un râteau avec Terrence car je me disais bien qu’il ne semblait pas très amoureux d’elle vu que c’était toujours elle qui courait partout à le chercher. Et franchement Candy, Terrence m’a semblé quelqu’un de bien avant que Susanna ne dise ses mensonges et je suis soulagée qu’il soit aussi lucide et ait du goût car un aussi beau garçon mérite mieux qu’elle. Mais ne pâlissez pas Candy, moi je ne veux pas vous le prendre, juste être sa partenaire sur scène.

_ Je n’ai pas pâli Karen, du moins pas pour ça, j’ai entièrement confiance en lui. J’ai juste été peinée que Susanna soit ainsi, je n’aurai pas cru non plus en la voyant. Mais je vous crois car il y a peu, Terry m’a écrit qu’elle n’était plus son amie, qu’elle l’avait trahi, et c’est moi qui lui avait demandé d’être gentil avec elle bien que j’avais déjà vu qu’elle en était amoureuse.

_ Et bien! Vous êtes une perle Candy et Terrence est donc bien un noble cœur aussi. Et il comprendra que vous ne puissiez pas assister à la première de la pièce mais vous occuper de moi et me guérir.

_ Mais Karen! Je ne peux pas faire ça, j’ai trop envie de le voir, nous ne nous sommes pas vus depuis six mois !

_ Je comprends mais la première d’une pièce, c’est trop symbolique, je serai trop mal ce soir là, j’aurai besoin de vous pour ne pas m’effondrer. Vous le verrez après, nous devons être solidaires face à notre rivale la Marlowe ce soir car si elle triomphe, ce sera un affreux spectacle pour vous aussi.

_ Mais Terry seul compte pour moi Karen, elle je m’en fiche puisqu’elle n’existe pas pour lui !

_ Oui mais moi je souffre et ai besoin de vous. Mon oncle vous a embauchée pour me soigner Candy, vous ne pouvez pas abandonner une patiente qui souffre, j’irai mieux après la première mais jusque là je vous en prie, restez avec moi, Terrence comprendra.

Candy soupira en se disant qu’il faudrait réussir alors à la «guérir» avant la fin de la semaine ou s’enfuir d’ici.

***



A New York, Terry vit Robert se lever et dire stop à la répétition puis Susanna commença à geindre.

_ J’ai eu assez de patience Susanna, c’est pire qu’hier, tu ne peux jouer Juliette désormais.

_ Je t’en prie Robert, laisse-moi une dernière chance, ma mère va s’en rendre malade !

_ Et bien, elle s’en remettra aussi, comme pour elle-même ! Je ne peux pas faire du théâtre avec des gens qui veulent être acteurs mais ne savent pas travailler et oublier leurs propres sentiments, il me faut des acteurs sans états d’âmes, comme Terry.

Elle jeta un regard mauvais sur le jeune homme qui n’avait pourtant pas l’air content qu’elle soit renvoyée mais l’air encore indifférent et eut une idée de vengeance.

_ Mais justement Robert, c’est de sa faute si je suis bloquée, c’est depuis qu’il... Oh mon Dieu, je ne voulais pas le dire pour ruiner la pièce mais vu que c’est moi qui paie, tant pis, je le dis. Il m’a séduite, promis le mariage puis trahie et repoussée pour une... fille d’écurie.

_ Quoi? S’exclama Terry, sidéré qu’elle ose inventer pareille accusation. Moi je t’ai séduite, promis le mariage, quand ça?

_ Parfaitement! Affirma-t-elle effrontément mais sans le regarder en face. Souviens-toi Robert, quand il est arrivé, il m’a fait des sourires pour que je l’aide à entrer dans la troupe, il a été gentil et moi... je voulais aussi être généreuse et sympathique alors j’ai accepté qu’il me fréquente, puis il m’a dit des bobards et m’a... convaincue de coucher avec lui.

_ Espèce de menteuse! Jamais je ne t’ai touchée, c’est toi qui... Oh, tu es encore pire que je croyais, tu n’es qu’une... pitoyable fille, je préférerai me faire moine que de t’approcher tant tu me dégoûtes. Robert, je suis fiancé depuis notre escale à Chicago, souviens-toi, je t’ai présenté Candy et...

_ Ne t’en fais pas mon garçon, je sais que c’est elle qui ment, je vous connais suffisamment tous les deux pour en être certain. Susanna, non seulement je te renvoie de la pièce mais je te renvoie aussi définitivement de ma troupe et ne veux plus jamais te voir traîner ici et près de Terry afin de lui nuire, c’est clair?

_ Mais vous n’avez pas le droit, je n’ai rien fait que dire ce que j’ai subi, c’est injuste!

_ Et tu oses encore insister! Alors très bien, je vais donc te dire ici pourquoi je ne crois pas tes mensonges vu ton audace Susanna. D’abord, j’ai souvent constaté que c’est toi qui court toujours après Terry et l’importune même quand il s’isole, comme sur le toit pour jouer de l’harmonica par exemple. Pas une fois depuis qu’il est ici je ne l’ai vu te chercher mais des dizaines de fois l’inverse et d’autres pourraient le dire aussi. Ensuite, j’ai vu en effet à Chicago que Terry pouvait être plus souriant et gai, pour ne pas dire romantique et je ne l’ai jamais vu ainsi ici avec toi mais juste avec sa fiancée, qu’il a d’ailleurs embrassée devant toi et sans paraître gêné alors que toi on t’a vu leur lancer des regards noirs et marmonner des injures. D’ailleurs cette manie de marmonnement te coûte cher Susanna car ma femme aussi t’a vue et entendue insulter Terry et sa fiancée et leur souhaiter le pire. Et même le concierge t’a surprise à médire sur Terry, il y a juste trois jours et tes propos ne peuvent laisser un doute vu qu’il a entendu:

« Il me le paiera, je ruinerai sa vie, puisque il n’a pas voulu de moi, il n’aura personne, je la tuerai et il sera malheureux toute sa vie ! »

Monsieur Petrovic, notre concierge, m’a rapporté ces mots parce qu’il s’inquiétait que tu penses pareils projets. Je lui ai dit que ce n’était que des phrases en l’air d’une amoureuse frustrée et que tu ne ferais jamais ça mais tu es vraiment capable déjà de beaucoup de vilenie et ta jalousie semble dangereuse. Et pour finir, même si Terry avait eu des relations sexuelles avec toi sans ton réel consentement, oserais-tu dire qu’il t’a connue vierge ou que déjà un autre acteur l’année dernière a obtenu facilement tes faveurs, un certain Shepperd et qui s’est vanté ensuite de t’avoir eue dans une loge du théâtre ?

_ Oh! Il a osé!...

Susanna mit sa main devant sa bouche mais c’était trop tard, elle s’était trahie et Terry soupira de soulagement que Robert soit si perspicace où il aurait pu avoir des ennuis et il imaginait la peine de Candy. Robert regarda encore Susanna avec pitié puis en finit.

_ Maintenant, va-t-en d’ici et ne reviens jamais Susanna ou je t’emmène à la police pour menaces de mort et accusations graves mensongères.

Elle est devenue livide, a baissé la tête mais un bruit bizarre la retint encore. Robert avait tourné le dos et commençait à marcher vers les coulisses en disant à un autre acteur qu’il allait vite télégraphier à Karen de venir en urgence. Terry était encore sur scène à songer à quoi il avait échappé et n’entendit et ne vit rien. Susanna leva les yeux, vit d’où venait le bruit, un des énormes éclairages rompait et allait s’écraser à terre. Un éclair de joie la traversa en voyant qu’il était au dessus de Terry. Elle recula doucement en souriant puis blêmit car une voix cria du fond du théâtre:

_ Un télégramme urgent de Chicago pour monsieur Grandchester!

Terry s’éveilla alors et sauta de scène, si vite que le projecteur passa à deux centimètres de son pied en faisant un boucan énorme en s’écrasant, ce qui fit se tourner tout le monde. Susanna ne vit que son dépit encore et exprima tout haut avec colère:

_ Raté! Oh! Je suis maudite! Il devrait être en dessous! Mort ou en miettes!

Puis elle partit en courant sous les yeux horrifiés de Robert et d’autres. Terry ne vit que le projecteur et ce à quoi il avait encore échappé et remercia sa bonne étoile. Robert regarda Susanna s’enfuir et constata:

_ Elle l’a vu tomber, n’a rien dit et regrette qu’il... Elle est complètement folle, je dois prévenir sa mère, c’est trop cette fois.

Terry soupira mais alla vite chercher son télégramme. Le jeune homme lui tendit et lui dit:

_ Et bien, on dirait que ce pli arrive à temps! On l’ a envoyé à votre ancienne adresse et la concierge, ignorant votre nouvelle adresse m’a envoyé ici. J’espère que c’est aussi une bonne nouvelle.

_ En effet! Fit Terry d’un grand sourire après avoir lu les lignes d’ Albert. C’est aujourd’hui mon jour de chance !

Puis en cherchant son portefeuille dans sa poche et lui tendant un billet d’un dollar :

_Faites-vous aussi plaisir mon cher, merci encore.

Puis il partit vers sa loge en se promettant d’offrir aussi un bouquet à son ancienne logeuse et en remerciant aussi fortement Albert dans sa tête et se disant qu’il avait vraiment bien fait de l’inviter aussi à New York car sans le savoir, il lui avait aussi sauvé la vie. Candy l’avait fait en partant à Miami, Albert en envoyant ce télégramme, lui s’était sauvé en sauvant un petit garçon d’un danger. Tout s’était ligué contre cette perfide Susanna qui n’avait pas fait le poids face à l’amour qui rend généreux. L’amour sincère et confiant l’avait empêché d’un destin tragique. Il en sortit encore plus amoureux et retourna voir sa mère pour lui offrir aussi un gros bouquet et de l’amour à vivre maintenant.


*****



A suivre
 
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view post Posted on 25/10/2014, 15:54
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Chapitre 4



Il suffit d’un ami




Candy désespérait de pouvoir quitter Miami et chercha un moyen de fuite alors que même le docteur Kliss trouvait toutes les raisons à ce qu’elle reste et que Karen était encore plus décidée à son caprice. Pourtant, ce matin du cinquième jour de son arrivée, alors qu’il n’en restait plus que quatre avant son départ pour New York, elle ne trouva pas la jeune fille dans sa chambre et son oncle lui annonça qu’elle était partie subitement à New York suite à un télégramme et donc que Candy pouvait rentrer. Elle fut si soulagée qu’elle ne demanda pas plus de détails sur ce départ et accepta le sac d’oranges offertes du médecin puis après son insistance, le chèque pour payer son travail en sachant qu’elle s’en servirait pour offrir un beau cadeau à Terry. Mais sur le trajet pour Chicago, elle se demanda bien ce qui avait pu faire partir Karen si vite, un autre rôle sans doute. Enfin, elle oublia en songeant avec délice que dans quatre jours elle reverrait enfin son fiancé et le voir briller sur scène puis vivre deux semaines près de lui. Une fois rentrée, elle dévora sa lettre et explosa de joie en racontant toutes ces nouveautés à Albert une fois qu’il fut rentré du zoo. Albert l’écouta raconter les Barrett, l’appartement et l’automobile en souriant de ses:

_ Qu’il est merveilleux mon Terry!

Et en pouffant intérieurement de la voir éplucher toute les oranges alors qu’elle ne devait en presser que deux. Du coup, Albert remplit une bouteille du jus et la conserva au frais pour plus tard. Ensuite, Candy alla écrire une lettre à Terry même si elle n’était pas sûre qu’il la reçoive avant de la revoir. En soirée, elle tenta de raviver encore la mémoire d’Albert en lui relatant tout leur passé commun mais rien ne revint à celui-ci. Puis leurs amis vinrent les voir, Alistair tenta un traitement de choc avec un marteau en caoutchouc de son invention, pour guérir Albert mais à part une bosse, il n’eut d’autre résultat que de vivre une franche rigolade et une bonne soirée.

***



Terry répéta pour la première fois avec Karen, à peine arrivée à New York. Elle le surprit en connaissant intégralement le texte de la pièce et mémorisant vite la gestuelle et l’orientation de son personnage. A la fin des répétitions, Terry lui sourit et la félicita avec respect avant de lui dire à demain mais la jeune fille le rappela alors qu’il était déjà près des coulisses.

_ Terrence! Ca te dirait de boire un verre avec moi avant de rentrer?

_ Non merci Karen, je travaille dans deux heures, je vais rentrer manger un morceau avant de repartir.

_ Oh ! Je comprends. Mais je peux te ramener alors, j’ai une voiture, ça ira plus vite.

_ J’en ai aussi une désormais.

_ Ah! Bon, alors, je t’accompagne jusqu’à la sortie.

_ Si tu veux mais ça sera vite fait! Dit-il, indifférent en repartant à grandes enjambées.

Elle peina mais le suivit et lui dit en route:

_ Ca va quand même me permettre de te dire que j’ai un gros bisou pour toi Terrence !

Celui-ci s’arrêta brusquement, se retourna en la regardant avec un air si indigné qu’elle faillit éclater de rire.

_ Ah non! Ca ne va pas recommencer! Bon, mettons les choses au point Karen! On va jouer ensemble mais seulement jouer! Tu ne m’intéresses pas autrement Karen, seule ma fiancée et future épouse m’intéresse pour ça, c’est clair?

_ Oh parfaitement Terrence! Mais... justement, c’est elle qui t’envoie un gros bisou. Sacrée Candy! Elle avait raison, tu es quelqu’un de droit Terry et tu la mérites bien.

Terry la regarda alors avec un grand intérêt.

_ Tu connais Candy?

_ Depuis peu de temps mais oui, je la connais et hier chez mon oncle à Miami elle me parlait encore de toi et sa hâte à te revoir bientôt.

_ Tout compte fait Karen, j’aimerai qu’on boive un verre ensemble, sauf si c’était juste pour me tester.

_ Pas seulement et c’était juste mon idée, Candy m’en voudrait mais moi je suis plus méfiante de nature. Enfin je ne regrette pas car en vérité, j’ai vraiment besoin de toi pour réussir à être très bonne sur scène et je ne veux pas non plus d’ambiguïté entre nous. Je te trouve très bien en tout mais je ne tomberai jamais amoureuse de toi, rassure-toi. Mais en ami je te trouve vraiment très intéressant si tu me donnes ma chance.

_ Et bien, des amis on en a jamais assez et franchement, tu me plais bien dans ce sens aussi et encore plus si tu me dis que ma Candy est plus belle que Susanna.

_ Alors là, tu as trouvé ton homme Terry! Enfin, ta femme! Mille fois plus belle que la Marlowe, c’est certain! Candy est très jolie, intelligente et admirable mais surtout, vraiment trop gentille. A sa place moi je me serai giflée tant j’ai été pénible avec elle. Mais en fait, je suis persuadée qu’elle allait s’évader. A ton avis Terry, Candy est du genre à s’évader par tous les moyens pour suivre son cœur non?

_ C’est plus que certain même si je n’ai pas compris pourquoi tu l’emprisonnais Karen. Allez, allons finir cette passionnante conversation autour d’une bonne boisson, je t’invite.

***



A Chicago, pour ses derniers jours de travail, Candy eut des soucis avec la grand-mère de Patricia, tombée malade car elle travaillait sur trois postes en même temps. Mais tout finit bien pour elle heureusement et elle redevint raisonnable. Deux jours avant le départ, Candy fit des achats en ville avec Annie et Patricia et elles tombèrent hélas sur Elisa et Daniel Legrand, sortant d’une grande boutique de mode, en arborant leur habituel air dédaigneux. Une vendeuse les suivait en portant une haute pile de paquets enrubannés. Elisa vit Candy et ses amies et stoppa net sur le trottoir, la pauvre vendeuse qui ne voyait pas grand chose se cogna contre elle et tous les paquets dégringolèrent.

_ Espèce d’idiote! Je vous préviens que tout ce qui sera abîmé ne vous sera pas payé ma fille!

Candy se précipita pour aider la vendeuse à ramasser ses paquets, ses amies aussi, ignorant les gesticulations d’Elisa et son frère même pas capable d’en faire autant. Puis les quatre filles mirent leurs chargements dans la voiture et la vendeuse les remercia gentiment. Mais Elisa ne s’arrêta pas là.

_ Et ne vous attendez pas à un pourboire! Et toi Candy, ce n’est pas la peine de t’imaginer dans une de ces robes dans la vitrine, tu n’en as pas les moyens!

_ Imaginer est gratuit Elisa, je ne suis pas ton employée, garde tes conseils !

_ Toujours aussi pédante pour une petite infirmière sans parents! Mais ne crois pas que tu vas ternir ma journée car figure-toi que je vais bientôt voir un ami, il se trouve à New York et je le verrai d’une des meilleures places du théâtre jouer Roméo.

_ Un ami? Et c’est moi qui rêve!

_ Quand il aura enfin vu clair, c’est toi qui pourras toujours rêver Candy. En attendant, je vais à New York avec maman et ma robe sera la plus chic, crois-moi !

_ L’habit ne fait pas le moine Elisa. Je te souhaite néanmoins du succès à New York, du moment que je ne t’y croise pas.

_ Parce que tu comptes y aller et te ridiculiser avec tes robes de paysannes?

_ J’y vais parce que je suis invitée Elisa, alors que toi tu t’imposes.

_ Invitée? Dis plutôt que tu as manigancé! Mais tu verras, Susanna Marlowe a fait du chemin, tu auras une surprise là bas!

_ Elle ne t’a donc pas tout dit dans ses lettres alors! Mais ma pauvre fille, Susanna t’a menti, enfin, comme toi elle a rêvé et est bien réveillée aujourd’hui et démasquée à jamais.

_ Oh! Quelle idiote! Mais ça ne fait rien, moi je suis plus maligne, je gagnerai et Terry t’échappera car tu n’es vraiment pas digne de lui.

_ C’est lui seul qui sait qui l’est Elisa, pas toi. Et maintenant ça suffit, j’ai assez perdu de temps avec tes élucubrations. Venez mes amies, c’est vrai qu’ici c’est trop cher pour moi mais s’il suffisait d’une belle robe pour être jolie ça se saurait.

_ Intrigante! Fille d’écurie! Dévergondée!

Puis en secouant son frère planté comme une statue.

_ Niel! Fais quelque chose!

_ Hein! Et quoi donc?

Il regarda sa sœur d’un air ahuri puis eut juste l’idée de se mettre devant Candy pour l’empêcher de passer. Celle-ci le regarda avec assurance et dureté.

_ Ôte-toi de mon chemin Daniel! Tu ne fais toujours pas le poids! Tu vas encore geindre et te plaindre si je te frappe!

Il n’eut encore pas le courage et s’écarta en serrant les lèvres et blêmissant. Elisa s’époumona à nouveau en injures mais les trois jeunes filles les ignorèrent et repartirent loin d’eux pour décider de la suite de leurs achats. Candy fut pourtant lucide et avoua:

_ Elisa avait quand même raison pour ce qui est de mon budget, par ici, tout est trop cher pour moi, je ne peux m’acheter une robe digne de Terry hélas!

_ Alors pourquoi ne pas la confectionner nous même? S’exclama Annie.

Patricia rejoignit son amie par un cri triomphant.

_ Mais oui, c’est ça la solution, ainsi tu auras une robe unique et comme tu la voudrais !

_ Mais je ne suis pas très douée pour la couture mes amies, tu le sais Annie, je n’aimais guère ça enfant et... je n’ai rien écouté des leçons de mademoiselle Pony.

_ Moi si, Candy et celles de ma mère aussi, j’aime toujours coudre et je crois sans me vanter que je peux réaliser le patron et trouver des tissus pas chers mais de qualité dans une boutique pas bien loin.

_ Et moi je brode assez bien, rajouta Patty. Je pourrai te faire un bustier sur mesure et j’ai plein de rubans de soie de grand-mère. Allons-y vite !

_ Et bien, vu votre enthousiasme mes chères amies, je vous suis, je vais tâcher de rattraper mon retard en couture, pour Terry je le ferai.

Elles éclatèrent de rire et repartirent à leur projet, pleines d’allégresse.


Et le lendemain après-midi, Annie, Patricia, Archibald et Alistair vinrent chez Candy et Albert avec la robe déjà bâtie. En trois heures, vu que même les garçons s’y étaient mis, la robe devint magnifique. Elle était en coton rose pâle, bien dégagée au cou et aux épaules, le bustier couvert de roses blanches brodées par Patricia. Un voile de mousseline diaphane entourait la large jupe jusqu’ aux pieds et les rubans rouges en nœuds papillon sur les manches ballons courtes et le devant de la jupe donnaient une touche fantaisie originale. Tout le monde applaudit quand Candy revint de sa chambre avec Annie, très fière d’elle et de tous.

_ Oh! Ce que tu es belle! Dit Patricia pour tous les autres car les garçons restaient muets d’admiration. Terry va en tomber à la renverse! Enfin... il va adorer quoi!

_ C’est vrai! Finit par approuver Albert. Candy vous êtes plus que jolie, vous êtes resplendissante. Je le dis en toute sincérité et de tout mon respect, vous êtes aussi belle de l’intérieur que de l’extérieur et Terry sait quelle chance il a de vous avoir comme promise et ne la lâchera jamais.

Alistair réussit aussi à faire son compliment oral mais Archibald semblait taciturne depuis que le prénom de Terry avait été prononcé et son frère finit par lui donner un coup de coude. Alors il soupira puis admit enfin :

_ Bon, d’accord. Moi aussi je crois que Terry va cette fois être assez intelligent pour faire tout pour te garder vu qu’il... semble t’aimer vraiment et toi aussi. Alors je vous souhaite à tous deux tout le bonheur possible, sincèrement. Mais qu’il ne s’avise jamais à te faire de la peine où.... Enfin... tu lui transmettras mon bonjour, quoi.

Annie sourit, elle avait fait les gros yeux quand il avait émis ce léger avertissement mais il avait fait un gros effort alors elle posa un baiser sur sa joue et Candy applaudit, donc elle rougit fort. Alistair sourit aussi puis rajouta:

_ Oui, moi aussi je lui transmet un grand bonjour, je n’ai pas oublié quel beau cadeau il m’a fait avec le biplan à réparer en Écosse. S’il en a un autre, qu’il pense à moi!

Albert vit Archibald faire la grimace mais comprit que cette fois ce n’était plus pour Terry car Alistair sembla un brin gêné quelques secondes. Les filles ne semblaient pas l’avoir vu alors Albert alla chercher et offrit son cadeau à Candy, une paire de longs gants blancs pour compléter sa robe de soirée.

_ J’ai eu un bon pourboire ce mois-ci et je n’aurai pas su quoi en faire à part vous prouver ma reconnaissance et mon estime, chère Candy.

_ Ils sont magnifiques Albert, je suis très touchée et mon estime ne risque pas de diminuer, vous avez tant permis que je sois ce que je sois. Quoi qu’on ignore encore, je sais l’essentiel de vous, vous êtes quelqu’un de respectable, généreux et fiable, c’est sûr. Mais hier soir vous me sembliez songeur après notre exercice, rien a rejailli?

_ Rien mais un nom m’a en effet semblé familier, celui de votre cousin disparu je crois.

_ Anthony?

_ Oui Anthony Brown, ça m’a semblé familier quand vous l’avez prononcé mais ensuite j’ai fini par penser que vous étiez la seule à m’en avoir parlé un jour, tout simplement.

_ Je me souviens vous avoir dit qu’il avait eu cet accident et sa terrible issue oui mais je ne crois pas avoir prononcé son nom devant vous, non je suis sûre de n’avoir jamais dit ce nom devant vous Albert. Mais peut-être que vous l’avez connu vu que vous viviez près de Lakewood à cette époque et qu’il était souvent à cheval à se promener. Qu’en pensez-vous les garçons?

_ Peut-être ! Fit Archibald après réflexion. Anthony était assez secret et ne nous disait pas tout, il était solitaire en fait, il n’y a que toi qui a su le faire s’épanouir Candy, comme ses roses et... comme pour Terry.

_ C’est vrai ! Approuva Alistair. Anthony était un peu comme Terry mais en plus doux, moins écorché vif. Une âme solitaire, chevalier servant et sensible. Mais pour ce qui est de savoir si vous avez pu connaître Anthony, Albert ? Je l’ignore mais c’est possible.

_ Anthony était blond aux yeux bleus très clair, azur en fait. Il cultivait les roses, une passion héritée de sa mère disparue si jeune, Rosemary André Brown. Ça ne vous dit rien Albert?

C’était Candy qui avait fait ce portrait après avoir été émue de la ressemblance qu’avaient vu Archibald et Alistair sur les deux plus chers garçons de sa vie amoureuse.

_ Rosemary dites-vous? Si, ce prénom sonne joliment dans ma tête mais est-ce un souvenir? Je n’en ai aucune idée hélas!

_ Ne vous inquiétez pas Albert, tout finira par revenir, fit Candy désolée de le voir encore se tenir la tête pour trouver enfin une réponse. Alors il releva les yeux et sourit pour la rassurer.

_ Oui, inutile de se torturer ce soir, fêtons plutôt notre voyage avec nos précieux amis. Que diriez-vous d’une bonne tournée de crêpes et de limonade pour le dîner?

_ Avec plaisir! Dirent-ils tous en cœur.


Après le départ de leurs amis, assez tard, Candy eut envie de revoir Anthony et de lui parler. Elle sortit de son armoire le carton à chapeau contenant ses souvenirs et contempla la petite photo de son ami de Lakewood.

« Anthony, c’est Candy. Je ne t’ai pas oublié tu sais, jamais je ne t’oublierai. Mais comprends-moi, Terry c’est autre chose que nous deux, nous étions des enfants. Je ne sais pas ce qui se serait passé si tu ne nous avais pas quitté Anthony mais je sais que Terry est l’homme idéal pour moi car il te ressemble de l’intérieur tout en étant unique et merveilleusement doué pour tout et surtout pour me rendre heureuse. J’espère que tu le comprends Anthony, tu voulais que je sois heureuse, tu as aussi fait tant pour moi, jamais mon cœur ne t’oubliera mon prince des roses. Repose en paix mon Anthony, mon frère d’âme. »

Elle regarda aussi sa Sweet Candy séchée dans sa boite et sourit de la voir toujours belle. Puis elle fit défiler les deux insignes des André trouvées, la bible de Soeur Maria, le crucifix de mademoiselle Pony, le ruban d’Annie, la poupée blonde trouvée dans son couffin d’orpheline et le petit bracelet de laine où avait été écrit son prénom: Candice. Puis elle remit tout dans la boite et ouvrit le coffret de Terry. Elle contempla amoureusement la belle pile de lettres qu’il lui avait envoyées, les coupures de journaux sur sa célébrité grandissante, le mouchoir à son chiffre, les photos qu’il avait envoyées dont les dernières où il posait bébé et une autre dans les bras d’Éléonore à trois ans.

« Voilà mon présent et mon avenir. Personne ne me le prendra, j’en ai tant rêvé, je l’aime tellement! Oh! Demain enfin je vais te revoir mon amour, tu me manques tant ! J’ai hâte d’être dans tes bras, je ne pourrais plus vivre sans y être, sans tes baisers et tes mains si douces sur ma joue et mes cheveux. Oh! Je me sens toute rouge mais c’est si bon de t’aimer mon étoile, de te plaire et de me sentir si belle et précieuse dans tes beaux yeux bleus et dans ta voix si chaude et envoûtante. »

Elle soupira encore de hâte et de plaisir puis redevint sérieuse en étudiant ses photographies d’elle enfant. Il n’y en avait que trois. Une à cinq ans avec Annie et d’autres enfants de la maison Pony, une à huit ans avec Capucin et sœur Maria et enfin, la dernière chipée par Alistair dans un album de Lakewood, à douze ans avec Archibald, Alistair et Anthony qui l’entouraient debout et elle assise sur le canapé dans une belle robe verte et la main d’Anthony sur son épaule. Elle hésita un peu mais cette photo était belle et pleine de souvenirs. Puis elle se dit que Terry n’en était plus là et il voulait la voir enfant alors elle la mit dans son sac avec les autres.


Au matin, très tôt, Alistair et Archibald revinrent pour les emmener à la gare.

_ Oh! Vous vous êtes levés de si bonne heure pour nous? C’est adorable mes amis mais il ne fallait pas!

_ C’est qu’il commence à neiger et la gare est assez loin, justifia Alistair. Mais j’ai aussi un cadeau pour toi Candy, hier il n’était pas fini, maintenant si et tu dois l’emporter pour te donner un maximum de chance car elle s’appelle la boite à bonheur.

Candy prit la petite boite en bois laqué qui fit entendre une jolie mélodie en l’ouvrant.

_ Oh! C’est magnifique Alistair, merci.

Elle lui fit une grosse bise qui fit rosir le jeune homme.

_ Je suis très touchée et te promets de tout faire pour garder le bonheur, Alistair. Et je t’en souhaite autant avec Patty et autant pour toi Archie, avec Annie.

_ Merci Candy mais moi je n’en suis pas là avec... enfin si mais j’ai plus important pour l’instant que penser à...

_ Chut! Fit Alistair. On a dit qu’on ne parlerait pas de ça maintenant, tu vas ternir sa joie de partir.

_ Et toi tu ne te dis pas que sa joie sera encore plus ternie de l’apprendre à son retour alors! Et nous! Et Patricia! Tu penses à nous!

_ Mais que se passe-t-il mes amis? Fit Candy bouleversée de voir les deux frères se déchirer.

_ Ce n’est rien Candy, je suis désolée, ce n’est qu’un différent entre nous qui n’est pas grave.

_ Pourtant il m’a déjà semblé hier soir que c’est plus que ça Alistair, dit Albert en voyant Archibald bien pâle et embêté comme s’il ne pouvait pas parler.

_ Alors je refuse de partir ainsi! S’exclama Candy tristement. Alistair, comment veux-tu que je sois heureuse à New York si je m’angoisse sur ce que j’ignore et semble grave?

_ Et voilà! Soupira-t-il en regardant son frère avec un brin de rancune. Bon, je vais vous le dire alors et vous verrez qu’il n’y a pas de quoi être triste. C’est juste que je souhaite devenir aviateur... en Europe.

_ Aviateur? En Europe? Vous voulez dire en France, Alistair? Sur le front? Comme militaire? En vous engageant?

_ Oh! Mon Dieu! Fit Candy après le constat d’Albert, la mine contrite d’Archibald et la tête baissée d’Alistair, opinant timidement. Alistair! Tu veux aller te battre à la guerre toi aussi?

_ Je me sens inutile ici, je sens que ma voie est là-bas, c’est mon devoir, comprends-moi Candy !

_ Il a cette idée en tête depuis des semaines ! Il n’a rien dit parce qu’il y avait déjà Flanny qui voulait partir mais il y pense aussi depuis tout ce temps ! Compléta Archibald en soupirant. Je n’arrive pas à l’en dissuader. Et ce matin, en le voyant se lever si tôt, je l’ai suivi et me suis dit que tu saurais le faire renoncer Candy, tu es la seule qu’il écoute !

Celle-ci regarda l’air inquiet d’Archibald, la mine penaude d’Alistair et tenta alors :


_ Mais Alistair! C’est dangereux! Tu risques de... ne jamais en revenir!

_ Oui Candy mais comme Flanny, je n’irai pas par dégoût de la vie, je ferai tout pour en revenir, je vous le promets à tous.

_ Flanny est infirmière Alistair, elle y est allée pour soigner, pas tuer.

_ Parfois on a pas le choix Candy, c’est la guerre qui l’oblige.

_ Mais pourquoi faire la guerre? Pourquoi veux-tu aller tuer des allemands qui ne t’ont rien fait?

_ Tu ne peux pas comprendre la politique Candy, tu es une... infirmière.

_ Moi je ne suis pas infirmier ni une femme, Alistair, dit Albert en secouant la tête, pourtant je ne comprends pas non plus la guerre et je ne crois pas non plus que ce soit à cause de mon amnésie. Mais je comprends et respecte votre point de vue et ce besoin de faire votre devoir tout en pouvant réaliser votre rêve de piloter.

_ C’est vrai ! Avoua le jeune homme, c’est aussi pour pouvoir devenir le pilote que je veux être mais je n’irai pas juste pour ça, je me sens vraiment mal de ne rien faire pour défendre la liberté alors que j’ai l’âge minimum.

_ Écoutez Alistair ! reprit Albert. Nous ne pouvons pas vous empêcher de faire selon votre âme et conscience bien sûr, ni nous ni votre frère, vous seul devez décider de votre destin mais... est-ce que ça presse comme décision ? Ne pouvez-vous pas au moins attendre les fêtes de fin d’année avant de le décider et au moins en discuter davantage?

_ Oh! Oui Alistair! Je t’en prie, promets-nous de ne pas partir avant au moins l’an prochain, c’est ça que je veux comme cadeau de Noël, s’il te plait!

Alistair regarda les yeux suppliants de Candy, comment résister ? Il soupira puis opina.

_ Bon, d’accord mais c’est bien parce que c’est toi Candy. Je te promets d’attendre janvier mais pas plus.

_ Ouf! Fit Archibald soulagé. Au moins je suis rassuré jusque là maintenant, merci mes amis. C’est que tous les matins au réveil, j’avais peur qu’il n’ait filé sans prévenir.

_ Heu... J’avoue que je voulais partir après demain pour éviter de voir vos peines ! Mais ce n’est pas très courageux en effet, je dois tout de même dire ça à Patty, c’est vrai.

_ Oui, pensez à tout Alistair ! Conclut Albert. Faire votre devoir c’est bien mais ne pas trahir sa famille est aussi important. Bon, allons-y maintenant où nous allons rater le train.

_ Oh! Surtout pas! S’exclama Candy en poussant tout le monde dehors.


à suivre
 
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view post Posted on 11/12/2014, 16:03
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*****



Chapitre 5



Enfin vers toi




Le voyage parut affreusement long à Candy mais au moins elle ne le faisait pas seule et en profita pour récapituler toute la vie d’Albert qu’elle connaissait. Il lui dit ensuite :

- Ca ne vous semble pas étrange que je vous croise si souvent sur mon chemin tout de même? Est-ce que ça pouvait être pour vous protéger Candy?

- Peut être, en tout cas vous l’avez fait par hasard ou choix et toujours avec beaucoup de douceur et de tact. Peut-être que vous me voyiez en petite sœur aussi. J’avoue qu’à notre première rencontre, je vous croyais très vieux avec votre barbe, votre moustache et vos lunettes. Pourtant vous ne devez pas avoir trente ans aujourd’hui !

- Je l’ignore. Pas de papiers, pas d’adresse, sûrement pas de famille. Que vous et vos amis pour me connaître. C’est tout de même louche! Quel passé fuyais-je?

- Rien de criminel ou honteux, c’est sûr! Peut-être un amour contrarié ou une famille trop à cheval sur les traditions! Oui, quelque chose comme ça et on trouvera, foi de Candy! Oh! Regardez! On aperçoit des lumières! Est-ce enfin New York?

- Probablement vu qu’il est presque l’heure prévue d’arrivée.

- Mon Dieu! Pourvu qu’il ne trouve pas ma coiffure trop stricte! D’accord les couettes ça faisait gamine mais le chignon ça ne fait pas trop vieille ? Et sa mère! Sera-t-elle vraiment contente de me revoir?

- Calmez-vous Candy! Tout le monde de sensé qui croise votre route est ravi de la recroiser et Terry va trouver votre coiffure ravissante. Il doit s’impatienter autant que vous à mon avis.

- Le train ralentit et je me sens maintenant toute tremblante. C’est vrai Albert, vous me trouvez jolie ainsi?

- Pas jolie Candy, enfin pas autant que quand vous riez alors ne tremblez plus et souriez aux éclats. Voilà, vous êtes plus jolie encore et le bonheur vous embellit à chaque seconde.

- Vous êtes aussi poète Albert, merci. Le train ralentit encore plus maintenant, c’est l’heure. Alors, j’arrive mon destin, Candy t’attend d’un éclat de rire!

***



Terry était aussi impatient et ému que Candy bien sûr mais lui ne s’inquiétait pas de son apparence car son souci était justement de passer inaperçu. Car depuis cinq jours que les affiches étaient placardées dans New York avec son portrait en Roméo et celui de Karen en Juliette, quelques filles le reconnaissaient et étaient parfois collantes. Et aujourd’hui moins que tout autre jour, l’idée qu’une admiratrice l’embête était impensable. Candy avait déjà assez subi à Chicago ce désagréable côté de son métier, il ne pourrait pas toujours lui éviter mais pas maintenant qu’ils se retrouvaient enfin après six longs mois. Il portait donc une casquette, un foulard autour du cou et du menton comme s’il était enrhumé et toussait souvent pour écarter les curieux. Le train arriva en gare à l’heure prévue et lorsque les passagers descendirent, Terry sentit son cœur s’accélérer en reconnaissant Albert descendre du train avec les valises et derrière, emmitouflée d’un grand manteau rouge ourlé de fourrure blanche, celle qu’il attendait et trouva encore plus belle, merveilleuse et maintenant presque sortie de l’adolescence et transformée en femme et quelle femme ! Il resta hypnotisé en suivant sa silhouette descendre gracieusement les marches puis poser ses pieds chaussés de bottes à talons moyens sur le quai, regarder partout avec des yeux impatients et étoilés qu’il sut juste pour sa personne et le rendit encore fier et heureux. Enfin, les émeraudes arrivèrent dans sa direction, il la scruta intensément caché sous sa casquette et son foulard mais il sentit dans cet éclair qui l’éblouit d’un coup que nul déguisement ne pouvait empêcher sa princesse blonde de le reconnaître et se précipiter vers lui.

- Terry! Enfin!

Il la reçut dans ses bras avec bonheur et la fit tournoyer en riant avec elle.

- Mon amour! Comme tu es belle ma Candy!

Elle rosit et glissa ses doigts dans ses cheveux en faisant ainsi relever sa casquette vers l’arrière pour voir son regard bleu unique et y constater comme il la trouvait belle.

- Oh! Mon amour! Tu m’as tant manqué ! Toi aussi tu es encore plus beau mais pourquoi es-tu si couvert? Tu n’es pas malade au moins dis-moi?

- Non ma chérie, c’est juste pour être moins reconnu des gens, chuchota-t-il dans son oreille.

- Oh! Oui bien sûr, suis-je bête, tu es encore plus célèbre maintenant et ce n’est qu’un début, bientôt tu le seras encore plus, tu es mon Roméo mais encore plus de filles rêveront que tu sois le leur!

- Jamais aucune autre Juliette que toi ma princesse, aucune ne peut t’arriver à la cheville, tu es unique, merveilleuse, plus belle que toutes et surtout la seule au monde si parfaite pour moi.

- Je sais mon amour, je ne m’inquiète pas de ça, j’ai confiance, ta célébrité n’est pas un ennui pour moi, nous gérerons tout ce qu’elle amènera de bon ou moins bon toujours ensemble. C’est normal pour moi que tu sois un grand et célèbre acteur mon Terry, c’est prévu depuis longtemps, tu seras le plus grand acteur de Broadway, du siècle même, si, si, pourquoi viserais-je moins haut que ce que je ressens dans mon cœur si fier de son choix, mon étoile?

Terry sourit mais ne poursuivit pas cette conversation car il se souvint qu’Albert était aussi là et le chercha des yeux en lâchant la taille de Candy et ne gardant que sa main dans la sienne. Il ne le vit pas près d’eux et le dit à sa fiancée.

- Où est Albert?

- Sûrement pas loin rassure-toi, mais c’est vrai, je dois d’abord te présenter notre ami, tu verras, il est toujours lui même, même sans sa mémoire. Oh! Je le vois, il est près du kiosque à journaux, regarde!

- Oui, je le vois aussi, je l’ai reconnu du premier coup quand il est descendu du train, ce qui m’a permis d’être certain que ma prochaine vision serait celle du plus beau tableau au monde, ma Candy unique adorée!

Ils se rendirent jusqu’à lui et Terry vit qu’Albert lisait la couverture d’un magazine montrant des photos d’Afrique.

- Ca vous rappelle quelque chose Albert?

- Je ne sais pas mais...

Puis en s’apercevant que c’était Terry qui lui demandait ça, une fois retourné :

- Oh! Bonjour Terry, oui je vous reconnais facilement mais sans savoir si c’est par souvenir ou grâce à l’affiche et le portrait détaillé de Candy. Comment allez-vous?

- Très bien mon ami et je vous le confirme, Candy sait mieux que personne qui vous êtes, vous avez été mon ami à Londres, vous êtes un homme bon et honnête et même sans vos lunettes sombres, je vous reconnais parfaitement.

- Merci Terry et aussi pour votre invitation.

- De rien Albert. Et pour le journal? Est-ce un semblant de souvenir de votre voyage en Afrique?

- Possible, je crois avoir déjà vu réellement ces paysages mais sans certitude.

- C’est déjà ça. Je vais acheter ce magazine ainsi vous pourrez le lire entièrement. Ce qu’il fit illico en donnant une pièce au vendeur. Mais il vaut mieux partir maintenant. Donnez-moi les valises Albert!

- Pas question Terry! Je suis amnésique et pas impotent. Merci pour le journal mais contentez-vous maintenant de guider notre charmante Candy, moi je vous suis.

- D’accord. Alors en route!

Terry ayant les mains libres, prit donc Candy par la taille pour quitter les quais de gare. Comme il n’avait pas remis sa casquette, quelques regards se portèrent sur lui et Candy le vit aussitôt.

- Et bien! Je n’ai pas fini d’être jalousée! Qu’est-ce que ça va être après la pièce!

- C’est à cause de l’affiche, depuis trois jours on la voit partout. Justement, elle est juste en face de la gare, regarde chérie!

- Wouah! Comme tu es beau! Tu impressionnes mais... c’est… Karen Kliss! Je comprend maintenant pourquoi elle a filé à New York si vite! Oh! Je suis contente pour elle mais... qu’est-il arrivé à Susanna?

- Elle a joué et elle a perdu. On parlera de ça plus tard Candy, en tout cas Karen t’embrasse et moi aussi en pensée seulement hélas. Mais voila ton taxi chérie, qu’en penses-tu? Ce n’est pas une Rolls mais elle roule bien.

Candy sourit devant la voiture de trois places, une Ford T noire.

- Elle est parfaite Terry. Tu me vois en Rolls Royce?

- Je te vois en tout ma princesse, tout te va. D’ailleurs, je trouve ta coiffure ravissante, surtout qu’elle me permet d’apprécier ta si jolie nuque.

Candy rosit bien qu’il ait murmuré pour elle seule ces mots mais elle lui sourit avec tant de séduction qu’il en frémit de bonheur.

Le trajet fut enjolivé de ses remarques admiratives sur tout et enchanta encore Terry.

- Vous avez vu comme les femmes ont les cheveux courts ici? C’est la mode? Vous croyez que ça m’irait aussi les cheveux courts?

- Oui mais tu ne vas pas sacrifier tes belles boucles d’or pour la mode ma chérie! La mode c’est pour celles qui n’ont pas assez de personnalité, n’est-ce pas Albert?

- Et bien, la mode et moi ça fait deux. Mais je suis d’accord, vos cheveux sont trop beaux Candy, ne les coupez pas. Mais en parlant de mode, j’espère que je ne ferai pas trop vagabond pour vos propriétaires Terry car je n’ai qu’un costume d’ assez correct mais je le garde pour la représentation.

- Ne vous inquiétez pas de ça Albert, mes propriétaires se fichent aussi de ce que vous portez, ils préfèrent le contenu que le contenant. Ils sont très simples et même si Kate est toujours très élégante, elle n’est pas du tout snob. Mais c’est tout de même très agréable une jolie coiffure et une jolie robe sur une jolie femme, n’est-ce pas?

- Tout à fait d’accord Terry et vous verrez comme Candy fait rimer élégance et simplicité en réussite!

- N’en dites pas plus Albert, c’est une surprise!

Terry sourit en se disant qu’elle allait plus que lui plaire cette surprise mais resta patient et montra plutôt le paysage.

- Nous voilà maintenant à Manhattan, regardez vers votre droite, c’est l’entrée de Central Park.

- Wouah! S’extasia encore Candy. Et c’est à Manhattan que se trouve Broadway?

- Oui, Broadway est un quartier de Manhattan, Candy mais plus à l’ouest. Tu le verras tout à l’heure, vous m’accompagnerez jusqu’au théâtre Stratford et ensuite vous rentrerez avec la voiture, Albert saura bien retrouver le chemin n’est-ce pas?

- Je vais essayer Terry.

- Mais comment rentreras-tu alors? S’inquiéta Candy.

- Karen me ramènera.

- Ah! Alors vous vous entendez bien tous les deux?

- Plutôt pas mal vu qu’on peut parler ensemble de mon sujet de conversation favori!

Elle rosit encore, il était un incorrigible séducteur mais elle adorait tout de même constater comme il l’aimait.

Mais il se gara ensuite dans une petite rue et Candy put encore s’émerveiller sur le confort de l’immeuble, de l’entrée spacieuse et impeccable, l’ascenseur moderne qu’il empruntèrent pour atteindre le sixième étage puis une fois entrés dans l’appartement, de celui-ci.
Elle vit sa chambre, celle d’Albert mais Terry oublia volontairement la sienne. Mais la cuisine, le salon furent visités en détails et elle trouva merveilleux tout jusqu’au moindre bouton de porte. Elle s’extasia ensuite sur la vue de la terrasse, Albert aussi mais profita de l’instant pour demander à se retirer dans sa chambre afin de laisser un moment d’intimité au couple. Ils en profitèrent aussitôt, Terry prit sa fiancée dans les bras et la charma d’un sourire si enjôleur qu’elle s’accrocha fort à lui de peur de succomber au vertige alors qu’il l’embrassait. Puis Terry rouvrit les yeux et se dit encore qu’il avait trouvé la déesse de l’amour, elle avait encore donné plus.

- Oh! Je t’aime tant ma Taches de son!

- Je t’aime tant aussi mon Roméo!

- Alors tu te vois vivre ici bientôt mon ange?

- Oh oui Terry mais je n’ai hélas toujours pas reçu de nouvelles de l’oncle William, légalement, je ne peux pas me marier sans son consentement avant vingt et un ans.

- Quatre ans à attendre! Espérons qu’il donne un signe bientôt car je ne me vois pas vivre sans toi si longtemps!

- Moi non plus Terry mais je crois qu’il serait sage d’attendre encore un an pour que tu ne te consacres qu’à ta carrière, que je ne te gêne pas.

- Un an c’est long mais... je survivrai.

- J’en ai aussi besoin pour devenir assez adulte pour toi Terry. Tout va si vite dans ma tête mais mon corps ne suit peut-être pas, je me sens encore immature parfois.

- Je ne trouve pas, tu as déjà tout d’une vraie femme Candy, je le dis sans exagérer. Mais si tu as besoin de temps, je le comprends et le préfère aussi pour que tu sois sûre de toi car je ne peux me contenter de moins que te prendre toute ta vie près de moi, pas moins.

- Oh! Mon amour! Je suis déjà certaine de t’aimer et te vouloir près de moi toute ma vie aussi, plus que certaine. Non, ce qui m’inquiète c’est de ne pas savoir grand chose sur mes origines, rien du tout en fait, c’est dur de ne pas savoir d’où on vient quand on est sur le point de fonder une famille.

- C’est vrai, j’ai eu plus de chance, j’ai une mère, une bonne mère et elle sera aussi la tienne bientôt, elle me l’a dit, elle est si heureuse d’avoir une fille aussi merveilleuse que toi.

- Oh Terry! Ta mère est adorable! Je suis très touchée. Elle essuya une larme. Excuse-moi, je suis plus qu’heureuse, je ne devrais pas gâcher ce moment, avec toi je me sens capable de tout, j’ai une confiance totale en toi et je sais où je vais avec toi, vers le bonheur parfait.

- Je te promets de tout faire pour te l’offrir mon amour, je ne veux plus jamais te blesser même sans le vouloir, j’ai tant besoin de toi pour être heureux et complet, seulement toi.

Elle fut si émue qu’elle se pendit à nouveau à son cou pour l’embrasser, il se crut encore plus au paradis. Puis ils rentrèrent à l’intérieur car il faisait frisquet.

***



Une heure après, ils allèrent tous trois rendre visite à Kate Barrett et le petit Jonathan. Evidemment, Candy plut immédiatement à la mère et son fils, son mari ne rentrerai que le lendemain mais irait aussi voir la pièce. Kate proposa qu’ils reviennent tous trois dîner avec elle après l’ultime répétition de Roméo et Juliette. Terry précisa qu’il risquait de rentrer plus tard que d’habitude vu que c’était la générale mais Kate refusa de le reporter, ils l’attendraient en trouvant de quoi s’occuper.
Puis ils remontèrent au sixième, Candy alla ranger ses affaires dans sa chambre et Terry en profita pour discuter avec Albert au salon devant un café.

- J’ai cru vous voir vous tenir la tête tout à l’heure, elle vous fait encore mal?

- Parfois mais bien moins qu’au début. Mais de temps à autre, un éclair traverse mes yeux, ça précède une image qui me revient, c’est souvent un train, un bruit de bombardement, enfin ce que je sais avoir vécu. Mais je ne souffre pas Terry, grâce à Candy, j’ai évité le pire, me retrouver seul sans passé ni idée d’être bon ou mauvais, j’ai eu beaucoup de chance.

- Oui, nous avons beaucoup de chance d’avoir pu la rencontrer, elle est unique. Je suis aussi content que vous soyez près d’elle pour la protéger, sans vous j’aurai beaucoup de mal à ce qu’elle reparte à Chicago.

- Je vous promets de la protéger tant que vous ne pourrez vivre ensemble Terry, je lui dois bien. Je surveille ces deux affreux Legrand. Archibald et Alistair sont là aussi, ne vous inquiétez pas, nous aimons tous Candy, nous ne laisserons personne lui faire du mal.

- Merci Albert. Sinon, j’ai vu que Central Park vous intéressait, ce n’est pas étonnant, vous aimez la nature, les animaux, les fleurs. A Londres vous m’avez confié avoir une passion pour les roses pour une autre raison que leur simple beauté.

- Les roses? Tiens ça me rappelle quelque chose. Ah non! C’est Candy qui m’a parlé récemment de son ami qui en cultivait, ce n’est pas un souvenir.

- Anthony?

- Oui le petit qui s’est tué à cheval et qui a crée une rose pour Candy.

- Il lui a crée une rose? J’ignorai ça. Il devait vraiment beaucoup aimer Candy.

- Oui, sûrement. Quelle tristesse de mourir si jeune!

- Oui c’est triste et injuste, fit Terry sincère.

- Candy est quelqu’un qu’on ne peut qu’aimer ou détester si on est empli de jalousie et de méchanceté, mais on ne peut rester indifférent à tant de générosité, d’authenticité et de charmes. Mais Candy n’est plus une petite fille, son cœur est celui d’une femme et si sa fidélité est indestructible, elle va toujours de l’avant. Elle vous aime de tout son cœur, c’est évident.

- Oui je sais que j’ai une chance folle, merci encore Albert. Et surtout ne vous gênez pas ici, vous êtes plus qu’un ami pour moi aussi, j’ai une totale confiance en vous, qui que vous soyez, vous êtes un type formidable, croyez-moi.



Une demi-heure après, Terry, Candy et Albert partirent pour le théâtre Stratford. Albert mémorisa bien la route empruntée. Au théâtre, Robert Hattaway vint saluer les amis de son jeune premier, Karen en fit autant sans s’attarder. Terry put quand même montrer la scène et la salle du théâtre et leur désigna leurs places pour demain soir, au deuxième rang et presque au milieu du rang pour avoir une excellente vue. Puis il embrassa la joue de Candy et les laissa repartir. Albert prit donc le volant et retrouva facilement son chemin.

- Pour la mémoire à court terme et le sens de l’orientation, c’est parfait Albert. Mais nous pourrions nous arrêter un peu à Central Park alors? Vous saurez sûrement y aller!

- Ma foi! Et puis, il nous faut trouver aussi un fleuriste avant de rentrer, pour Kate, ce sera plus poli.

Candy sourit, Albert avait toujours en lui ce mélange de noblesse contrastant avec son goût de l’aventure, il n’avait pas changé vraiment.

***


Au théâtre, ce fut éprouvant pour tous mais à la fin de la scène finale, Robert semblait satisfait. Il félicita plus particulièrement Karen.

- Je tiens à te dire que je n’avais pas trouvé Susanna Marlowe meilleure que toi à l’audition, je ne l’ai préférée que pour son physique, sa blondeur. Mais je me suis trompé, Juliette n’a pas besoin d’être blonde pour sembler pure, tu l’incarnes tel que je la ressens, la blondeur ne fait pas la pureté, enfin, pas toujours.

Cette dernière remarque fut pour Terry qui approuva et en sourit.

- Merci Robert, je suis contente d’entendre ça, ainsi je me sens moins prétentieuse car je le pensais aussi. Mais je n’aurai pas pu obtenir ce résultat si vite sans l’aide de Terry ni sans l’avoir comme partenaire.

- J’ai vu également que votre couple sur scène fonctionne aussi mieux grâce à la confiance et le respect, je suis fier de vous, refaites aussi bien demain soir et nous aurons le succès au rendez-vous.



Pendant le trajet de retour, Karen remercia encore Terry.

- C’est vrai Terry, sans toi je n’en serai pas là, merci encore.

- De rien, moi aussi je préfère une partenaire rousse et sympa plutôt que blonde et fourbe.

- Tu ne m’as pas dit que Susanna avait été jusqu’à se taire quand le projecteur est tombé, elle est complètement folle. C’est le technicien qui me l’a dit, il a beaucoup culpabilisé bien qu’il n’y soit pour rien, c’est à cause de la poutre abîmée mais ça ne risque plus rien, c’est réparé.

- Oui, j’ai eu de la chance ce jour là et cette chance est encore due à Candy mais aussi Albert qui m’a envoyé un télégramme pour me dire que Candy était partie à Miami, et donc aussi grâce à toi qui a permis qu’elle s’y rende.

- Ah! Je n’ai pas tout compris mais si tu me dis que j’ai contribué aussi à ton bonheur et le mien, ça me suffit largement. Mais quand même Terry, excuse-moi de te reparler de cette Susanna mais, tu n’as pas peur qu’elle poursuive ses folles espérances, tu ne l’as pas revue?

- Non, heureusement, Robert a prévenu sa mère, elle doit la surveiller, voir la faire soigner.

- J’espère bien mais reste quand même sur tes gardes, on ne sait jamais.

- Ne t’en fais pas.

- Bien. Te voilà arrivé chez toi Terry, tu diras à Candy que je viendrais plus tôt demain. Ce soir, je préfère me coucher de bonne heure, je suis crevée.

- Entendu Karen. Alors, repose-toi bien ma Juliette rousse et fais de beaux rêves.

Il joua encore la scène du balcon au pied de l’immeuble, Karen sourit avant de partir. Il était particulièrement gai ce soir, Candy avait de la chance d’être aimée ainsi mais elle le méritait bien. Elle pensa à ce bel homme blond, son ami Albert. Elle n’avait pas eu le temps d’y songer tout à l’heure mais elle l’avait trouvé plein de charme et sympathique. Elle pensa à lui le temps du retour chez elle pour oublier son trac l’envahissant.



Terry monta directement au cinquième étage et fut ému en voyant Candy à quatre pattes sur le tapis du salon qui jouait avec Jonathan, elle serait une merveilleuse maman c’est certain. Albert regardait un album photo avec Kate, d’Angleterre et d’Irlande. Le dîner fut merveilleux mais Candy, en voyant que Terry était fatigué après le dessert, prétendit à leur hôte que c’était elle qui avait besoin de repos.



Dans son beau lit en chêne, Candy rêva à son avenir. Il lui semblait si merveilleux, tout lui plaisait dans cet appartement, Kate était gentille, Jonathan adorable. Central Park tout près et immense permettrait de garder contact avec la nature, la paix et le ressourcement dans cette si grande ville. Mais elle ne se voyait pas vivre ailleurs maintenant, Terry devait vivre ici pour être acteur, il serait un immense acteur, il partirait forcément en tournée parfois mais elle l’aimait assez pour supporter tout le côté difficile de ce métier et sa célébrité. Elle pensa aussi qu’il serait dur de ne plus voir ses amis de Chicago souvent mais elle irait leur rendre visite dès que possible, la maison Pony également et elle aurait d’autres amis ici, elle en avait déjà trois, Kate, Jonathan et Karen. Elle rencontrerait monsieur Barrett demain soir, elle ne s’inquiétait pas de s’entendre avec lui aussi vu que Terry l’appréciait beaucoup. Elle s’endormit en se sentant privilégiée, elle avait réalisé son rêve, connaître le grand amour et le garder, elle se jura de tout faire pour ça.



Terry s’était endormi vite car il était debout depuis hier midi, il avait travaillé cette nuit sur le port et pas dormi ce matin car il était trop excité de revoir Candy. Il ne lui avait pas dit pour ce travail, il avait demandé quinze jours de congés dès demain, on ne lui avait pas refusé, s’étonnant même qu’il continue à décharger des bateaux et veuille revenir alors qu’il allait jouer Roméo et devenait une vedette. Mais Terry pensait qu’il devait gagner le plus d’argent possible maintenant, on ne savait pas si la pièce allait marcher et si il aurait d’autres rôles, il ne voulait pas prendre la grosse tête. Candy travaillait dur aussi, il avait assez joué les fils à papa oisifs à Londres, il devait maintenant être toujours digne d’elle. Il voulait lui offrir une vie agréable, l’amour ne suffisait pas pour être heureux, elle méritait le meilleur, il désirait lui offrir tant de choses.




Albert avait lu tout le journal que Terry avait acheté tout en pensant à son ami Bup en pension chez la grand-mère de Patricia. Puis il lut le New York Times du jour et un article retint son attention, un éclair traversa sa tête en lisant que les actions de la banque André grimpaient. Mais à part que ce nom était celui de la famille adoptive de Candy, rien ne pouvait lui rappeler quoi que ce soit.

***



Le lendemain, Terry se réveilla tard, trop pour prendre un petit déjeuner mais se rattrapa sur le déjeuner essentiellement préparé par Albert qui était bon cuisinier. Candy prit un air désolé pour ce qu’elle avait tenté seule, des biscuits un peu trop cuits mais se promit de faire vite des progrès pour l’avenir. Terry les trouva quand même bons, il ne doutait pas qu’elle était capable de devenir aussi une bonne cuisinière avec le temps.



A quatorze heures, la sonnette retentit, c’était déjà Karen car elle était trop anxieuse pour rester seule dans son studio plus longtemps. Terry était calme, il ne pensait pas encore à avoir le trac mais il l’aurait un peu avant le lever de rideau forcément. Tous les trois accueillirent Karen avec plaisir et tentèrent de la rassurer au mieux. Candy finit par lui proposer un léger anxiolytique et Terry s’amusa de voir toute la pharmacie qu’elle avait emporté à New York. Elle lui proposa à lui, plutôt un énergisant vu tout ce qu’il avait dormi. Il rit en lui disant qu’il était empli d’énergie, elle le verrait ce soir mais il voulait bien un massage pour se sentir encore plus décontracté. Candy rougit mais accepta de lui masser la nuque et les épaules, Terry ne pensant pas qu’elle accepterait se trouva alors un peu bête et Karen sourit, un brin moqueuse. Il réagit alors et prit Candy par la main pour l’emmener dans sa chambre. Elle lui dit donc de retirer sa chemise et s’allonger sur le ventre sur le lit, elle semblait à l’aise alors il obéit. Il dégrafa sa chemise alors qu’elle sortait un baume de sa trousse mais quand elle le vit en débardeur, elle rougit et baissa vite les yeux. Terry se sentit intimidé aussi, il allait lui dire que ce n’était pas la peine mais elle releva les yeux d’un coup et en rougissant, osa lui dire :

- Tu es très bien bâti Terry, je ne m’imaginais pas que tu étais si musclé, ça te va très bien.

- Merci ma chérie.

- De rien. Mais allonge-toi maintenant, je suis infirmière je te rappelle, je suis professionnelle, je ne serais que ça pendant que je te masserais.

- Je sais, dommage mais je serais sage aussi, promis.

Elle sourit et se concentra sur sa tâche. Mais lorsque ses mains se posèrent sur la nuque et les épaules de Terry, elle se sentit toute petite, il était chaud et doux, elle voyait sa peau s’électriser et frissonner. Mais elle aima tout de suite ce contact, il était son fiancé, son futur mari, il ferait d’elle une femme et elle l’espérait une mère, elle aurait des contacts très intimes avec lui et elle devinait qu’elle allait aimer ça. Déjà elle adorait ses baisers, être dans ses bras, ses caresses sur son visage, dans ses cheveux, sur ses mains. Elle aimait maintenant le masser et elle ne se contenta plus de sa nuque et ses épaules, elle partit dans son dos et le massa aussi sous son débardeur. Puis elle eut envie de lui montrer qu’elle avait fait encore un pas vers lui, elle se pencha et embrassa son épaule, elle vit sa peau frémir et fut contente d’elle. Quand il se retourna il vit son regard amoureux, sourit et caressa sa joue puis se redressa pour embrasser sa bouche si désirable. Puis il lui tendit les bras, elle s’y blottit et apprécia cette tendresse débordante.

- Je t’aime pour l’éternité ma Candy ! murmura-t-il ensuite près de son oreille. Et j’ai hâte que tu deviennes mon épouse !

- Moi aussi mon amour, j’aime être avec toi, je t’aime toujours plus, tu es si parfait pour moi.

- Alors j’ai fait des progrès, avant j’étais impossible, maintenant parfait.

- Oui tu es tout ce que j’aime, tu as le courage de tes ambitions sans jamais te trahir, tu es droit et indomptable, tu es plein de talents, d’intelligence et de sensibilité, tu es vraiment parfait intérieurement en plus de l’être extérieurement.

- Tu n’as rien à changer non plus ma princesse, tu es parfaite aussi dedans et dehors.

- Maintenant, dis-moi si Susanna t’a blessé Terry ? J’ai besoin de savoir.

Il soupira, passer déjà à ce sujet si désagréable l’ennuyait mais il devait de toutes façons lui dire et autant en finir vite.

- Elle ne m’a pas blessé car je ne l’ai jamais vraiment appréciée, j’ai essayé d’être son ami mais je n’ai jamais été à l’aise avec elle et je sais pourquoi maintenant. Elle voulait… bien plus que je ne pouvais lui donner et elle a utilisé des moyens… méprisables pour y arriver mais elle a échoué. Robert Hattaway l’a renvoyée de sa troupe car elle n’était plus capable de jouer Juliette et a trop inventé de mensonges.


- Elle a été manipulée par Elisa ?

- Non, elle est l’égale d’Elisa. Tu veux vraiment entendre tous les détails ma chérie ? Je te le demande car ça va te rendre triste, pas parce que je crains de te dire toute la vérité.

- Je sais que tu n’as rien à te reprocher Terry, je voulais qu’elle ait au moins ton amitié, j’ai pensé que c’était mieux pour toi vu qu’elle joue avec toi, surtout avec le rôle de Juliette. Mais j’ai eu tort, je ne veux plus jamais te pousser à fréquenter des gens qui ne t’inspirent pas, pardonne-moi.

- Non, tu as raison de laisser une chance à tout le monde, si tu n’étais pas ainsi que serais-je aujourd’hui pour toi ? Mais Susanna est vraiment très perfide, moi non plus je ne le croyais pas quand même. Tu sais ma chérie, des cœurs purs et sincères comme toi, ça ne court pas les rues.

- Je ne suis pas la seule quand même Terry. Mais si Susanna est l’égale d’Elisa, je ne lui donnerai pas une deuxième chance non plus, ma générosité a ses limites. Mais tu n’as pas besoin de m’en dire plus sur elle, pas parce que ça va me rendre triste, je la plains mais pas plus. C’est en toi que j’ai confiance et qui fait que je ne suis pas jalouse et possessive, pas en Susanna et toutes autres admiratrices.

- Je ne risque pas de les voir, tu es la seule au monde pour moi, la première et à jamais la seule que j’aime passionnément pour toute ma vie.

- Tu es et restera le seul pour moi aussi mon amour.

Ils s’embrassèrent à nouveau puis Terry se releva et remit sa chemise.

- Nous devrions rejoindre nos amis, ce serait mieux non ?

- D’accord mais je vais d’abord me rincer les mains de la pommade, je te rejoins.

Terry ouvrit la porte alors que Candy s’essuyait avec une serviette humide mais le jeune homme referma aussitôt et revint vers elle.

- En fait, Karen et Albert n’ont pas besoin de nous, ils ont l’air de bien s’entendre. Albert masse les pieds de Karen !

- C’est vrai ?

- Je t’assure.

- Tu crois qu’ils peuvent…

- Pourquoi pas ?

- Alors on y va pas?

- Non, attendons, on ne sait jamais !

- Ah ! Bon ! J’ai du mal à imaginer Albert avec une petite amie, c’est drôle, je l’ai toujours connu juste accompagné d’un putois, il est si à part. Mais c’est vrai qu’en fait, je ne sais rien de lui à part qu’il est gentil et droit, il apparaît, disparaît.

- Il m’a dit à Londres qu’il aimait les roses pour une raison spéciale, ça ne te dit rien ?

- Les roses ! Non jamais il ne m’a dit ça, c’est étrange !

- J’ai pensé qu’il y avait peut-être une femme dans son passé qui portait le prénom de Rose, sa mère, sa sœur ou une fiancée.

- C’est possible Terry, dit-elle en songeant à Anthony, sa mère s’appelait Rosemary mais quel rapport ?

Terry la vit troublée et comprit.

- Tu penses à celles de Lakewood ma chérie ?

Elle sursauta un peu mais vit son regard confiant et se dit qu’il fallait de toutes façons en parler.

- Oui mon amour, je t’ai apporté des photos de moi enfant et il y en a une avec Anthony alors je dois te dire ce qu’il a été pour moi, ce qu’il est encore et restera toujours, je dois être sincère moi aussi et je sais que tu es prêt maintenant à l’entendre.

- Je suis prêt c’est vrai ma chérie, prêt à tout entendre désormais car je ne suis plus ce stupide jaloux qui a dit des horreurs sur ton ami Anthony, je ne les pensais pas bien sûr, j’étais jaloux et je te demande de me pardonner pour lui.

- Il te pardonnerait comme moi Terry, il était aussi droit et franc, courageux mais aussi solitaire et secret, c’est vrai au fond qu’il ressemblait un peu à Albert quand même. Rasseyons-nous sur mon lit mon cœur, je vais te montrer ces photos et le cadeau d’Anthony.

Elle alla chercher une boite dans l’armoire, la ramena et la mit sur le lit en s’asseyant à côté de Terry qui fut impressionné par la rose blanche dans sa boite transparente.

- Elle est magnifique Candy !

- Oui et elle s’appelle Sweet Candy, elle a éclos le 7 mai, c’est pourquoi Annie et moi avons choisi cette date pour fêter notre anniversaire, vu que nous ignorons la vraie. Elle sent aussi très bon mais il faut être dans la roseraie à Lakewood, entre mai et août pour en sentir tout le parfum et j’espère pouvoir y retourner un jour.

- Il l’a créée pour toi ?

- Oui mais il était le fils de celle qui a crée la roseraie, il a hérité de sa passion et se sentait relié à elle car elle est hélas morte alors qu’il n’avait que dix ans. Elle s’appelait Rosemary, Rosemary Brown.

- Rosemary ! Quel beau prénom ! Je comprends, Albert a peut-être un souvenir aussi de ce genre, il faut arriver à lui faire retrouver.

- Oui peut-être. Mais Anthony aimait aussi autant les chevaux que les roses, il s’est tué devant mes yeux en voulant franchir un fossé. La jambe du cheval a été emprisonnée par un lourd piège à mâchoire, il a éjecté son cavalier, il est tombé et ça a été fini.

- Je suis désolé ma chérie, je comprends mieux ce que tu as ressenti, j’avais compris ta peur, j’ai pensé qu’il n’y avait qu’un seul moyen pour vaincre sa peur, de l’affronter.

- Tu as eu raison Terry, ça a marché, je n’ai plus peur des chevaux ni de perdre ceux que j’aime, du moins, pas exagérément. Maintenant voici les photos mon cœur !

Terry fut ému mais en découvrant ce jeune homme blond aux yeux si clairs, il avoua :

- C’est étrange, il te ressemble beaucoup.

- Oui, il disait que je ressemblais à sa mère mais je croyais que c’était plus de l’intérieur. Puis j’ai vu son portrait, elle avait des cheveux blonds et bouclés aussi mais les yeux de son fils.

- C’est étrange ! Répéta Terry.

- Quoi Terry ?

- Non, je trouve étrange qu’Albert ait le même sourire aussi parfois.

- Ah ! Je n’ai pas remarqué ! Tout ça est bien étrange en effet mais qu’en conclure ?

- Rien ma chérie, n’imaginons pas n’importe quoi, laissons œuvrer le temps. Parle-moi te ce que tu ressens pour ton ami maintenant, sans craintes.

- Oui, sans craintes mon chéri car tu l’as dit, il était et sera à jamais mon ami. Je l’aimais comme une enfant qui se sent pour la première fois éblouie et charmée par un beau garçon plein de talents mais pas le coup de foudre et le grand amour que j’ai rencontré ensuite. Il a été important dans ma vie, il le restera mais il n’aurait pas pu me faire ressentir ce que je ressens pour toi car on ne peut aimer qu’une seule fois aussi fortement et clairement. Anthony n’aurait pu devenir ce que tu es pour moi Terry, je ne peux pas te le prouver mais c’est une certitude pour moi, une évidence.

- Je n’en doute pas Candy puisque j’ai cette même évidence en moi. Tu n’auras plus jamais besoin de vivre tes sentiments pour Anthony en cachette, ni pour lui ni pour quiconque d’ailleurs, j’ai trop de chance d’avoir ce privilège d’être ton élu de cœur, je ne serai plus jaloux ni possessif, du moins plus exagérément. Mais je crois que je le serais si un garçon te faisait la cour devant moi, je ne suis pas encore si parfait, j’essaierai de ne pas réagir violemment mais… ce sera plus dur.

- Mais tu ne risqueras de toutes façons rien de ce garçon mon amour puisque je ne vois que toi ! Dit-elle en souriant malicieusement.

- Il pourrait avoir du charme et des qualités tout de même hélas, ma princesse !

- Crois-tu que ça suffira à en tomber amoureuse mon chéri ? Fit-elle encore plus malicieusement.

Il sourit et avoua :

- Non bien sûr mais je préfère quand même essayer d’être le plus parfait à tes yeux pour risquer pareille catastrophe qui ruinerait ma vie à jamais. Je ne peux plus vivre sans toi ma Candy, je ne supporterai pas de te perdre, que tu ne m’aimes plus parce que je me serai mal comporté avec toi, je ne veux pas perdre ce bonheur, il est si grand, si merveilleux, je t’aime comme on aime une seule fois et sans fin !

- Terry ! Tu es si adorable ! Jamais tu ne me perdras, tu es inégalable, merveilleux, mon amour pour toi est identique au tien, je t’aime pour l’éternité toi et toi seulement ! Embrasse-moi encore, j’aime tant tes baisers mon amour !

Il se crut alors près des étoiles, elle l’attira encore plus près d’elle, au point qu’il faillit perdre raison en sentant ses seins contre son torse. Elle lui ouvrit une nouvelle porte vers leur avenir qui lui certifia des nuits féeriques, déjà elle lui donnait plus que bien des fiancées donnaient à leur promis, déjà elle montrait une sensualité débordante, une soif d’amour et un corps de jeune femme prêt pour le grand voyage. Il gémit de bonheur, elle soupira de plaisir, il caressa et embrassa chaque centimètre de son visage, ses cheveux, son cou et ses douces mains. Elle posa ensuite ses doigts sur sa gorge et la caressa aussi, il ferma les yeux de plaisir et quand ses lèvres remplacèrent sa main, il se décida péniblement à s’éveiller de ce merveilleux rêve. Elle le regarda avec un air un peu désolé en le voyant s’échapper de ses bras mais ne rougit pas et sourit en l’entendant lui dire :

- Tu es trop merveilleuse ma chérie, j’ai peur de n’avoir plus le courage d’aller au théâtre si tu me donnes encore autant de bonheur ici !

- Tu aimes autant le théâtre qu’être avec moi Terry, tu vas être le plus merveilleux Roméo jamais vu, le plus beau, le plus réaliste, tu auras le courage de le jouer parfaitement, surtout devant ta vraie Juliette !

- C’est vrai, je veux t’offrir ce que tu espères ma Juliette, je suis motivé comme personne. Mais je préfère être avec toi que quoi que ce soit d’autre, le théâtre me permet de vivre mille vies mais je préfère de loin la mienne à celle de Roméo, surtout la fin.

- Je préfère aussi ma vie, notre vie, notre amour, notre bonheur, notre amour éternel et indestructible.

Il la regarda encore comme la septième merveille du monde puis gavé de bonheur, il la souleva et tournoya en riant de joie jusqu’à ce qu’il trébuche et s’étale avec elle sur le lit. Elle le serra encore fort puis le repoussa gentiment.

- Allez, Roméo de mon cœur, assez de relaxant et énergisant pour aujourd’hui, en route pour ton destin d’acteur maintenant, je suis si fière de toi mon Terry adoré.


A suivre

Edited by Diogène - 14/12/2014, 08:55
 
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Chapitre 6

Le rideau se lève



A seize heures, Terry et Karen partirent pour le théâtre et Candy monta vite chez Kate qui devait la coiffer pour ce soir. James, son mari, devait rentrer à dix-huit heures, la pièce se jouant à vingt heures, il n’aurait le temps que de se préparer et comme Jonathan était trop petit pour la voir, une nounou avait été engagée pour le garder.

Albert n’était pas pressé pour se préparer, ce serait vite fait d’enfiler son costume trois pièces. Il proposa donc à Kate d’emmener Jonathan se promener un peu à Central Park pendant qu’elle coiffait Candy.

Elle lui tressa savamment les cheveux pour les enrouler ensuite en chignon haut, incrusté de petites étoiles argentées, en laissant juste deux mèches crollées sur les côtés retomber sur ses épaules. Puis elle lui mit une touche légère de blush rose sur les joues, un soupçon de gloss brillant sur les lèvres et contempla son œuvre.

- Vous êtes belle comme le jour Candy ! Vous n’avez besoin d’aucun artifice pour l’être, votre peau est lisse comme du satin, blanche comme un lys et ces petites taches de rousseur vous donnent un air ensoleillé, comme vos beaux cheveux d’or. Je crois que votre Roméo va apprécier !

- Je l’espère Kate ! Merci de votre aide et votre gentillesse.

- Je suis si heureuse à l’idée de vous avoir bientôt tout le temps ici vous savez ! Quelle chance j’ai !

- Moi aussi j’ai hâte Kate mais vous savez que je ne sais pas quand je pourrai revenir ni quand je pourrai me marier avec Terry vu que mon père adoptif ne m’a pas donné de nouvelles encore. Je ne peux pas me marier sans son autorisation avant ma majorité et ce ne sera que dans quatre ans. Terry n’aimerait pas attendre autant mais si monsieur William ne se manifeste pas, je ne vois pas comment je ferai !

- Il doit bien être quelque part ce mystérieux monsieur William ! James connaît beaucoup de monde, je pourrais lui demander de se renseigner sur votre père adoptif peut-être ! On ne sait jamais !

- Je veux bien Kate !

Justement, quand Candy sortit de la salle de bain de Kate, revêtue de la belle robe créée par ses amis, elle se retrouva face à un couple enlacé et gênée de déranger leurs retrouvailles, elle recula sur la pointe des pieds. Mais James avait vu sa silhouette malgré sa joie à retrouver son épouse et l’empêcha de se sauver.

- Je crois avoir aperçu Cendrillon parée à aller au bal ! A moins que ce ne soit Juliette venue voir son Roméo !

Kate sourit en voyant les joues rouges de Candy que le blush n’avait pas autant coloré mais confirma les dires de son mari.

- C’est en effet notre chère Candy, cette si jolie princesse Juliette ou Cendrillon, mon chéri ! Elle est bien telle que Terry nous l’a décrite, n’est-ce pas ?

- Absolument Kate ! Enchanté de vous rencontrer Candy !

Celle-ci sourit alors, James était bien apparemment aussi comme Terry l’avait dit: simple, spontané, gentil et vraiment bien assorti à Kate car bel homme également. Il portait une fine moustache légèrement rebiquée en pointes, des cheveux bruns gominés et des yeux gris rieurs. Elle avança alors vers lui et lui tendit la main.

- Je suis aussi heureuse de vous voir James et je vous remercie de nous permettre d’habiter dans votre si bel appartement avec Terry !

- C’est bien normal ma chère petite ! Terry est vraiment un garçon de valeur, je me sens si rassuré maintenant qu’il est là et veille sur ma petite famille. Mais ce n’est pas à vous que j’apprend qui est votre fiancé Candy ?

- Non James, je suis bien d’accord !

- Voilà donc déjà un point en commun entre nous alors Candy !

Quelques minutes après, Albert et Jonathan revenaient de Central Park. Le petit garçon sauta dans les bras de son père qui le fit tournoyer quelques secondes. Puis, après de gros bisous, James salua Albert.

- Bienvenue Albert ! Vous permettez que je vous appelle ainsi ?

- Avec plaisir… James ! De toute façon, je ne me souviens plus de mon nom alors je ne peux pas vous demander de m’appeler autrement !

- Oui, Terry m’a raconté votre malheureux accident, le train bombardé, votre amnésie ! J’espère que la mémoire vous reviendra bientôt mais je crois que vous avez eu la chance au moins de tomber sur l’infirmière la mieux qualifiée pour vous aider à la recouvrer, comme Terry le pense !

- Je vous remercie de me faire confiance aussi James.

- Je me fie à l’instinct de mon fils qui semble vous avoir adopté aussi !

En effet, à leur arrivée, Jonathan était juché sur les épaules d’Albert et leur complicité ne faisait aucun doute. Le petit garçon confirma d’ailleurs.

- Oh ! Oui papa ! Je suis bien content d’avoir plein d’amis ! On a vu plein d’oiseaux à Central Park et tonton Albert sait tous leurs noms !

- Vous êtes ornithologue peut-être ? Fit donc James en souriant.

- Non, je ne crois pas James. J’aime les animaux c’est vrai, même sans apprendre de Candy que j’avais travaillé dans un zoo à Londres et été en Afrique dans une réserve animalière, c’est une évidence pour moi d’aimer m’occuper d’eux mais juste en amateur je crois.

- De toute façon, quand on aime autant la nature et les animaux, on ne peut qu’être quelqu’un de généreux et sensible au moins!

- Oui, j’espère ! Répondit Albert en trouvant sa déduction logique.

James invita ensuite ses nouveaux amis à boire avec lui le thé de dix-sept heures même s’il était un tout petit peu plus tard. Son origine britannique ressortait en ce rituel autant que son accent charmant. Candy apprécia vite sa conversation, son flegme, son élégance, lui rappelant Londres et compara dans sa tête avec Terry qui avait aussi un léger accent anglais quand il parlait mais qui savait le camoufler et prendre d’autres accents tel le yankee, quand il le voulait.

Après quelques échanges verbaux encore chaleureux entre ce petit groupe, James pensa à aller se préparer pour cette soirée au théâtre en commençant par un bon bain pour se délasser de son voyage depuis Washington. Kate pensa à préparer le dîner de Jonathan en attendant la nounou qui le garderait et Albert et Candy remontèrent dans leur appartement pour se préparer aussi. Candy était déjà habillée et coiffée mais comme toute jeune fille pour son premier vrai rendez-vous amoureux face au public, voulait être vraiment au mieux d’elle même et trouvait des imperfections partout en se regardant dans le miroir. Elle haussa les épaules tout de même au bout d’une bonne demie heure en décidant enfin qu’elle était prête car elle ne voyait plus comment faire mieux.

Elle sortit donc de sa chambre et rejoint Albert qui avait revêtu son costume noir acheté à Chicago exprès et qui bien que simple, lui donnait une allure élégante et distinguée naturelle.
Candy vint juste lui ajuster sa cravate bleue roi et se permit de le complimenter.

- Vous êtes vraiment très beau Albert ! Je crois que Karen va le trouver aussi !

- Pourquoi dites-vous ça Candy ? Karen ne voit en moi qu’un ami et doit bien se ficher de ce que je porte !

Candy rougit un peu en regrettant d’avoir perdu une occasion de se taire en lançant cette réflexion mais la façon si vive d’Albert de lui répondre et le léger rose sur ses joues lui parut bien une preuve que Karen ne le laissait pas indifférent. Mais elle n’insista pas.

- C’était juste pour dire que vous êtes élégant et que Karen ou Kate ou toute autre femme le verra aussi !

Albert sourit alors en reprenant son air flegmatique habituel.

- Alors merci Candy. Inutile que je vous redise comme vous êtes resplendissante mais… vous avez oublié de mettre votre bague de fiançailles je crois !

- Non Albert, je voudrais plutôt la mettre par dessus mon gant et je n’allais donc les enfiler qu’au dernier moment.

- Vous devrez les garder toute la soirée si vous faites ça Candy !

- Ah ! C’est vrai, je n’avais pas pensé à ça, ce sera embêtant car je pourrai la perdre si je dois l’ôter aux toilettes ! Heureusement que vous êtes plus prévoyant que moi Albert ! Je vais suivre votre avis et remettre ma bague sous le magnifique gant que vous m’avez offert, ça vaut mieux ! Et de toute façon, je n’ai pas besoin que tout le monde la voit pour savoir que je suis la vraie Juliette de mon merveilleux Roméo et comme je suis privilégiée !

Albert sourit de cette si juste remarque, elle n’avait pas de souci à se faire sur cette évidence. Terry ne risquait pas d’oublier sa vraie Juliette ce soir et il valait mieux ne pas trop montrer aux admiratrices comme elles n’avaient rien à espérer d’autre que professionnel de leur Roméo.


Ils partirent tous deux pour le théâtre Stratford à dix-neuf heures dans la voiture de Terry, James et Kate iraient un peu plus tard avec la leur. La représentation avait lieu à vingt heures mais Candy voulait acheter deux gros bouquets de fleurs chez un fleuriste, un pour Terry et un pour Karen.


A peine arrivés au théâtre, Candy et Albert évitèrent la queue devant l’entrée principale car Terry avait œuvré pour que le gardien de l’entrée des artistes les laisse passer. Ainsi ils purent aussi voir les coulisses mais restèrent discrets et ne voulurent qu’offrir leurs bouquets au couple d’acteurs vedettes. Albert partit donc frapper à la porte de la loge de Karen pendant que Candy faisait pareil avec celle de Terry.

En l’entendant hurler :

- Si c’est encore des fleurs, donnez-les au personnel ! Candy rit puis cria aussi très fort :

- Très bien monsieur Grandchester !

Puis, en entendant derrière la porte un juron et une cavalcade, elle recula très vite. Terry ouvrit la porte, vit le bouquet à terre et sa Juliette, sublime, éblouissante, magnifique, étincelante, resplendissante, si belle qu’aucun adjectif ne pouvait la décrire. Il resta sans voix, en contemplation, béat, hypnotisé. Elle lui sourit en reculant et lui envoya des baisers en les soufflant vers lui. Il ne sut réagir encore mais comme elle avait décidé de ne pas rester, il comprit que c’était mieux pour sa concentration de rester sur une si belle mais inaccessible image. Il ramassa alors le bouquet sans cesser de la regarder. Elle fit encore quelques pas à reculons en lui offrant son plus beau sourire puis se retourna et repartit vers la loge de Karen à l’autre bout du couloir. Albert n’était pas dans les parages, elle supposa qu’il était dans la loge de Karen alors elle partit vers la sortie menant au hall d’entrée pour l’attendre.

Terry, une fois remis de son émotion, retourna dans sa loge pour mettre son beau bouquet composé dans un vase. Il aperçut alors une petite carte au milieu des fleurs et la lut avec un grand bonheur.

« Mille baisers à mon étoile filante, mon Roméo, mon Terry que j’aime pour l’éternité. Tu seras le plus beau et grand Roméo qui ait existé mon étoile et ta Taches de son, ta Candy est la plus fière et heureuse du monde d’être ta vraie Juliette ! A tout à l’heure mon immense amour ! »

***



Candy attendait Albert dans le hall d’entrée du théâtre en regardant toutes les photos d’acteurs shakespeariens ayant joué ici, affichées sur un grand tableau. Elle reconnut Eléonore Baker et songea qu’elle avait oublié de demander à Terry si elle serait aussi aux deux premiers rangs ou avait préféré prendre une loge pour plus de discrétion. Bien que le secret qu’elle soit la mère de Terry soit éventé dans le milieu du théâtre, Terry lui avait dit qu’il préférait comme elle, ne pas étaler devant le public, leur lien de parenté. Il était prévu pour Candy d’aller demain la rencontrer chez elle avec Terry pour déjeuner mais la jeune fille espérait la voir ou au moins l’apercevoir ce soir. Elle scruta donc chaque nouvel entrant du théâtre et grimaça lorsque son regard aperçut une chevelure rousse et un visage pointu qu’elle connaissait hélas trop bien.

« Elisa ! »

Candy aperçut ensuite Daniel derrière elle qui semblait guère content d’être ici mais qui lorgna ensuite une fille d’environ dix-huit ans au décolleté généreux. Candy espéra qu’ils ne la verraient pas et rasa le mur pour s’éloigner vers les toilettes mais alors qu’elle allait y entrer, elle se retrouva nez à nez avec une très belle femme brune avec le même regard bleu roi de Terry.

- Oh ! Madame Bak…

Celle-ci la regarda alors d’un sourire discret mais malicieux et mit son doigt devant ses lèvres, ce qui arrêta donc l’élan de Candy de la nommer. Elles restèrent toutes deux quelques secondes à s’observer puis Candy la laissa passer. Mais Eléonore lui dit tout de même discrètement avant de partir :

- Juliette risque de rendre Roméo très envié ce soir !

Candy rougit un peu mais le clin d’œil et le sourire bienveillant d’Eléonore Baker fut pour elle aussi un soulagement pour demain d’être acceptée comme future belle-fille. Mais pour l’instant, elle constata qu’Elisa et Daniel étaient toujours à l’entrée et elle se demanda bien pourquoi mais le comprit une seconde après en voyant le visage méprisant de Sarah Legrand, la mère d’Elisa et Daniel, pénétrer aussi dans le théâtre. Candy la vit ne pas s’arrêter devant ses deux rejetons et continuer vers les toilettes, donc vers elle, ce qui l’affola.

« Zut ! »

Elle s’engouffra alors dans les toilettes des dames puis dans un des trois cabinets fermant de l’intérieur par une targette. Elle entendit bientôt quelqu’un entrer puis s’installer dans le cabinet à la gauche du sien. Elle attendit donc que madame Legrand fasse ce qu’elle avait à faire mais des bruits incongrus la perturbèrent un peu. Elle dut mettre sa main devant la bouche pour s’empêcher de rire lorsqu’un bruit de vent accompagné d’un toussotement pour le camoufler, se fit entendre. Heureusement celui de la chasse d’eau suivit et quand enfin, Candy entendit la porte s’ouvrir et le pas de la « dame » s’éloigner, elle put reprendre sa respiration normalement. Elle attendit encore de ne plus entendre le bruit de l’eau puis du couinement de la porte principale et souleva la targette et jeta un œil discret. La voie sembla libre, elle fila vers la sortie et entrouvrit encore doucement pour voir si Sarah était encore par ici. Elle ne la vit pas alors, elle sortit franchement et retourna vers l’entrée des coulisses pour chercher Albert.

Elle ne le trouva pas encore et repartit à nouveau vers le hall où il devait sûrement la chercher aussi. Mais en voyant Daniel toujours planté à côté de la fille au décolleté généreux, elle fit encore la grimace. Elle voulut faire demi tour à nouveau mais se retrouva cette fois face à Elisa qui la foudroya du regard en la reconnaissant.

- Candy !

- Bonjour Elisa ! Je vois que tu es enchantée de me voir !

- Si tu crois que je vais te laisser te pavaner ici alors que tu n’as même pas l’autorisation du grand oncle William pour y être, tu ne me connais pas encore Candy !

- Je crois que je te connais beaucoup trop Elisa ! Mais tu ne me fais toujours pas peur avec tes menaces ridicules ! Que comptes-tu faire pour m’empêcher de rester ici et voir la pièce peut-être ? J’y suis, j’y reste ! Allez, bonne soirée quand même !

Et elle lui passa devant mais Elisa, furieuse, lui arracha un des nœuds rouge sur sa manche ballon droite. Candy, surprise et en colère, se retourna et lui asséna une claque sur la joue. Elisa se mit alors à crier après son frère pour qu’il vienne la défendre.

- Daniel ! Viens à mon aide bon sang !

Celui-ci n’était qu’à cinq mètres mais toujours le nez sur le décolleté de sa voisine qui justement, en eut assez de son insistance et lui asséna aussi une gifle. Candy éclata alors de rire.

- Je crois que ton frère a récolté lui aussi ce qu’il a semé Elisa ! On voit bien que vous êtes jumeaux ainsi !

Elisa était rouge mais n’osa plus répliquer vu l’air si sûr de Candy et préféra attendre un meilleur moment pour se venger de cette insupportable fille.

Candy fila cette fois vers la salle de théâtre car elle en avait assez de croiser ces individus et se dit qu’Albert l’attendait peut-être là-bas.
Hélas, elle se trouva sur la trajectoire de Sarah Legrand qui la regarda avec colère et lui cria :

- Candy ! Comment as-tu pu entrer dans ce théâtre et où as-tu pris cette robe de haute couture, tu n’as pas les moyens de payer pareille splendeur ?

Candy sourit sur cette accusation cachant sans le vouloir un compliment.

- Je suis entrée parce que j’ai un billet d’entrée madame Legrand ! Quand à cette splendeur de robe, comme vous dîtes, je n’ai pas les moyens financiers de l’acheter, peut-être mais j’ai la chance d’avoir les moyens amicaux et manuels grâce à mes amis qui m’ont aidés à la coudre !

Si on devait qualifier l’expression de Sarah Legrand après avoir entendu l’explication de Candy, le meilleur qualificatif serait sans doute : stupide. Elle ne sut que répondre et n’empêcha pas la jeune fille de lui passer devant malgré Elisa qui accourait pour lui dire :

- Maman ! Demande à ce qu’on fasse expulser cette souillon du théâtre ! Je suis sûre qu’elle a du voler son billet et sa robe !

Comme sa mère ne réagissait pas, Elisa lui secoua le bras mais Sarah se mit à fixer devant elle en arborant un nouveau visage, la stupeur. Elisa regarda dans la même direction et ne vit que des gens inconnus pour elle.

- Maman ? Que t’arrive-t-il ?

- Ce n’est pas possible !

- Quoi donc maman ?

Sarah sembla alors émerger et posa sa main sur l’épaule de sa fille.

- Oublie Candy ma chérie, si elle a volé son billet, elle se fera bien expulser tôt ou tard !

- Mais maman !

Sarah sembla encore ailleurs mais la sonnerie annonçant qu’il fallait que les spectateurs aillent s’asseoir dans la salle, retentit. Elle se reprit donc et entraîna sa fille en lui demandant :

- Où est ton frère ma chérie ?

- Heu… Il était vers la porte d’entrée tout à l’heure !

Sarah retourna donc à l’entrée avec Elisa mais son fils n’y était pas.

- Nous allons rater le début de la pièce ! Où est-il passé ? Bon, tant pis, viens Elisa, ton frère trouvera bien sa place tout seul. Il est peut-être d’ailleurs déjà dans la salle !

***



Daniel était en fait parti aux toilettes après la gifle qu’il avait reçue. Il se bassina la joue d’eau fraîche car elle était rouge puis il s’enferma dans un cabinet pour se soulager. Lorsqu’il poussa la targette pour en sortir, elle resta coincée, il eut beau tirer, impossible d’ouvrir la porte. Puis il se mit à crier « au secours » mais personne ne vint le délivrer après cinq minutes. Alors il essaya d’escalader la porte, vu qu’elle laissait un espace important en hauteur. Il monta sur le rebord du siège de toilette mais glissa et mit un pied dedans. Puis il eut du mal à se hisser à la force des bras jusqu’en haut de la porte mais une fois enfin atteint le sommet, il se jucha et se laissa glisser de l’autre côté mais s’étala comme un sac de pommes de terre au sol. Il se releva en pleurnichant, il avait mal aux fesses et aux coudes, avait une chaussure et le bas de son pantalon blanc trempé. Il partit ensuite à la recherche de sa mère et de sa sœur.

***



Candy était partie vers la salle du théâtre et lorsque la sonnerie retentit, elle soupira de n’avoir toujours pas retrouvé Albert. Mais au moment où elle allait donner son billet d’entrée à l’homme posté derrière la porte, une main se posa sur son épaule, c’était James dans un élégant smoking noir et Kate était à ses côté, superbe dans sa longue robe de satin rouge.

- Nous avons failli arriver en retard, la voiture nous a fait faux bond mais un fiacre passait heureusement au bon moment. Où est Albert ?

- Justement, je me le demande aussi, je l’ai perdu depuis qu’il a été offrir le bouquet de Karen.

- Il a du perdre la notion du temps j’imagine ! Fit Kate d’un sourire complice à Candy. Je suppose qu’il trouvera bien sa place tout seul, allons nous asseoir en l’attendant.

Candy chercha encore à l’apercevoir mais en voyant s’approcher seulement Sarah et Elisa Legrand, elle approuva la suggestion de Kate.

***



Sarah vit Candy vers l’entrée de la salle avec un couple qui lui sembla bien trop comme il faut pour oser aller encore la menacer de la faire jeter dehors. Et elle se sentit à nouveau fébrile en voyant un homme la dépasser. Elle le regarda, le souffle suspendu et lorsqu’il tourna la tête et croisa une seconde son regard, elle pâlit. Il n’y avait pas de doute, c’était bien lui et le pire c’est qu’il s’arrêta aussi près de Candy et elle lui sourit de façon si généreuse qui faisait penser qu’ils se connaissaient bien tous les deux.

- Maman ! Fit Elisa en voyant encore sa mère statufiée. Daniel vient d’arriver !

Sarah tourna alors la tête et vit Daniel qui marchait en faisant un bruit bizarre du pied gauche. Elle découvrit alors que le bas de son pantalon blanc était mouillé et un peu jaunâtre et il avait la joue rouge et une mine de déterré.

- Qu’est-ce que tu as fabriqué pour être dans un tel état mon fils ? S’exclama-t-elle horrifiée.

- J’étais enfermé dans les toilettes ! J’ai du passer par en dessus et j’ai glissé ! J’ai mal maman ! Pleurnicha-t-il en sentant ses fesses de plus en plus douloureuses.

Sarah se sentait anéantie. Son fils lui faisait honte, il accumulait les bêtises en ce moment et l’idée d’entrer dans cette salle avec Daniel alors que Candy se pavanait dans une magnifique robe avec des gens important et avec lui ! Non, c’était trop pour ce soir !

- Nous partons les enfants ! Nous ne pouvons pas rester ici !

- Mais maman ! Geint Elisa. Je veux voir la pièce ! Je veux voir Terry !

- Une autre fois chérie, ton frère n’est pas en état de rester et moi je me sens un peu fatiguée aussi.

- Oh ! Maman s’il te plait ! Laisse-moi au moins la voir ! Je peux rester seule tu sais !

- Pas question Elisa ! Tu rentres avec nous ! C’est un ordre !

Elisa baissa la tête pour cacher sa rage. Au loin, elle vit Candy dans sa robe de princesse et sa haine grandit encore. Elle obéit pourtant à sa mère mais dès qu’elle put, elle donna un coup de pied aux fesses de son frère en marmonnant :

- Tout ça c’est de ta faute Neil ! Tu me le paieras aussi !

Daniel gémit mais préféra se faire discret vu l’ambiance entre sa mère et sa sœur et tous trois quittèrent le théâtre sans avoir vu la pièce.

***



Albert venait de rejoindre Candy et le couple Barrett et il expliqua qu’il avait été long car Karen avait eu un gros trac et ne voulait pas rester seule, ils avaient donc discuté. Personne ne fit de remarque et ils allèrent tous quatre s’installer à leurs places.
Candy et Albert étaient au milieu du deuxième rang mais Karen et James avaient deux sièges au sixième rang, ils durent donc se séparer.
Quand le rideau se leva enfin, Candy ne quitta plus la scène des yeux, attendant son Roméo. Et lorsqu’il s’avança pour sa première réplique, plus rien n’exista d’autre que Roméo et ce qu’il vivait dans la pièce, qu’il rendait si véritable et bouleversant. Il était si doué comme acteur, il avait une présence incontestable, un timbre envoûtant, une telle conviction dans sa voix chaude et profonde qui en imposait au public car il applaudit déjà très fort quand vint l’entracte à la fin de l’acte III.

***



Susanna Marlowe était aussi dans la salle et regardait Terry et Karen Kliss jouer les scènes d’amour en ressentant en elle une immense haine. C’était elle qui aurait du les jouer, être Juliette et se faire applaudir au lieu de cette rousse prétentieuse. Tout ça c’était de la faute de Terry qui n’avait pas voulu d’elle, de Candy qui avait réussi à le subjuguer, de Robert Hattaway qui l’avait chassée comme une malpropre et aussi d’ Elisa Legrand qui lui avait dit qu’il fallait oser pour plaire à Terry alors que ce conseil lui avait fait tout perdre.

Quand l’entracte arriva, elle quitta son troisième balcon, son poulailler, pour redescendre et vit Candy et trois autres personnes l’entourant. Elle pâlit en voyant sa belle robe, sa coiffure raffinée et son sourire si fier et heureux alors qu’elle discutait avec ces gens.
Susanna sentit encore plus de colère face à ce tableau et avait envie d’aller griffer de ses ongles ce visage dégoulinant de bonheur. Elle l’aurait peut-être fait si Candy avait été seule mais elle avait encore assez de lucidité pour se retenir. Encore mais à peine car une autre idée s’installa dans son esprit, celle d’attendre la fin de la pièce et de trouver l’occasion de se venger de cette sainte nitouche et ainsi de faire souffrir Terry comme il l’avait fait souffrir.
Quand la cloche de la reprise tinta, elle attendit un peu pour remonter au poulailler. Bien que son déguisement soit réussi, elle se montra prudente et patiente.

***



Elisa avait encore l’espoir de se venger bientôt de Candy quand sa mère la laissa dans sa chambre d’hôtel pour gagner la sienne. Elle attendit un peu puis sortit afin d’aller dans la chambre de son frère qu’elle trouva dans la salle de bain à se brosser les dents et qui prit un air inquiet en la voyant le regard menaçant. Mais Elisa sourit de sa façon cruelle et lui dit les bras croisés :

- Je veux bien pardonner tes stupidités qui m’ont fait louper la pièce Neil, mais à condition que tu fasses ce que je vais te dire sans broncher !

- Et que veux-tu que je fasse ?

- C’est simple, à notre retour à Chicago, tu vas convaincre maman et grand-tante Elroy que tu dois épouser Candy pour garder la fortune des André dans la famille puisqu’ oncle William l’a adoptée. Il ne faut pas qu’elle épouse Terry, tu m’entends ?

- Mais je n’ai pas envie d’épouser Candy, Elisa !

- Peu importe Neil ! Tu dois dire à maman que tu es amoureux de Candy et que tu préfèrerais partir sur le front français que de ne pas pouvoir l’épouser !

- Hein ! Sur le front ! Ca ne risque pas que j’aille là-bas !

- Ca je m’en doute, peureux comme tu es ! Mais ça n’a pas d’importance, tu n’auras pas à y aller puisque tu vas trouver comment persuader maman et grand tante Elroy que tu l’aimes à la folie !

Daniel fit la moue en se demandant comment on pouvait tomber amoureux à la folie de cette fille d’écurie ! Mais le regard menaçant de sa sœur l’empêcha de protester davantage. Il hocha la tête puis espéra qu’une fois retournés à Chicago, sa sœur ait oublié cette idée saugrenue ou que Candy ne revienne jamais là bas et épouse son acteur dès demain ici.
Mais un peu après, il revit dans sa tête la silhouette de Candy qu’il avait aperçue tout de même un peu au théâtre et se dit qu’elle était tout de même devenue bien jolie pour une fille d’écurie !

***


Au théâtre Stratford, la deuxième partie de la pièce se déroulait dans un silence respectueux du public. Les acteurs étaient parfaits et Terry semblait bien séduire toute la salle, pas que Candy qui passait par une myriade d’émotions fortes. A chaque fois que Roméo évoquait à Juliette son amour, elle sentait qu’il s’adressait juste à elle et elle était si fière et émue de cet honneur. Karen jouait aussi très bien Juliette, le couple était crédible mais Candy se dit souvent qu’elle aurait peut-être moins apprécié la pièce si Susanna était sur scène, depuis qu’elle savait de quoi elle était faite et par souci du bien être de Terry. L’amitié des acteurs rendait à leur couple d’amoureux toute la complicité nécessaire pour renforcer leur talent et leur jeu. Et lorsque la mort des amants conclut leur amour, toute l’émotion déversée la rendit encore plus certaine que Terry laisserait son nom et son image longtemps aussi sur le mur du hall du théâtre mais surtout dans les mémoires des spectateurs.

La salle applaudit fort, le rideau se baissa puis se releva trois fois, c’était une ovation et un succès pour tous. Robert Hattaway, qui jouait monsieur Montaigu, devait être très content car il fit un retour encore sur scène après le dernier rappel pour annoncer une tournée en début d’année prochaine et une idée de nouvelle pièce très bientôt avec ses acteurs prodiges.

Candy fut folle de joie d’entendre que Terry avait déjà plein de projets prévus et peut-être que ça signifiait aussi qu’elle allait vite le revoir à Chicago après les fêtes de fin d’année.

***



Au dernier étage, Susanna fulminait à nouveau sa rage et sa haine face à un tel succès sans elle. Elle maudissait encore plus son stupide béguin pour Terry qui lui avait fait tout perdre. Elle avait espéré que Karen soit mauvaise, se plante dans son texte, ait un trou de mémoire mais non, elle avait tout réussi et Terry avait été encore meilleur qu’aux répétitions. Robert annonçait déjà une tournée et un nouveau projet, signe de sa grande confiance en sa troupe et forcément surtout en Terry et Karen.

Elle se mit à pleurer, sa colère se transforma d’un coup en désespoir, sa haine pour ceux qu’elle accusait une minute plus tôt, dévia pour elle même. Elle avait tout perdu juste parce qu’elle avait voulu être autant Juliette dans la vie que sur scène. Et cet amour qu’elle avait éprouvé pour Terry n’était bien qu’un désir physique, un phantasme et un défi vu son inaccessibilité depuis le début. Maintenant, elle n’avait plus de rêves, de désirs car même sa mère l’avait reniée. Elle se souvint de la scène vécue entre elles hier, après tous ces jours sans sortir et ce médecin qui l’avait harcelée de questions puis avait décidé qu’elle vivait un dédoublement de personnalité et qu’un séjour en hôpital psychiatrique un mois ou deux devrait guérir facilement. Madame Marlowe avait fini par croire ce médecin et avait voulu la convaincre aussi qu’après être guérie, elle pourrait facilement revenir au théâtre et devenir la grande actrice qu’elle rêvait pour sa fille depuis qu’elle même avait échoué dans cette voie. Susanna lui avait alors dit qu’elle n’avait plus envie d’être actrice, que c’était son rêve à elle et pas vraiment le sien en fait car elle ne savait pas jouer bien si elle ne se projetait pas dans le rôle et vu le désastre que ça donnait ! C’était la chose à ne pas dire à cette mère qui l’avait poussée à réussir ce qu’elle avait raté. Elle la traita alors de fille indigne puis lui dit qu’elle serait actrice ou finirait à la rue et n’aurait qu’à vendre son corps pour vivre vu qu’elle semblait aussi avoir le feu aux fesses ! Susanna avait alors décidé de partir et d’aller demander à sa tante Marjorie de Philadelphie de l’accueillir mais auparavant, elle n’avait pu se retenir de voir la première de Roméo et Juliette. Et comme elle n’avait pas de billet d’entrée et se savait interdite dans ce théâtre, elle portait une perruque brune et une robe volées chez le costumier du théâtre et s’était glissée par les coulisses jusqu’au troisième balcon, le poulailler, vide ce soir.

Elle s’essuya les joues avec son mouchoir puis décida de grimper sur le toit du théâtre comme Terry aimait si souvent le faire pour penser à Candy. Elle se rendit compte à ce moment qu’elle ne ressentait plus de jalousie pour elle ni l’envie de lui faire du mal.

Une fois qu’elle eut grimpé l’échelle menant au toit, sans rencontrer personne, elle fut surprise par le vent mordant et des flocons de neige voletant dans le ciel laiteux. Elle gagna le bord et regarda en bas en se disant qu’il serait peut-être mieux de disparaître à jamais du monde. Elle s’imagina alors se laisser tomber puis être emportée par le vent et telle Dorothy dans le magicien d’Oz, voler dans la tornade jusqu’à un pays où elle pourrait trouver son vrai chemin et rencontrer un garçon qui l’aimerait pour elle sans vouloir seulement son corps comme Andy Shepperd. C’était vrai qu’elle n’était plus vierge comme l’avait accusé Robert Hattaway mais elle avait cru au baratin de cet acteur et ne lui avait offert son corps que par béguin et parce qu’il lui avait dit que c’était mieux d’être un vrai couple pour jouer leurs futurs rôles vu qu’il visait les premiers. Et elle avait refait elle même cette erreur avec Terry mais lui n’avait pas voulu de son corps. Candy avait bien de la chance mais Susanna reconnaissait maintenant que Candy était aussi une fille bien différente de toutes celles qu’elle avait connu ici, Candy était un ange. Alors elle leur souhaita en fin de compte d’être toujours heureux puis enjamba le rebord du toit et sourit au ciel enneigé avant de sauter.

- Non ! Ne faites pas ça !

Elle se retourna, vit un homme se précipiter vers elle et lui tendre la main. Il avait des yeux si inquiets et clairs, qu’elle lui dit en souriant :

- N’ayez pas peur, je veux juste partir pour le pays d’Oz, pas mourir !

- Le pays d’Oz ? Je ne sais pas où c’est mais je ne pense pas qu’il soit derrière ce toit mademoiselle !

- Vous croyez ? Pourtant le vent souffle, il m’emportera sûrement jusque là !

- Non car il ne souffle pas assez fort ! Venez avec moi mademoiselle, je connais quelqu’un qui pourra nous dire où est le pays d’Oz !

- C’est vrai ? Alors je vous suis, monsieur ! Monsieur comment au fait ?

- Martinelli ! Tony Martinelli ! Mais vous pouvez dire juste Tony, mademoiselle Marlowe.

- Vous m’avez reconnue ?

- Oui mademoiselle, je vous ai vue bien souvent pour vous reconnaître, je travaille dans ce théâtre depuis trois ans comme machiniste.

- Ah ! Pourquoi ne vous ai-je pas vu avant ?

- Parce qu’une jeune actrice comme vous ne regarde pas tous ceux qui sont dans l’ombre mademoiselle !

- C’est vrai mais c’est bien dommage car vous avez de beaux yeux verts et vous êtes gentil !
Vous êtes marié monsieur Tony ?

- Non mademoiselle.

- Et vous avez une petite amie ?

- Non plus.

- Ah ! Et qui pourra me dire où est le pays d’Oz monsieur Tony ?

- Ma grand-mère pourra vous le dire car elle connaît des tas de pays, elle est italienne et a beaucoup voyagé avec mon grand-père.

- Oh ! L’Italie ! Comme Roméo et Juliette ! D’accord monsieur Tony, allons demander à votre grand-mère où est le pays d’Oz alors !

Il l’emmena par la main, il ne pensait pas qu’elle était folle mais qu’elle avait besoin d’être écoutée et aimée pour elle-même. Et il était amoureux d’elle depuis qu’il l’avait vue la première fois.


A suivre

gmo9st17



Edited by Diogène - 27/2/2015, 14:01
 
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Bonjour à tous, j'ai mis du temps à trouver l'inspiration pour la suite de cette fic, j'ai posté le chapitre 7 il y a quelques jours sur le forum candyterrygeorgie.forumfree.it, je le poste ici aussi pour Nahoko qui le réclame et que je n'oublie pas, merci ma belle de revenir me lire, voici la suite, j'essaie de poursuivre et terminer cette histoire dès que l'inspiration est là mais tu peux lire mes autres fics sur le forum cité plus haut! :D


Chapitre 7

Les jours les plus doux




Une fois le rideau baissé définitivement, Terry se précipita dans sa loge pour se changer. Karen en fit autant, pressée aussi de revoir Albert pour connaître son sentiment. Il lui plaisait de plus en plus, il savait si bien lui dire et faire ce qu’il fallait pour calmer son trac et l’emmener dans d’autres contrées. Elle n’avait jusqu’à présent pas rencontré d’homme comme lui, qui malgré son amnésie semblait aussi à l’aise avec une moufette, une cuisine, un massage des pieds, le théâtre, une tenue de baroudeur ou un costume trois pièces, les bonnes manières ou la liberté nonchalante. Il semblait pouvoir tout comprendre et expliquer, hormis son passé mais elle faisait confiance à Terry et Candy qui ne doutaient jamais de lui non plus. De toutes façons, elle qui se méfiait facilement, se sentait en confiance avec lui depuis le début. Comme Terry, elle avait envie maintenant de relations vraies et confiantes et avec ces trois là, elle se sentait bien entourée. Une fois vêtue de sa robe longue pourpre assortie à ses cheveux auburn qu’elle avait tressé en une natte épaisse sur le côté, ornée en plus d’un ruban couleur or emmêlé dedans, elle se parfuma d’un soupçon de senteur d’orchidée puis satisfaite, se précipita dans le couloir et y trouva Albert qui lui sourit et lui dit que Candy venait d’entrer dans la loge de Terry pour le féliciter. Elle rosit ensuite en entendant son sentiment sur la pièce et surtout sur sa prestation de Juliette.

- Vous êtes une très bonne actrice Karen et si Juliette devait être rousse et si belle que vous, c’est pour montrer que la passion est un feu ardent qui consume cœur et corps mais c’est la couleur de la vie, du plaisir et des couchers de soleil d’Afrique mêlant rouge et or aussi bien que vous !

- Oh ! Albert ! C’est le plus beau compliment qu’on m’ait jamais fait ! Mais est-ce que vous vous rappelez vraiment de ce coucher de soleil ?

- Je ne me souviens pas de détails précis mais oui, je suis sûr d’avoir vu un tel coucher de soleil un jour et c’est grâce à vous belle Karen !

- Je suis contente si j’ai pu raviver un brin de votre mémoire alors Albert. Moi aussi j’aimerais un jour contempler un tel coucher de soleil. J’aime tant le soleil, la chaleur, l’Afrique me plairait je crois.

- J’espère pouvoir vous en parler plus réellement bientôt alors et même peut-être vous y emmener mais… sans mémoire…

- Ne vous torturez pas Albert, elle reviendra très vite vu ce début prometteur, venez maintenant, en attendant Terry et Candy, je vais vous montrer la scène de plus près.

***



Dans la loge de Terry, Candy s’éveilla à cet instant de ses bras. Leur baiser avait encore atteint un degré plus puissant d’intensité et de durée et ils étaient essoufflés mais comblés en se détachant mais restant les mains jointes à se contempler et sourire.

- Tu es plus belle que Cendrillon, la belle au bois dormant et Aphrodite réunies ma princesse Juliette des roses chérie !

- Tu es aussi vraiment très beau et élégant dans ce costume trois pièces noir et bordeaux mon Roméo chéri ! Qu’est-ce que j’ai de la chance, qu’est-ce que je suis heureuse et fière de toi mon amour! Tu es vraiment prêt pour devenir le plus grand acteur du siècle et du monde !

- Tu exagères mais je suis fier de moi tout de même puisque je t’ai convaincu toi, ma plus belle admiratrice. Mais ça suffit pour les compliments, passons maintenant à notre soirée amoureuse, je veux que tu t’amuses et ais un maximum de bons souvenirs pour que notre prochaine séparation soit le moins pénible encore. Allons maintenant saluer Albert, James et Kate avant de nous éclipser ma Cendrillon !

***



Ils retrouvèrent Albert et Karen avec Robert Hattaway qui semblait bien bavard ce soir. Il était si satisfait de ses acteurs qu’il accepta de voir James et Kate un instant.
Quelques minutes après, un technicien ramenait le couple dans les coulisses et ils exprimèrent tout leur plaisir et opinion de la pièce. En apprenant que James travaillait au consulat britannique, Robert lui demanda de saluer le consul qu’il connaissait depuis deux ans, ayant présenté du Shakespeare lors d’une soirée pour le club des amis britanniques de New York. James fut alors ravi de recevoir une invitation pour son supérieur et son épouse pour la représentation de samedi prochain et même pour lui-même et Kate si le cœur leur disait de revenir voir la pièce. Terry était content de voir que sa rencontre avec ce couple si sympathique provoquait encore des circonstances inattendues et agréables. Mais il avait maintenant hâte de pouvoir s’éclipser avec Candy et lorsque Robert lui mit la main sur l’épaule pour lui dire de penser qu’il faudrait partir en tournée en janvier et que celle-ci passerait par Chicago aussi, il réagit en répondant qu’il était heureux de cette nouvelle et devait alors prévenir vite sa mère de ce départ. Candy se retint de lui dire qu’ils ne verraient Eléonore que demain, en voyant le sourire en coin de Karen qui comprit elle, plus vite le petit mensonge de son partenaire. Elle s’engouffra alors dans cette brèche pour ajouter qu’elle avait elle aussi à préparer ce voyage. James comprit aussi que Terry voulait un peu de solitude et serra la main de Robert et souhaita une bonne soirée aux autres. Kate le suivit après ces mêmes salutations et Terry demanda à Albert, pour tendre une perche à Karen, si ça ne le dérangeait pas de rentrer en taxi ou fiacre. Elle la saisit au vol.

- Oh ! je peux vous ramener Albert, ça me ferait plaisir !

- Eh bien!… si vous pensez que ça ne vous retardera pas… pourquoi pas !

- Oh ! ça ne peut me retarder étant donné que je n’ai rien de prévu !

- Ah ! Mais… vous ne comptez pas dîner ?

- Eh bien! si mais je ne suis pas une bonne cuisinière vous savez, je comptais manger dans mon bistrot habituel près de mon studio. Vous voulez m’y accompagner ?

- Ma foi ! Pourquoi pas ! Mais seulement si c’est moi qui vous invite alors !

- Tope là Albert ! Bon, il ne reste plus qu’à vous souhaiter une bonne soirée alors les amoureux! fit-elle en s’adressant maintenant à Terry et Candy

- Mais à vous aussi alors les… amis, répondit Terry en laissant un temps mort exprès entre ces deux derniers termes, par taquinerie.

Candy se contenta de :

- Oui bonne soirée Albert et Karen, à plus tard !

Puis elle dut s’accrocher à la main de Terry qui l’entraîna vers la sortie des artistes mais qui stoppa en voyant le gardien lui faire un signe qu’il y avait des admiratrices qui l’attendaient.

- Zut !

Candy vit sa mine si ennuyée et sut que c’était surtout vis à vis d’elle, alors elle s’adressa au gardien et lui dit :

- Pourriez-vous s’il vous plaît monsieur, aller dire aux admiratrices que Roméo a décidé de sortir par l’entrée du public finalement !

- Heu… oui si monsieur Grandchester est d’accord, je peux aller faire diversion.

- Avec grand plaisir Jules, merci !

Celui-ci sortit donc et cria à la vingtaine d’ admiratrices postées devant la porte que l’acteur se dirigeait vers la sortie principale. Candy entendit alors quelques cris puis une minute après, Jules revint.

- Elles se sont toutes précipitées derrière mais vous devriez vous hâter, elles vont vite revenir en voyant que vous n’y êtes pas !

- Oui Jules, merci vraiment, vous me rendez un fier service !

- Il n’y a pas de quoi, je comprend bien ! dit-il en se sentant un peu intimidé par le beau sourire de Candy qui le remercia aussi avant de partir avec son amoureux.

- Oui merci énormément monsieur Jules, vous êtes bien gentil, bonne soirée !

- Bonne soirée mademoiselle !

Le couple partit alors en courant, Terry tenait fermement la main de Candy qui peinait à le suivre avec ses talons et sa robe longue. Au bout d’une trentaine de mètres, ils bifurquèrent à droite et elle le força à ralentir. Il tourna alors la tête vers elle, vit sa peine et s’arrêta.

- Ouf ! Je croyais que tu voulais t’entraîner pour la marathon de New York! (1)

- Tu avais plus d’endurance à Londres, Taches de son ! dit-il alors d’un sourire moqueur.

- Je n’avais pas d’escarpins en ce temps là ! riposta-t-elle en lui tirant la langue et reprenant son souffle.

- C’est vrai mais tu as couru sur le toit pour rejoindre la salle de méditation en robe longue de Juliette !

- Oui mais je n’avais pas le choix, je ne savais pas que tu avais déjà pris ma place pour me sauver de la dénonciation d’Elisa.

- Oui j’ai fait ça bien que tu m’aies parlé d’un autre garçon en dansant avec moi !

- Je n’ai pas fait exprès de te rendre jaloux tu sais, je n’imaginais pas que tu me faisais la cour sérieusement.

- Je sais bien, tu étais candide et moi bien maladroit tant tu m’as obsédé depuis notre rencontre sur le Mauritania.

- C’est vrai, dès ce moment là ? Pourtant tu t’es moqué de moi !

- Pour cacher mon trouble ! Tu étais si jolie, tu m’as semblé un ange descendant du ciel pour apaiser ma peine, rendre ma solitude moins lourde, égayer ma vie. Te rends-tu compte Candy, avant toi j’étais mort, incapable de faire confiance aux autres, effrayé de l’avenir, enfermé en moi. Tu sais bien comme j’étais, je me réfugiais de plus en plus dans l’alcool, fréquentant les quartiers sombres de Londres en espérant parfois qu’un coup de couteau bien placé me délivre de mon ennui et ma pauvre vie.

- Oh ! Terry ! Tu ne voulais pas ça ? Non !

- Pas vraiment non, je ne voulais pas mourir, je voulais être aimé et aimer quelqu’un qui ne se moque pas de moi, qui me trouve intéressant. Et mon rêve s’est réalisé, un ange m’a été envoyé du ciel pour me sauver et me rendre heureux ! Et cet ange c’est toi ma Taches de son et jamais je ne te laisserai repartir là-haut ou ailleurs car sans toi je mourrai à nouveau !

- Terry ! Crois-tu que j’aurai jamais envie de partir ? Tu as réalisé mon rêve aussi, même si j’ai su me trouver des amis et ai eu la chance d’avoir deux maman merveilleuses, sans un amour aussi fort et grand, ma vie n’aurait aucun sens ! Je t’aime tellement Terry !

Il la dévora des yeux, bien tenté par un autre baiser mais ils étaient dans la rue, quelques passants les entouraient et puis il perçut quelques voix de femmes derrière le virage, qui le prévint de poursuivre la route jusqu’à sa voiture garée une rue plus loin.

- Partons ma chérie, je suis garé par là, une chance que j’ai pensé qu’il valait mieux ne pas me mettre trop près du théâtre.

Elle mit sa main sur son bras et le suivit donc jusqu’à la voiture. Il lui ouvrit galamment la portière, il la referma en prenant soin de ne pas coincer son grand manteau de laine vert et blanc, puis s’installa au volant.

- Où va-t-on Terry ? fit-elle une fois qu’il eut mis le contact.

- J’ai réservé une table dans un restaurant à l’ouest au bord de l’Hudson, Karen me l’a conseillé, il paraît qu’il est romantique, on y mange de la cuisine italienne dans des petits box séparés décorés de fleurs séchées.

- Ca m’a l’air drôlement romantique ! Oh ! Terry ! Tu es merveilleux !

- Je sais mais tu vaux bien que je le sois ma Juliette idéale !

***



Il était près de vingt-trois heures quand Albert et Karen sortirent du petit bistrot où ils avaient dîné d’une pizza. Ils avaient beaucoup discuté, Karen réalisa en sortant que jamais elle n’avait autant parlé d’elle à un homme et que cet homme l’ait tant écoutée et comprise. En voyant des flocons voleter dans le ciel, elle s’écria :

- Albert, il neige ! Savez-vous que je n’ai vu de la neige pour la première fois qu’il y a trois ans en venant à New York pour prendre des cours de théâtre ! Je n’avais jamais quitté Miami avant et il n’a jamais neigé ! (2)

- En Afrique il a neigé une fois lorsque j’étais à Pretoria et… oui je me souviens que les enfants croyaient que du coton tombait du ciel !

- Albert ! C’est un vrai souvenir ça !

- Oui, il me semble bien que c’en est un mais je ne me souviens plus pourquoi j’y étais !

- Ca ne fait rien, si un souvenir revient déjà, les autres suivront peu à peu !

- Ca semble possible en effet ! Oh ! Vous avez un sacré pouvoir sur moi Karen, après le coucher de soleil, la neige, vous êtes bien mon électrochoc le plus efficace, bien mieux que le marteau en caoutchouc d’Alistair !

Il se mit alors à rire avec éclat, Karen le regarda, admirative puis prise d’un élan, elle mit ses mains autour de son cou, il cessa de rire illico et embrassa sa bouche offerte. Ce fut un baiser maladroit, il se sentit vite mal à l’aise et la repoussa gentiment.

- Je suis désolé Karen, je ne peux pas profiter de votre innocence alors que je ne sais pas encore qui je suis ! En plus nous nous connaissons à peine !

Elle oublia vite sa déception en voyant son air si troublé et coupable et le rassura en mettant sa main sur son bras.

- Je crois que nous nous connaissons assez pour l’essentiel, jamais je n’ai été aussi vite en confiance et charmée par un homme qu’avec vous ! Quand à votre passé, c’est avec moi qu’il reviendra, vous venez de dire que je suis votre électrochoc, vous ne pouvez pas vous enfuir de moi !

- Karen, vous êtes si charmante et troublante, comment pourrais-je m’enfuir, vous m’avez déjà envoûté !

Elle sourit de toutes ses belles quenottes puis leva le menton vers le ciel en essayant d’avaler des flocons. Il rit à nouveau et en fit autant. Il s’amusèrent ainsi un moment puis Karen ouvrit à nouveau la bouche pour dire à Albert :

- Je crois que je vais vous ramener maintenant Albert, bien que je meurs d’envie de vous emmener dans mon studio ! Mais je sais que vous n’accepterez pas, vous me respectez, vous êtes un gentleman, un homme d’honneur et de valeur !

- Karen ! Qu’attendez-vous de moi ?

- Beaucoup trop sans doute ! Peut-être que vous étiez amoureux de quelqu’un avant votre amnésie, même davantage encore !

- Je suis incapable de vous le dire mais… seul ce que j’éprouve maintenant est important je crois !

- Et qu’éprouvez-vous maintenant Albert ?

- Beaucoup trop sans doute !

Elle sourit à nouveau puis redit :

- Venez, je vous reconduis chez Terry, je commence à être fatiguée de toute façon. Demain, vous êtes libre ou vous allez chez Eléonore aussi ?

- J’ai préféré refuser cet honneur, ils n’ont pas besoin de moi, je rencontrerai cette illustre étoile plus tard !

- Alors, vous ne pourrez pas refuser de m’accompagner au zoo, il y en a un à Brooklyn où il y a plein d’espèces de singes africains.

- Une pareille offre ne peut en effet se refuser chère Karen !


***



Terry et Candy sortaient du restaurant presque au même moment où Karen déposait Albert devant chez son hôte. Ils virent les flocons voleter et s’en émerveillèrent pareillement.

- Les premiers flocons de l’année ! Fais un vœu ma chérie ! Tu connais la légende des flocons de neige ?

- Non Terry ! Raconte-la moi !

« Il y a très longtemps, habitaient de petits moutons argentés dans le ciel ! Saint-Pierre les avaient adoptés pour passer le temps ! Il les surnommait flow ou flo ! Cela voulait dire "enfants" car ceux-ci n'arrêtaient pas de courir et de jouer partout.
Ils étaient très doux mais aussi très capricieux. Parfois, ils allaient courir dans le ciel. Mais de petites étoiles restaient accrochées à leur laine. Un jour, Dieu décida d'emmener le froid au monde !
Mais les petits moutons, très capricieux et nécessitant un petit confort chaud et douillet, se mirent à courir dans tous sens sur les nuages ! Si vite que les étoiles se décollèrent de leur laine et tombèrent du ciel !

Dieu était ravi et donna à ces petites étoiles blanches, le nom de flocon (mélange de flow et de moutons). C'est depuis ce jour qu'on peut apercevoir des petits flocons tomber du ciel. »

- Et voici maintenant la légende de la couleur de la neige, Candy !

« Lorsque Dieu créa la neige, il lui intima l’ordre de se procurer une couleur. La neige commença par demander à l’herbe de lui donner un peu de sa couleur. Celle-ci refusa. La neige se dirigea alors vers la rose pour lui emprunter sa belle couleur. Là encore, elle essuya un refus. Elle se tourna vers la violette, puis le tournesol, qui, également, déclinèrent sa demande. Dépitée, la neige s’approcha du perce-neige et lui dit :
«Personne ne veut me donner sa couleur. Toutes les fleurs me renvoient.»
Touché par le sort de la neige, le perce-neige répondit :
«Si tu aimes ma couleur, je la partagerai volontiers avec toi.»
Et depuis ce jour, la neige partage la couleur BLANCHE du perce-neige.
En guise de remerciement, la neige permit à la fleur de passer, la première, sa tête hors de son manteau à l’approche du printemps. »


- Quelles belles légendes ! Tu en connais des histoires mon Terry !

- J’ai passé beaucoup de temps dans les livres tu sais, ça m’a aidé à supporter ma solitude mais c’est surtout un plaisir d’évasion et de culture dont je ne me lasse pas. Tu aimes quoi comme livres Candy ?

- Je n’ai pas lu énormément de livres tu sais mais j’adorais quand Sœur Maria nous lisait les contes de Grimm ou d’Andersen. J’ai beaucoup pleuré avec « la petite fille aux allumettes », quelle injustice de mourir de froid seule le soir de Noël ! Mais à chaque fois que je me sentais triste ensuite, je repensais à elle et je me disais que j’avais beaucoup de chance et pas de vraies raisons de me plaindre.

- Tu es merveilleuse Candy, tu penses toujours à qui vit plus grands malheurs que toi ! C’est vrai que souvent on pense à ceux qui ont plus de chance que nous et ça nous rend égoïste et capricieux. Tu es un si bel exemple ma chérie, ne change jamais, tu auras sûrement plus tard plein de leçons de sagesse à offrir aux plus jeunes… et aux moins jeunes ! (N’est-ce pas !)

***


A minuit, Candy se souvint qu’elle avait oublié d’offrir son cadeau à Terry. Elle venait de se coucher, elle se releva vite, enfila une robe de chambre épaisse, chaussa ses mules et alla fouiller son sac dans l’armoire. Elle défroissa un peu l’emballage rouge décoré d’étoiles puis sortit de sa chambre et alla cogner à la porte de celle de Terry. Comme elle n’entendit pas de bruit ni de réponse, elle frappa un peu plus fort et questionna ni trop fort pour éveiller Albert dans la chambre à côté, ni trop doucement pour être entendue.

- Terry ! Tu dors ?

Elle vit alors la porte s’entrouvrir et la tête de Terry apparaître sans son corps.

- Qu’y a-t-il chérie ?

- Excuse-moi si te t’ai réveillé, j’ai oublié de te donner mon cadeau pour ta première de Roméo ! J’ai perdu la mémoire ce soir !

Il ne put s’empêcher de sourire, attendri par son petit visage mi-honteux, mi-coquin mais ne voulait pas qu’elle voit son lit de camp et tendit le bras vers le paquet sans ouvrir plus la porte. Elle le lui donna.

- Ce n’est pas grave, merci mon amour !

- Tu ne veux pas l’ouvrir ? dit-elle en le voyant immobile, le paquet dans une main, l’autre sur la porte.

- Euh ! si bien sûr !

Il lâcha donc la porte et dénoua le ruban doré puis déchira l’emballage et en sortit une belle écharpe de soie couleur bleu saphir avec de petits motifs en formes d’étoiles blanches.

- Elle est magnifique Candy, merci !

- C’est vrai, elle te plaît ? J’ai hésité avec une bleue unie mais ces étoiles me semblaient tellement faites pour toi mon étoile !

Il sourit, autant ému du cadeau que de ce qu’elle venait de dire spontanément. Il lui posa un baiser sur la joue.

- Je l’adore ma chérie et je t’adore encore bien plus !

-Tu veux bien l’essayer tout de suite pour que je vois ce que ça donne ?

- Euh… oui bien sûr mais…

Elle crut qu’il voulait se débarrasser d’abord de l’emballage pour avoir ses deux mains libres et lui tendit les siennes pour le prendre. Il lui donna l’écharpe, n’ayant pas compris et voyant son air surpris, réalisa sa méprise. Il la reprit alors très vite en échangeant avec l’emballage et l’enroula autour de son cou. Candy sourit en trouvant qu’elle lui allait très bien malgré son pyjama blanc à rayures bleues, elle faisait ressortir le bleu électrique de ses yeux.

- Tu es très beau Terry !

- Merci !

Il ne put s’empêcher de rosir un peu face au regard vert si admiratif alors qu’il se sentait empoté et pas à son avantage en pyjama. Et lorsqu’elle se hissa sur la pointe des pieds pour l’embrasser sur les lèvres, il bascula légèrement en arrière de maladresse et la porte s’ouvrit à moitié pour montrer son petit lit de camp. Elle ne le rata pas et s’exclama :

- Terry ! Tu n’as que ça pour dormir ?

- Je t’assure qu’il est très confortable ! expliqua-t-il aussitôt en la muselant de peur de réveiller Albert car déjà elle avait dit cela d’un ton aigu.

Elle lui enleva sa main devant sa bouche mais se tut puis pénétra dans la chambre et tâta le lit qui émit un grincement. Elle fit la moue mais vint vers lui et lui caressa tendrement la joue en lui disant :

- Je ne peux pas te reprocher d’avoir préféré nous donner les meilleurs couchages Terry, je te reconnais bien là ! Albert serait capable d’exiger ce lit s’il savait, il est habitué à dormir dehors à la belle étoile.

- Je sais. Tu ne lui diras pas ?

- Bien sûr que non. Terry, tu es un amour, je t’aime ! Et tu es très beau avec ce foulard ! Il te plaît vraiment où c’est seulement de la galanterie?

Il sourit puis alla se regarder dans le miroir de l’armoire. Il s’observa puis revint la prendre dans ses bras.

- Il me plaît vraiment Candy, presque autant que toi !

- Même en robe de chambre ?

- Surtout en robe de chambre ma chérie ! Ainsi, j’imagine notre futur, nous serons souvent en tenues de nuit face à face ! Et puis… même moins vêtus !

Elle rougit face à son regard rêveur mais ne le fuit pas. Il glissa sa main sur ses boucles libres, les effleura sans cesser de fixer son visage en souriant en coin. Elle le laissa faire, confiante, le cœur palpitant mais chaud. Il caressa sa chevelure sensuellement quelques minutes, semblant y prendre un grand plaisir, elle écouta elle aussi les sensations ressenties ; c’était comme quand le soleil et la brise s’engouffraient dans ses cheveux, c’était enivrant mais en plus émouvant. Lorsqu’il retira ses doigts, elle regretta que ce soit déjà fini mais il se pencha sur ses lèvres et les toucha des siennes avec délicatesse. Elle ouvrit les siennes pensant qu’il allait s’y engouffrer mais il voulut encore les caresser un peu des siennes tout en mêlant leurs haleines tièdes. L’ivresse grandit, une ondée la traversa et elle comprit à ce moment que le désir et le plaisir étaient un voyage plein de poésie, d’odeurs, de couleurs et de complicité et que ce n’était pas mal de rêver et vouloir vivre ce voyage quand c’était l’amour qui en traçait le chemin.

Mais il jugea que l’expérience était allée assez loin et il termina ce voyage par un baiser léger sur sa joue puis la ramena vers le seuil de sa chambre et lui souhaita une bonne nuit.

- Fais de beaux rêves ma Taches de son !

- Toi aussi Terry ! Rêve aux étoiles !

***



Le lendemain, les jeunes fiancés franchirent la porte de l’hôtel particulier d’Eléonore Baker. La jeune bonne leur avait ouvert et pris leurs manteaux. L’actrice arriva une minute après, vêtue d’une robe longue en velours mauve, les cheveux maintenus en chignon bas et lâche, sans bijoux et maquillage, mais très belle dans sa sobriété et toujours aussi souriante que la veille.

- Mes chers enfants ! Quelle joie de vous voir enfin réunis ! Quel magnifique couple vous faites ! Venez m’embrasser Candy, hier je me suis retenue mais aujourd’hui je ne souffrirais pas de ne pas vous serrer contre moi ma chère enfant !

Candy, émue la laissa l’embrasser sur le front puis la serrer dans ses bras. Puis, elle la remercia, les joues roses.

- Je suis aussi très heureuse de vous revoir madame Baker, merci de votre chaleureux accueil.

- Il est amplement justifié Candy, vous êtes mon rayon de soleil pour la deuxième fois ; deux fois vous avez convaincu mon fils de me donner une nouvelle chance, une fois en Ecosse et à nouveau depuis vos retrouvailles où il a gagné tellement de confiance en lui et en la vie grâce à vous et vos beaux conseils. Mais faites-moi plaisir encore, ne m’appelez plus madame désormais, appelez-moi Eléonore ou… maman ! Puisque vous allez bientôt devenir ma fille par alliance !

Candy rougit cette fois fortement devant la demande de l’actrice, Terry lui sourit puis la poussa aussi.

- Ainsi tu ne pourras plus changer d’avis et m’épouser le plus vite possible, tu n’as pas le choix ma chérie, maman est un nom que tu espérais pouvoir dire un jour non ?

Elle sentit les larmes poindre à ses paupières, il évoquait ces moments en Ecosse où elle lui avait avoué tristement son manque de n’avoir jamais pu appeler quelqu’un maman. Elle hésita pourtant, se sentant si intimidée, mais le regard de Terry était si encourageant. Elle osa revenir à celui d’Eléonore, il était identique à celui de son fils, même teinte et même message bienveillant. Alors, elle inspira et prit le courage de sortir d’elle ce rêve si lointain.

- Je suis tellement heureuse… de pouvoir devenir bientôt votre… fille… maman…merci !

- Et moi d’avoir une fille aussi belle et merveilleuse Candy ! Embrassons-nous encore ma chérie !

Candy se laissa cette fois serrer très fort par l’actrice, son cœur bouleversé de bonheur encore. Terry les regardait, fier de lui comme jamais et se disait qu’en effet, le bonheur ne dépendait que de nous en grande partie ; laisser parler son cœur y conduisait plus vite, le secret pour l’atteindre était dans la sincérité et le courage d’oser et parler.

« Le bonheur est simple, il est dans ton cœur, écoute-le »


****



Le lendemain, Albert reprenait le train pour Chicago. Karen lui avait laissé un souvenir inoubliable mais ils n’avaient pas renouvelé ce baiser si troublant. Il ne savait pas trop ce qu’il éprouvait pour elle, il ne savait qu’une chose, il lui fallait vite retrouver la mémoire pour savoir qui il était et ensuite pouvoir repenser à elle et à éventuellement davantage. Quelques bribes de souvenirs étaient revenus grâce à elle, après le coucher de soleil africain et les flocons de neige, il avait eu des flashs sur une belle femme blonde et un petit garçon dans un jardin plein de roses. Cette femme était peut-être la sienne et ce petit garçon lui ressemblant un peu son fils, si c’était le cas, il ne pourrait offrir à Karen d’autres illusions. Il fallait vite qu’il sache, il avait vu dans sa tête la maison derrière la roseraie, il devait la retrouver au plus vite.

****



Dans ce même train mais en première classe, Sarah Legrand et ses enfants occupaient un compartiment. Elle avait hâte de rentrer à Chicago et d’aller annoncer à sa tante Elroy que son cousin et Candy se fréquentaient et que peut-être, cette adoption était une manigance pour qu’elle vole l’héritage des André, elle était bien capable de tout leur prendre cette petite intrigante sans scrupules.

Elisa pensait aussi encore à Candy, la haine au cœur. Comment cette fille d’écurie avait pu si vite devenir aussi rouée, elle paradait dans sa robe de princesse avec des gens élégants et Terry voulait l’épouser. Qu’est-ce qu’ils lui trouvaient tous à cette fille ? Elle regarda son frère en face, il lui avait dit hier que Candy était devenue jolie et si on ne savait pas qu’elle était orpheline et ancienne domestique, on pouvait se laisser avoir. Mais Terry savait tout cela, pourtant il ne voyait que Candy depuis tout ce temps. Susanna pourtant selon elle plus jolie que Candy avait échoué, il semblait que Candy avait quelque chose de plus pour attirer les garçons ; déjà Anthony avant l’avait dit, Candy était différente des autres. Mais elle ne la laisserait pas triompher plus longtemps, il fallait qu’elle la détruise une bonne fois pour toutes. Elle regarda sa mère assise à sa gauche et tenta :

- Maman, tu vas dire à grand-tante Elroy que Candy salit partout le nom des André n’est-ce pas ?

Sarah sursauta, elle pensait justement à comment convaincre sa tante de faire annuler une bonne fois l’adoption que son stupide cousin avait imposée à la famille.

- Je vais lui dire, rassure-toi ma chérie, cette fille est un vrai danger pour nous, il est temps de s’en rendre compte.

Elisa sourit de sa façon cruelle, ravie d’entendre sa mère motivée à chasser cette fille insupportable. Elle fixa son frère longuement pour qu’il comprenne aussi qu’il avait intérêt à agir intelligemment pour mener à bien ce projet.

Daniel avala sa salive face au regard assassin de sa sœur. Il tourna la tête vers le paysage et se remémora tous ses souvenirs avec Candy, tous les mauvais coups imaginés par sa sœur mais qu’il avait exécuté aussi pour s’amuser. Aujourd’hui Elisa voulait qu’il demande à sa mère et sa grand-tante de l’épouser, leur faire croire qu’il était amoureux d’elle. Serait-ce si difficile d’être convainquant ? En se souvenant comme elle était jolie hier dans sa robe magnifique, les cheveux relevés, il s’avoua que non, il y avait pire comme parti si on s’en tenait qu’au physique. En fait, elle lui plaisait beaucoup depuis le début mais il ne pouvait pas le dire et le montrer. A Londres, lorsqu’il avait demandé à ses deux camarades de l’aider à la coincer pour se moquer d’elle, il n’avait pas résisté à lui soulever la robe pour voir ses jambes, si ce rustre de bâtard d’anglais n’avait pas été caché sur sa branche d’arbre et ne s’était pas mêlé de venir la défendre, il aurait eu envie de l’embrasser. Non, faire croire qu’il était très amoureux d’elle et voulait l’épouser n’était pas si difficile en fait, l’idée de l’avoir comme fiancée lui plaisait bien, il pourrait ainsi l’embrasser et la tripoter un peu et même s’il devait l’épouser, il pourrait toujours divorcer après s’être amusé avec elle, ça se faisait de plus en plus ces temps de divorcer.


***


Pendant que le train et ses occupants étaient en route pour Chicago, Terry et Candy se promenaient au bord du fleuve Hudson et discutaient encore de leurs beaux projets d’avenir ensemble. Ils profitèrent jusqu’au dernier instant de leur bonheur. Lorsque le dernier jour arriva, Terry était déprimé de la laisser repartir, elle aurait pu rester, elle avait son diplôme d’infirmière et Albert pouvait revenir aussi puisqu’il avait retrouvé des bribes de souvenirs près de Karen qui déjà se languissait aussi de lui. Candy invoqua Archibald, Annie, Alistair et Patricia qui l’attendaient. Elle lui rappela qu’Alistair avait accepté de retarder son départ pour la guerre en France jusque là mais elle ne savait pas s’il allait vraiment renoncer. Elle voulait aussi respecter son contrat à l’hôpital Ste Johanna, elle s’était engagée à travailler les jours de Noël et nouvel an et ne pouvait pas trahir sa parole. Elle devait les prévenir au moins un mois avant si elle démissionnait. Et puis, elle rappela à Terry que Robert Hattaway avait décidé d’une tournée prochainement donc c’est lui qui serait absent de New York et il allait même passer par Chicago courant janvier. Il s’inclina donc, elle voulait aussi encore essayer de contacter l’oncle William pour avoir sa permission de se marier le plus vite possible, ils n’étaient pas prêts encore.


La veille au soir, Kate invita le couple à dîner un vrai repas de fête. James était là, Karen avait aussi accepté l’invitation des Barrett. Kate avait vu les choses en grand, il y avait de quoi nourrir une tribu mais elle était un tel cordon bleu que pas un des plats sur la table ne fut boudé. Le gros rosbif aux petits oignons farcis et ses pommes duchesse fut honoré au mieux et le pudding aux châtaignes connut un sort similaire. Karen repartit dans son studio après avoir embrassé Candy et lui avoir promis de bien veiller sur Terry jusqu’à leur escale à Chicago. Une fois retournés dans leur appartement, Candy demanda à Terry de rester toute la nuit près d’elle. Il accepta, il la laissa se préparer pour la nuit puis se coucher dans ses draps de flanelle. Lorsqu’elle l’appela, il vint après avoir revêtu son pyjama et s’allongea près d’elle sous l’édredon mais sur le drap, mettant ainsi une barrière de sécurité dans leur désir de vivre cette nuit en couple dans la chasteté nécessaire encore. Candy posa sa joue sur son cœur, bercée par ses battements réguliers qui l’endormirent rapidement. Terry profita plus longtemps de sa chaleur et des arômes de fleurs émanant de ses cheveux et sa peau. Mais il finit aussi par se laisser emporter dans un sommeil doucereux.


Le lendemain, ils vécurent une nouvelle séparation à la gare, c’était cette fois elle qui était assise dans le train et lui qui ne la quittait pas des yeux, debout sur le quai. Comme celle-ci serait plus brève, un mois et demi environ, chacun la vécut moins tristement mais une fois leurs yeux déliés, le manque dans leur cœur montra encore comme leur bonheur ne pouvait vivre que dans celui de l’autre.

(1) Anachronisme, le premier marathon de New York a eu lieu en 1970

(2) La seule chute de neige enregistrée à Miami a eu lieu en 1977



Fin du chapitre 7

A suivre
 
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view post Posted on 1/10/2016, 15:28
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Chapitre 8


Ombres du passé, lueurs d’avenir



Albert avait repris son travail au zoo. Il était rentré depuis trois jours, aucuns nouveaux souvenirs n’étaient revenus mais l’image de cette belle et grande maison au jardin de roses le hantait toujours. Alistair et Archibald vinrent le voir au zoo ce troisième jour, pour prendre des nouvelles. Il leur raconta le bonheur de Terry et Candy, les Barret, la pièce mais omit volontairement Karen. Il leur parla aussi de cette maison qui le hantait et Alistair lui dit qu’il en connaissait une qui ressemblait à cette description : Lakewood, la demeure familiale de la famille André, du même nom que le village où elle se situait à quelques miles de Chicago. Albert fut surpris et demanda à ses amis où elle se trouvait pour aller la voir. Alistair lui proposa alors tout simplement de l’emmener là-bas demain dans son fourgon aménagé. Albert accepta puis retourna travailler en les laissant repartir.

***



Sarah Legrand se rendit ce matin-là chez sa tante Elroy pour lui raconter ce qu’elle avait vu à New York et ses soupçons sur Candy. Elroy l’écouta sans broncher, l’air grave puis elle se leva, partit méditer face à la fenêtre donnant vue sur son jardin. Sarah attendit patiemment puis quand la vieille femme se retourna et lui donna ses directives, elle resta sans voix.

- Sarah, je t’interdis d’aller déverser tout ce que tu viens de me dire à d’autres oreilles, tu m’entends ? Je te l’interdis !

D’abord abasourdie, Sarah demanda alors timidement :

- Vous ne comptez donc rien faire pour empêcher cette fille de nous spolier de notre fortune ma tante ? Mon cousin est son complice, c’est très clair et ils ont comploté tous les deux pour nous voler notre héritage !

- Et même si c’est le cas Sarah, je te dis de ne rien dire à personne, je m’occupe de cette affaire, c’est clair ?

- Oui ma tante, se soumit la nièce en se disant que vu le regard et le ton de sa parente, il valait mieux obéir.

Une fois sa nièce partie, Elroy alla dans son petit salon téléphoner. Un moment après, elle donna des instructions à son interlocuteur.

- Georges, il a été vu à New York il y a quatre jours avec Candy à la première de Roméo et Juliette ; je crois qu’il est temps qu’il rentre, retrouvez-le et ramenez-le ici ! Oui, Candy aussi puisqu’il semble qu’elle soit à jamais l’héritière des André… hélas !

***



Alistair fut au rendez-vous, accompagné d’Archibald, ils partirent tous trois vers Lakewood. Le portail et son arche de roses fit impression, Albert était certain de l’avoir déjà vu. Alistair suggéra :

- Et si nous allions voir les domestiques, elle n’est habitée que par eux depuis plusieurs mois mais certains comme la cuisinière y vivent depuis très longtemps, elle vous a peut-être déjà vu Albert ?

- Oui, ça ne coûte rien de demander approuva Archibald en sonnant la cloche.

Il dut la faire tintinnabuler encore deux fois avant qu’un domestique vienne. C’était une jeune bonne inconnue aux frères Cornwell, elle leur demanda ce qu’ils voulaient à travers la grille du portail. Alistair lui expliqua la situation mais elle ne voulut pas les faire entrer.

- J’ai pour consigne de ne laisser entrer personne messieurs, madame Elroy appelle pour prévenir si un fournisseur ou autre doit venir mais elle ne m’a jamais dit que ses neveux pouvaient entrer, je suis désolée.

- Nous ne lui avons pas dit que nous venions ici c’est vrai mademoiselle, nous l’ignorions mais nous voudrions seulement parler à la cuisinière, elle travaille ici depuis longtemps et elle peut peut-être nous aider, pourriez-vous lui dire de venir jusqu’ici alors ?

- La cuisinière n’est à son poste que depuis trois mois messieurs, si vous pensiez à madame Davis, l’ancienne cuisinière, elle est en retraite aujourd’hui.

- Oh ! Et vous savez où elle vit ? fit Archibald.

- Je crois qu’elle est partie en Floride chez sa fille.

- En Floride ! Mais… y a-t-il d’autres domestiques ici qui exercent depuis longtemps ?

- Je crois que le plus ancien est le jardinier, il est là depuis deux ans.

- Deux ans seulement ? Il semble que tout le personnel ait été renouvelé, il est vrai qu’après notre départ à Londres, il n’y avait plus personne de la famille qui y vivait, grand-tante Elroy l’ayant quittée après la mort d’Anthony. Nous devrions aller la voir pour lui demander l’autorisation d’entrer dans Lakewood, peut-être qu’en la voyant de près des souvenirs viendront encore ! conclut puis proposa Alistair.

Mais Albert refusa.

- Ne vous donnez pas la peine de déranger votre grand-tante mes amis, je ne pense pas que ce soit utile de voir cette maison, il me semble impossible que j’ai pu y vivre, il doit s’agir d’une autre arche, d’un autre portail et une autre maison. Merci pour vos renseignements mademoiselle, fit-il à la bonne, nous allons vous laisser retourner à votre travail.

Celle-ci salua de la tête à travers le portail puis fit demi-tour.

***



Après avoir raccroché le combiné du téléphone sur les directives de madame Elroy André, Georges réfléchit dans son fauteuil, se demandant pourquoi son protégé était à New York avec Candy sans l’avoir prévenu de son retour d’Afrique ? Oui il devait aller le chercher pour lui transmettre son compte-rendu depuis plus d’un an mais il eut besoin de faire un retour en arrière pour se remémorer cette incroyable histoire, ce secret qui le liait à madame Elroy mais pas pour les mêmes raisons ; lui avait juré de protéger envers et contre tout le fils de son tuteur, elle ne voulait que s’en débarrasser depuis toujours.

Flash-Back…

Georges Johnson était employé à la famille André depuis 20 ans. Le frère d’Elroy : William Henry lui avait payé ses études d’avocat une fois son père décédé, celui-ci étant le directeur de son usine de pièces de moteurs, revendue depuis. D’abord par sympathie envers cet enfant ayant l’âge de sa fille Rosemary, puis par admiration de sa volonté et son sérieux pour apprendre. Quand son fils William Albert naquit, 13 ans après Rosemary, Georges partit pour l’internat à Chicago, il revint à 18 ans avec son diplôme en poche et s’installa à son compte grâce encore à l’aide de William Henry. Il exerça comme avocat cinq ans puis accepta d’entrer exclusivement au service de la famille André quand son tuteur l’informa qu’il allait mourir et qu’il avait besoin de quelqu’un de confiance pour veiller sur son fils et ses intérêts.

Rosemary venait d’être mariée à un capitaine de bateau : Vincent Brown, et était partie vivre dans sa famille à Philadelphie. Georges avait gardé pour lui son secret, il était amoureux d’elle mais savait bien qu’il ne pouvait espérer la réciprocité ni le consentement de William Henry qu’il respectait. Le petit William Albert avait dix ans quand il perdit son père, sa mère était déjà décédée trois ans avant lui, d’insuffisance cardiaque congénitale et avait légué cette pathologie à sa fille ; Rosemary en mourra également à 25 ans. Le petit garçon orphelin se raccrocha de sa peine en récupérant tous les animaux qu’il trouvait ; il les soignait s’ils étaient blessés, les nourrissait, en relâchait certains, en gardait d’autres. Georges le laissa faire, il aurait aimé pouvoir lui montrer davantage de tendresse mais il n’avait pas non plus eu d’exemple pour cela et la barrière entre lui : employé et l’héritier de la famille André, pas facile à oublier. Mais il veillait sur lui comme s’il était son fils et aurait pu s’ouvrir à lui au fil du temps si sa tante Elroy, revenue d’Ecosse six mois après la mort de son frère, n’avait pas bien délimité ces barrières et son rôle à tenir ; en lui annonçant en plus qu’elle allait prendre l’éducation de son neveu et de la propriété en mains à partir de ce jour. Georges pensa aussi que ce sera mieux pour William Albert que sa tante s’occupe de lui ; une femme donnait en général plus facilement de la tendresse ; il s’aperçut vite qu’Elroy faisait exception à la règle.

Elle commença par faire jeter toutes les bestioles qui vivaient à Lakewood, pensionnaires de son neveu : un hérisson, deux chats, trois pigeons, une tortue, un chien borgne et une chouette effraie à l’aile cassée. Le petit garçon en fut très affligé et se cloîtra sans plus vouloir manger. Georges plaida sa cause et obtint un compromis, les bestioles pourraient rester mais dans une cabane au fond de la propriété et à condition qu’Elroy ne se retrouve jamais face à elles. Georges et William Albert promirent d’y veiller et aménagèrent avec l’aide du jardinier une vieille maison dans une clairière au fond du bois de Lakewood, à une trentaine de minutes à pieds, la propriété étant immense.

Pendant que l’enfant apprenait à se débrouiller seul dans la nature et soignait les animaux, Rosemary accoucha d’un petit garçon prénommé Anthony mais elle en sortit affaiblie et le capitaine Brown la ramena à Lakewood près de sa tante pour y élever son fils. Elle se remit peu à peu mais elle se savait désormais condamnée à mourir comme sa mère. Elle laissa sa tante éduquer son fils, ne se trouvant utile qu’auprès de ses fragiles roses. De temps en temps elle retrouvait un peu de courage, elle voulut que son frère revienne vivre près d’elle et Anthony mais Elroy brandissait toujours ses arguments que William Albert avec sa nature de sauvage la fatiguerait plus vite et Anthony en souffrirait encore. Rosemary était résignée, son mari ne faisait que de courtes visites, fuyant aussi la réalité dans son métier fait de voyages.

Georges regardait tout cela tristement, il emmena plusieurs fois William Albert près de sa sœur, elle se rendit ainsi compte que son frère était un bon garçon sensible et sans malices. Elle alla alors contre sa tante et lui demanda de rester la semaine à Lakewood pour recevoir une éducation complémentaire normale en le laissant retourner veiller sur sa ménagerie à sa vieille maison les samedi et dimanche.

Deux ans passèrent ainsi, Anthony avait cinq ans désormais et William Albert, douze ans. Le petit aimait suivre son oncle mais il n’eut pas le temps de le connaître longtemps et s’en souvenir assez plus tard car Rosemary mourut et Elroy renvoya son neveu à sa maison aux animaux, interdisant à Georges de le ramener et parler de lui à Anthony. Elle reprit son éducation stricte, quand le petit évoquait son oncle, elle lui répétait qu’il n’était qu’un cousin éloigné venu en vacances mais parti loin désormais. Anthony finit par l’oublier, il n’en parla bientôt plus et se réfugia lui aussi dans les roses de sa mère en taisant sa solitude et tristesse. Elroy avait décidé qu’Albert William ne pouvait pas succéder à son père avec sa nature excentrique et insouciante ; elle voyait en Anthony, comme elle pouvait l’éduquer et le contrôler, le vrai héritier de la famille André.

Huit ans passèrent encore, Anthony avait découvert deux ans auparavant, deux cousins revenus d’Arabie Saoudite sans leurs parents pour subir aussi l’éducation réputée efficace de leur tante Elroy ; il voyait aussi des cousins plus éloignés : les Legrand mais ne les trouvait pas gentils et les fuyait autant qu’il pouvait en galopant sur son cheval blanc dans la campagne alentour. Puis les Legrand prirent une petite orpheline sous leur toit, d’abord comme fille de compagnie de leur fille Elisa puis hélas plutôt comme domestique et souffre-douleur de leurs enfants égoïstes et cruels. Elroy n’avait pu se défaire du testament de son frère qui laissait son fils aîné héritier et décideur de tout à ses dix-huit ans. Comme il fallait attendre qu’Anthony soit plus grand pour qu’il le remplace, elle avait demandé à Georges de persuader William Albert de signer les documents qu’il lui remettrait en échange de sa liberté d’aller voyager où il veut et rencontrer d’autres animaux. Mais lorsqu’elle découvrit une demande d’adoption en bonne et due forme signée par son neveu à l’encontre de la petite orpheline domestique des Legrand, elle se mit en colère. Georges lui donna alors une lettre signée d’Anthony, Archibald et Alistair, ses trois petits neveux, adressée à l’oncle William pour adopter Candy. Elroy partit voir William Albert et lui accorda cette demande à condition qu’il reste toujours anonyme à sa famille jusqu’à ce qu’Anthony soit en âge de prendre les rênes. Le jeune homme de vingt ans n’avait aucune envie de régner sur cette illustre famille et fortune, il n’avait d’autre ambition que vivre libre près de la nature, des animaux et rencontrer des gens simples. Il promit tout ce que voulait sa tante du moment que Candy reste son héritière après Anthony. Elroy n’imaginait pas en acceptant qu’Anthony allait mourir si jeune et que Candy serait donc unique héritière des André et lorsque ce drame arriva, elle grandit de colère et de rage envers Candy, la voyant en responsable de la mort du petit. Avec l’influence de sa nièce Sarah et ses enfants ne faisant que salir Candy, cette détestation ne fit que se renforcer.

William Albert décida après la mort d’Anthony d’envoyer Candy à Londres avec ses cousins afin qu’Elroy s’apaise puis partit pour faire ce voyage en Afrique dont il rêvait, en s’arrêtant avant à Londres vérifier que sa pupille allait mieux aussi. Il avait lié un lien d’amitié avec elle en ne lui donnant que la seconde moitié de son prénom composé : Albert, et sans parler de sa véritable identité faisant de lui son tuteur légal : le grand-oncle William. Rassuré sur son sort après sa rencontre avec Terrence Grandchester qui semblait très amoureux d’elle et capable de la protéger, il traversa la France puis embarqua sur un paquebot à Marseille pour Alger la Blanche. Il s’enfonça peu à peu vers le sud, de trains en caravanes de nomades, jusqu’à la savane du Kenya et resta un an à travailler dans une réserve comme il l’avait rêvé. Puis, il apprit que la guerre avait gagné l’Europe, les français se battaient dans le Nord contre les allemands, l’Angleterre y participait ; il s’inquiéta pour Candy et décida de repartir pour joindre Georges afin de la faire rentrer en Amérique. Il ignorait qu’elle avait décidé de s’enfuir du collège après que Terrence en partit. Une fois remonté jusqu’à Tripoli en Libye, il prit un cargo pour l’Italie et c’est dans un train de réfugiés albanais fuyant la dictature de leur pays pour aller chercher un bateau en partance pour les Etats-Unis qu’il fut blessé lors d’ un déraillement dû à une explosion sur la voie et probablement criminelle. Blessé et amnésique, il fut dirigé comme les autres en Amérique puisqu’on le croyait réfugié mais peut-être aussi espion, ce pourquoi on aurait commis cet attentat. La suite, on la connaît mais Georges avait perdu la piste de William Albert à Tripoli et donc apprenait de madame Elroy qu'il était à New York avec Candy.



Il prit alors le premier train pour New York après ce coup de téléphone et alla s’informer en premier lieu au théâtre Strasford de l’adresse de Terrence Grandchester puisqu’il semblait que Candy le fréquentait toujours.
Il frappa ensuite à la porte de l’acteur, il n’était apparemment pas là. Comme il n’y avait pas de concierge dans l’immeuble, il repartit en comptant revenir plus tard.

Albert était reparti depuis huit jours pour Chicago, Terry et Candy étaient à ce moment partis en excursion à Liberty Island, voir de près la grande statue de la liberté éclairant le monde ; Georges trouva encore porte close le soir étant donné qu’ils étaient encore dans le bateau les ramenant de la petite île jusqu’à la presqu’île de Manhattan.
Georges toqua alors à la porte des voisins, personne ne répondit non plus à l’appartement mitoyen, il descendit donc à l’étage du dessous et frappa à la porte de droite. Une belle femme aux cheveux châtain clair et aux yeux bleu gris en amandes lui ouvrit.

- Monsieur ?

Georges ôta son chapeau cérémonieusement et s’expliqua.

- Je vous prie de m’excuser madame mais je cherche monsieur Grandchester, votre voisin du dessous, sauriez-vous quand il rentrera s’il vous plaît ?

- Monsieur Grandchester ? Non, je l’ignore, il rentre parfois tard vu son métier.

- Il n’est pas au théâtre Strasford pourtant, on m’a dit qu’il ne jouera pas avant demain soir.

- Ma foi, je ne sais quoi vous dire monsieur mais j’ignore ses horaires, je ne peux pas vous renseigner.

Georges fixa la jeune femme, elle semblait hésitante, comme si elle en savait plus mais pensait qu’il n’était pas là pour de bonnes intentions. Il réfléchit, il ne risquait rien à lui dire la vérité de façon imprécise, il risqua donc :

- En fait madame, je cherche monsieur Grandchester pour retrouver quelqu’un d’autre. Il a peut-être des renseignements à me fournir sur cette personne qui est recherchée par sa famille depuis quelques temps.

- Une personne disparue ? Un homme ?

Georges vit que la dame semblait anxieuse, il poursuivit donc dans l’idée qu’elle avait des informations sur cette personne et lui confia encore :

- Oui un homme d’une trentaine d’années qui a disparu mystérieusement il y a plusieurs mois et que sa tante recherche avec angoisse. Il… est issu d’une grande famille de Chicago, il est l’héritier d’une grande fortune.

- Mon Dieu ! Ce pourrait être… Albert ?

- Albert ? Mon ami se prénomme William Albert, vous pensez le connaître ?

- Heu… je crois mais… il est vraiment votre ami ?

- Je vous l’assure madame, son père me l’a confié avant de mourir, je l’ai vu grandir, il est… presque comme un fils pour moi.

Kate étudia encore le visage de ce grand homme brun moustachu. Il avait une allure si distinguée et discrète, il avait des yeux marrons francs et semblait vraiment doux et inquiet.

- Est-ce que vous pouvez entrer monsieur, je vais tout vous raconter mais pas sur le seuil de ma porte ?

- Je vous remercie madame, je veux bien. Je m’appelle Georges Johnson au fait.

-Et moi Kate Barrett ! Entrez je vous prie !

Un quart d’heure après, Georges savait qu’Albert était reparti depuis huit jours à Chicago. Il confia donc à Kate le fait que Candy ignorait que son ami amnésique était aussi son tuteur légal et qu’il valait mieux ne rien lui dire avant que William Albert n’ait retrouvé sa mémoire et sa famille afin qu’il le décide lui-même après. Kate hésita mais finit par se rallier à cette décision sage qui laisserait Candy et Terry profiter pleinement de leurs derniers jours ensemble. Puisque Candy repartirait dans trois jours pour Chicago, cela ne changerait pas grand chose de laisser en suspense cette nouvelle, elle le saurait bien vite et serait soulagée de savoir qu’elle pourrait bientôt se marier et ne plus attendre ses 21 ans ou se défaire de la tutelle de son grand oncle William puisqu’il était Albert : son meilleur ami et celui de Terry, et ne voulait que leur bonheur. Elle se sentit si heureuse de songer à cet avenir heureux, dégagé de son nuage inquiétant les amoureux, qu’elle ne put culpabiliser par la suite en mentant par omission à ses amis mais pour leur bien.

Georges repartit donc pour Chicago peu après, il n’avait plus besoin de rester à New York, Candy reviendrait à la date prévue là-bas, il allait facilement entre temps retrouver William Albert puisqu’il avait leur adresse.


***



Ce lendemain matin après la visite n’ayant pas eu lieu à Lakewood, Albert sortit de chez lui pour faire quelques courses. En sortant de l’épicerie, les bras chargés de sacs en papiers garnis de nourriture qu’il comptait utiliser pour confectionner un repas digne de ce nom pour ses amis Archibald, Alistair, Annie et Patricia qu’il avait invités à déjeuner ce dimanche midi, il vit un chien couché au milieu de la route qui gémissait. Il avait dû se faire renverser par une voiture ou une calèche mais il était encore en vie bien que certainement blessé. Albert qui on le sait adorait les animaux, posa ses sacs à terre et se précipita jusqu’à la petite bête. Il y avait du sang qui coulait de son flan sur le bitume, Albert enleva son écharpe autour de son cou et pansa le ventre du chien. Puis il le prit dans ses bras, il n’était pas bien lourd, il était petit, le poil ras de couleur blanche, la tête fine et de grandes oreilles tombantes ; on n’aurait pu le cataloguer dans une race précise, ce devait être un petit corniaud mais plutôt mignon. Albert réfléchit sur où aller le faire soigner, le zoo était trop loin et il n’avait pas sa voiture. Ses paquets étaient toujours sur le trottoir, il y avait un jeune garçon à côté qui lui dit quand il s’approcha :

- J’ai gardé vos commissions pour qu’on ne les vole pas monsieur, comment va-t-il ?

- C’est gentil mon garçon ! Il saigne beaucoup, je dois trouver un vétérinaire, tu n’en connaîtrais pas un dans le coin fiston ?

- Heu… il y a bien le docteur Martin à la Clinique Heureuse, il soigne tout, les gens et parfois les bêtes.

- Tu veux bien me montrer où il exerce ?

- Oui bien sûr ! Je vais porter vos paquets et vous conduire, ce n’est qu’à cinq minutes !

- Merci mon petit, tu es un brave garçon !

Le petit sourit et empoigna les sacs en papier puis partit rapidement vers le Nord de la ville. Albert le suivit en serrant le petit animal tremblant contre sa vieille veste kaki. Après plusieurs bifurcations, il distingua une petite maison en bas d’un terrain vague.

- C’est là ! dit le jeune garçon après s’être retourné. Puis il dévala la pente herbeuse, Albert en fit autant. Il vit deux enfants jouer au ballon et un chien courir pour tenter de l’attraper. Son petit protégé contre lui dressa une oreille en entendant un aboiement, il était toujours conscient heureusement. Le jeune garçon ne toqua pas à la porte de la petite maison semblant un peu délabrée mais y entra franchement en criant :

- Docteur martin, il y a un blessé !

Albert pénétra dans cette étrange clinique dite heureuse et vit un vieil homme assez corpulent en salopette, des cheveux châtain parsemés de fils gris et une épaisse moustache sur la lèvre supérieure, qui le regardait, un verre à la main. Il le posa sur la table puis vint vers lui et tâta la truffe du petit chien.

- Elle est chaude, il doit avoir de la fièvre.

- Il est blessé docteur, sur le flan, il a été renversé par un véhicule.

L’homme souleva l’écharpe et hocha la tête.

- Posez-le sur la table, je vais voir ça !

Albert obéit et regarda le docteur examiner la blessure. Celui-ci soupira puis donna son diagnostic :

- Le foie a été perforé, je dois le recoudre mais j’aurai besoin d’aide, vous pouvez rester et m’assister monsieur ?

- Je ne suis pas pressé docteur, je ferai ce que vous me direz.

- Très bien alors je vais finir mon verre puis soigner ce petit corniaud. Peter, tu peux aller dire à madame Lopez que j’irai la voir pour son pansement un peu plus tard ?

- Oui doc, j’y vais de suite ! Puis en s’adressant à Albert : J’ai posé vos courses dans le coin là-bas monsieur !

- Merci mon petit, tu es gentil.

Une fois Peter parti, le docteur Martin retourna vers son verre et le but d’un trait. Puis il sortit une bouteille d’un tiroir et le remplit à nouveau en demandant :

- Vous en voulez un ?

- Non merci docteur, fit Albert en le voyant ensuite avaler encore d’un trait son verre.

Il se demanda si ce brave homme en consommait beaucoup dans la journée et si ce n’était pas dangereux pour ses patients. Mais il le vit ensuite se laver consciencieusement les mains et sortir ses outils de sa trousse, bien rangés et propres, puis pratiquer ses soins avec un sérieux, une patience et une douceur rare. Albert tenait un chiffon imprégné de chloroforme sur la truffe du chien pendant que l’homme recousait les bords de sa chair avec une main qui ne tremblait pas. Il désinfecta plusieurs fois la blessure à l’alcool puis termina en prenant une bande immaculée et l’enroula autour du ventre de l’animal, la fixant à la fin d’un nœud. Enfin, il vérifia l’œil du chien, son rythme cardiaque et certifia :

- Voilà un rescapé promis à un bel avenir ! Il n’y a plus qu’à attendre qu’il se réveille et il pourra rentrer chez lui… s’il en a un.

Il regarda Albert qui fit non de la tête.

- Ce n’est pas mon chien docteur, je l’ai vu au milieu de la route, je n’ai pas assisté à l’accident.

- Il a peut-être quand même un maître, on pourrait mettre quelques affiches dans les parages, on ne sait jamais.

- Je vais m’en occuper docteur, pouvez-vous le garder en attendant ?

- Jusqu’à ce qu’il soit guéri, oui, ça ne fera qu’un patient de plus, j’ai déjà deux chats et un lapin en pension. Mais je ne pourrai pas le garder toujours !

- Je trouverai bien une solution d’ici là.

- Vous semblez beaucoup aimer les animaux ?

- Oui, je travaille dans un zoo, je me sens bien parmi eux, comme vous !

- Oh moi, je ne fais que soigner tous ceux qui souffrent, peu importe que ce soit un être à deux pattes ou à quatre, tant qu’il y a un cœur en dessous, c’est un être sensible qui a droit au respect.

- Je suis bien d’accord docteur Martin mais tous les médecins ne font pas comme vous.

- Chacun sa déontologie, à quoi sert d’être médecin si ce n’est pas pour soigner toute vie ? Bien, ça mérite un petit verre tout cela, vous en êtes cette fois monsieur… ?

- Albert ! Simplement Albert. Heu… non merci, je ne bois pas d’alcool. Je dois rentrer chez moi, j’ai invité des amis à déjeuner, si je veux leur servir quelque chose de mangeable, je dois m’atteler à la tâche. Je vous laisse donc notre petit ami, je reviendrai le voir demain !

- Très bien alors à demain Albert.

***



Plus tard, devant des assiettes bien garnies d’une blanquette de veau et de navets rôtis, Albert raconta cette aventure à ses amis. Bien entendu, Annie et Patricia furent plus émues par l’histoire et la santé du petit chien tandis qu’ Archibald et Alistair par la personnalité du docteur et son étrange clinique. Mais tous en conclurent que le tout plaira beaucoup à Candy lorsqu’elle reviendra. Elle sera de retour après-demain dans l’après-midi, Albert était impatient de la revoir et d’avoir des nouvelles de Karen à qui il pensait beaucoup en regrettant toujours de ne pas pouvoir savoir s’il en avait le droit.



Le lendemain matin, il partit pour la petite clinique à pieds, il avait à peine fait la moitié du chemin quand il fut bousculé par un homme. Celui-ci s’excusa tout de suite, Albert lui répondit que ce n’était pas grave et continua sa route. L’homme resta sur place en le regardant partir puis soupira. Il ne l’avait pas reconnu, il avait tenté cette rencontre en espérant que William Albert ait un flash mais il n’avait pas eu lieu. Depuis hier il avait hésité à aller frapper chez lui mais sans oser de crainte de n’être pas reconnu. Il ne se sentait pas capable de lui dire la vérité aussi brusquement, alors il l’avait attendu et provoqué cette bousculade ayant donné sa réponse : il ne se souvenait plus de lui non plus. Il hésita encore, devait-il aller annoncer à madame Elroy que son neveu était amnésique ? Elle qui regrettait qu’il soit le chef de la famille André, le décideur selon le testament de son frère, qui avait mis ses espoirs en Anthony et qui n’était revenue à accepter que William Albert le soit mais seulement de loin sans se faire connaître !

S’il allait lui annoncer que son neveu était amnésique, elle allait peut-être faire en sorte de remettre en question sa succession pour raison de santé mentale, d’incapacité vu son amnésie à prendre des décisions pour la famille ! Avec elle, il s’attendait à tout, il la savait sèche envers ce neveu qu’elle méprisait pour son goût de liberté, son amour pour les animaux et son indifférence envers les apparences, l’argent et les privilèges. Tout ce dont elle était bien incapable de comprendre ou se passer, elle qui n’avait jamais trouvé de mari ni eu d’enfants par son mépris pour qui ne lui semblait pas son égal, donc beaucoup trop de monde. Non, il valait mieux qu’elle ne sache pas cela, ni sa nièce Sarah qu’on aurait pu croire sa fille tant elle lui ressemblait pour tout le mauvais et qui éduquait ses enfants dans cette même voie. La petite Candy en avait d’ailleurs bien subi les tourments, c’est pour cela que William Albert l’avait enlevée de leur tutelle pour l’adopter une fois qu’Anthony, Archibald et Alistair le lui avait écrit sur une lettre. Et dire que c’était Candy elle-même qui avait choisi de soigner et aider son ami vagabond sans savoir qu’il était son tuteur, brave petite. Non, il ne fallait pas emmener William Albert chez sa tante maintenant dans son état, il fallait lui faire retrouver la mémoire d’abord puis le persuader qu’il était temps que le jeune héritier André prenne les guides de la famille sans plus se cacher, en imposant ses choix, y compris celui de son héritière Candice qui le méritait tant.

Georges repartit avec cette idée en tête, il ne savait pas encore comment il allait faire mais cette fois, il ne faiblirait plus, il devait respecter la promesse faite à Albert Henry : protéger son fils et le conduire vers son destin.


Fin du chapitre 8

A suivre
 
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view post Posted on 22/10/2016, 20:31
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Chapitre 9

Dépêches et flocons d’avent




Candy descendit du train, accueillie par ses amis. Quatre « Candy ! » en chœur et en longue portée lui firent chaud au cœur pour son arrivée.

- Mes amis ! Merci d’être venus me chercher à la gare ! s’écria-t-elle émue. Vous allez tous bien ?

- On ne peut mieux, dit Archibald le premier. Et toi ? Tu as l’air heureuse en tout cas !

Candy serra les deux filles chacune par l’épaule et sourit de toutes ses dents aux deux garçons.

- On peut le dire Archie ! Terry vous donne le bonjour !

Le jeune dandy hocha la tête, satisfait que tout se soit bien passé avec lui quoi qu’ayant toujours du mal à se montrer trop enthousiaste vis à vis de son ancien adversaire au collège.

- Alistair, sais-tu que ta boite à bonheur si bien nommée à endormi un bébé pendant mon voyage de retour en plus d’avoir protégé de son pouvoir mon séjour à New York ?

- Je suis bien content Candy, c’est vrai que tu irradies de bonheur. Albert a aussi hâte de ton retour, il n’a pas pu venir t’accueillir avec son travail mais il a une belle surprise pour toi ce soir !

- Une surprise ! Oh, j’ai hâte de la découvrir ! Un indice les amis ? Est-ce que ça se mange ?

Tout le monde éclata de rire en songeant au petit chien.

- Tu ne changeras jamais Candy, toujours la gourmandise qui parle avant tout avec toi ! s’exclama ensuite Patty.

- Eh bien ! c’est que j’ai faim, j’ai pris mon petit déjeuner tôt et j’ai donné le sandwich que m’avait confectionné Kate à un jeune garçon qui semblait plus affamé que moi dans le train !

Annie sourit, reconnaissant encore plus sa sœur de cœur là, toujours si généreuse.

- Alors rentrons vite chez toi Candy car Albert t’a préparé hier une tourte qu’il faut seulement réchauffer !

- Miam ! Une tourte ! J’en salive d’avance !

Les jeunes gens rirent encore de la voir lever le nez et humer l’air comme si elle en sentait d’ici les arômes puis tirer la langue comme une enfant malicieuse.

- Nous t’emmenons tout de suite faire honneur à cette tourte Candy, décida Alistair, nous avons pris le fourgon pour te ramener chez toi.

- Oui, plaisanta ensuite son frère, allons-y avant que tu ne tombes en inanition de faim !


Quinze minutes après, la petite troupe arrivait à destination. Monsieur Trevord, le propriétaire les accueillit sur le perron et souhaita la bienvenue à sa locataire de retour.
Une fois les quatre amis installés dans l’appartement et pendant que la tourte aux champignons réchauffait dans le four et laissait dégager son odeur alléchante, Candy résuma son voyage. Lorsqu’elle leur raconta sa rencontre avec les Legrand au théâtre, ils rirent beaucoup.

- J’aurais aimé voir Niel se faire claquer la figure de ne pas savoir se servir de ses yeux discrètement ! s’exclama Archie hilare.

Mais Annie s’en offusqua un peu.

- Tu ne peux pas dire ça Archibald ! Il n’aurait pas dû regarder cette fille ainsi, discrètement ou pas, cela reste aussi impoli et… dégoûtant !

- Mais si les filles portent des décolletés plongeants, c’est pour qu’on les regarde il me semble, s’excusa Archie. Je trouve impoli de le faire avec insistance mais il ne faut pas se leurrer, c’est fait pour attirer les regards des garçons !

- Oh Archie ! Je ne te pensais pas si salace ! réagit encore Annie en rougissant.

- Je ne pense pas l’être Annie, je ne suis pas hypocrite, je dis tout haut ce que tous les hommes pensent tout bas ! N’est-ce pas Ali ?

- Heu… bredouilla l’aîné des Cornwell en cherchant comment s’éviter une réaction similaire de Patty. Oh, tu sais comme ma vue est mauvaise, dit-il finalement en espérant que ça lui éviterait de trancher.

Archibald le regarda avec méfiance, se doutant qu’il préférait se dérober puis se dit en voyant le regard réprobateur de Candy, qu’en fait il avait raison de ne pas se mouiller pour ça. Alors il abandonna aussi.

- Ok, c’est vrai que c’est de toute façon impoli et stupide de fixer une fille ainsi, je le reconnais.

- Heureuse que tu le reconnaisses Archie, dit Candy d’un air mi-figue mi-raisin.

Annie resta boudeuse, Patty n’avait rien dit et étant donné le malaise d’Alistair, elle préféra aussi oublier cette remarque honteuse en adoptant la sagesse en réaction et poussa Candy à raconter la suite de ses vacances à New York. Celle-ci reprit donc le cours de ses souvenirs et bientôt, même Annie reprit son sourire béat en maquillage sur son doux visage.

La sortie de la tourte du four charma les effluves des cinq amis, si bien qu’ils la partagèrent en six parts égales et la restante fut mise de côté pour Albert quand il reviendrait. Il était près de seize heures, Archibald et Alistair devaient ramener leurs amies chez elles avant seize heures trente, ils prirent donc tous congé après avoir insisté pour faire la vaisselle ; Ali à la plonge et Archie à l’essuyage sous les yeux des filles ravies. Ce geste essuya aussi ainsi les dernières traces de rancune sur les propos sexistes d’Archibald auparavant et c’est bien pour cette raison qu’il l’avait proposé ce fin stratège.

Candy se retrouva donc seule et alla faire un peu de toilette et changer sa robe de voyage pour une autre plus légère. Elle lut ensuite le courrier de ces deux semaines passées qu’Albert avait mis sur sa table de nuit. Il y avait trois lettres : une de la maison Pony, une de Flanny et une signée Georges Johnson. Elle avait hâte d’avoir des nouvelles de Flanny et de ses mamans de l’orphelinat mais la curiosité prévalut pour connaître la réponse de Georges à sa demande à l’oncle William. Elle la décacheta et parcourut les quelques lignes mais fut très déçue. Il disait que monsieur William était en voyage en Europe et connaîtrait la demande de sa fille adoptive dès son retour. Il disait ne pas connaître cette date, il lui conseillait de ne pas prendre de décisions hâtives car son tuteur était compréhensif et bon de nature. Un peu rassurée quand même que Georges lui ait donné son avis sur son employeur dans cette intention, elle remit la lettre dans l’enveloppe et décacheta celle de ses chères mamans. Mademoiselle Pony lui assurait qu’elle se portait bien ainsi que Sœur Maria, que les douze enfants en pension aussi ; deux devaient partir bientôt pour être adoptés par une famille de Chicago. Mina était devenue vite une grande aide pour occuper les enfants, elle allait aussi chercher le courrier quand le facteur arrivait en bas de la route, lui évitant ainsi des mètres de fatigue supplémentaire pour ses jambes sujettes aux rhumatismes. Candy rit, imaginant la scène du bon facteur March qu’elle connaissait depuis toute petite, et sourit ensuite en lisant que Capucin s’était installé dans la niche de Mina pour dormir au chaud les nuits et les deux bêtes cohabitaient sans soucis. Emue, elle sentit en elle ce manque qui revenait régulièrement après une certaine période de nostalgie de ce havre de paix, ses mamans, les enfants et ses amis à quatre pattes. Elle ne pourrait pas s’y rendre pour Noël, elle reprendrait le travail demain et serait de garde ces jours de fête ; peut-être qu’elle pourrait plus tard, même juste pour un jour. Terry devait aussi passer à Chicago fin janvier ou début février, ça en faisait de beaux projets, elle ne pouvait pas être triste. Elle allait répondre une longue lettre à ses mamans, lui raconter son voyage et leur avouer ses fiançailles car en fait elle ne l’avait pas encore fait. Tout s’était passé si vite, elle n’avait pas osé mais désormais elle s’en sentait pleinement capable sachant que son choix serait approuvé et soutenu par ces deux saintes femmes. Elle referma donc ses pensées et la lettre de La Porte et prit celle qui allait l’emmener maintenant en Europe, dans les Ardennes françaises, dans un hôpital militaire. Flanny la rassurait aussi très vite, elle n’avait pas encore vu de champ de bataille, elle soignait de nombreux blessés des fronts mais dans une ville loin des lignes ennemies. Son quotidien était parfois difficile mais parfois elle s’en évadait en lisant des romans ou jouant aux cartes avec ses collègues ou même des malades. Candy était contente de voir qu’elle semblait plus ouverte et pensait à s’amuser désormais, quelque chose s’était débloqué en elle depuis son départ qui finalement, était peut-être plus positif que négatif. Elle disait à la fin qu’elle n’avait pas encore de nouvelles du docteur Michael Durant mais poursuivait les recherches en espérant que le bouche à oreille ait des résultats.

Rassurée, Candy rangea aussi cette missive dans son enveloppe, les mit toutes trois dans le tiroir puis prit du papier à lettre pour entamer celle pour ses chères mamans.
Elle finissait de noircir la deuxième page quand la porte signala l’arrivée d’Albert. Elle se leva et se précipita à sa rencontre. Bup, juché sur son épaule montra sa joie en un petit sifflement non agressif.

- Albert ! Que je suis heureuse de vous revoir ! Bonjour Bup, toi aussi tu m’as manqué !

- Moi aussi ma chère Candy, fit-il une fois l’avoir serrée contre lui. Comment s’est passé votre retour ?

- Magnifiquement, j’étais assise à côté d’une gentille grand-mère et son petit-fils ainsi qu’un jeune couple et son bébé…

Albert l’écouta narrer son voyage tout en enlevant sa veste et l’accrochant au portemanteau puis en allant se laver les mains dans la cuisine afin de préparer du thé. Candy réalisa ensuite qu’elle avait aussi une lettre à donner à son ami et partit vite la chercher dans son sac à main. De retour elle la lui tendit.

- C’est de la part de Karen, dit-elle discrètement en allant ensuite s’occuper de la bouilloire à sa place, tout ceci par respect pour lui après avoir vu son œil briller devant la lettre, et ne voulant pas le mettre mal à l’aise.

- Merci Candy, fit-il en souriant quand même sans penser à le cacher. Puis il toussota et rajouta : Je vais la poser dans ma chambre puis faire un peu de toilette, cela ne vous gêne pas de vous occuper du thé ?

- Absolument pas Albert, il sera prêt dans cinq minutes après infusion, prenez votre temps !

Puis elle sourit en coin en lui tournant le dos et l’entendant partir de la cuisine. Elle revit les yeux violets de Karen quand elle lui avait donné sa lettre, ses joues un peu roses et ses mots fébriles : « Tu la donnera à Albert de ma part s’il te plaît Candy ? »
Il était clair que ces deux là avaient allumé une flammèche à New York ne demandant qu’à grandir mais elle ne voulait pas les gêner de son espoir que cette lueur se transforme en grosse flamme voire en incendie. Elle se dit que tous les espoirs étaient permis en tout cas et qui vivra verra !

***



« Cher Albert,

J’espère que vous allez bien et que vos souvenirs ne sont pas moins nombreux qu’à New York, surtout ceux qui me concernent. Je ne sais pas si je devrais vous le dire mais tant pis, je le fais, vous me manquez Albert. Est-ce que vous pensez à moi dans vos journées au zoo ou le soir avant de vous coucher ? J’espère que oui mais je sais que vous voulez savoir de quoi et de qui est faite votre vie d’avant pour vous laisser penser à d’autres projets et personnes.
J’ai honte de vous dire que j’espère qu’il n’y a personne dans votre cœur dans ce passé oublié, quelqu’une plutôt, installée dans votre cœur. Pourtant j’ose vous le dire car j’aimerais être dans l’avenir à cette place puisque je ne peux pas demander d’y être aujourd’hui. Voudrez-vous me dire quand je viendrai fin janvier ou début février à Chicago en tournée, (Henri Hattaway ne connaît pas encore la date exacte) si cette audace est insensée ou pas ? Soyez sincère Albert, je suis fragile sous mes dehors de feu, une Juliette rousse et ardente mais pas vaillante face à votre beau sourire d’aventurier si mystérieux. Je crois que je vous aime Albert, je l’ai dit, tant pis si c’est une folie mais Terry m’a dit hier qu’il valait mieux avoir osé dire et regretter que de se taire et supposer mille tourments. Oh, ce n’était pas pour vous qu’il m’a dit cela mais pour lui et sa vraie Juliette, il est si disert dès qu’il s’agit d’elle ; cependant je crois que c’est valable pour moi aussi, je ne veux pas rater le train s’il peut être le mien. Ne me répondez pas trop vite quand même Albert, à Chicago seulement, révélez-moi si votre cœur avec ou sans souvenirs, peut laisser une porte entrouverte au mien, juste une espérance pour en grand y pénétrer ou un seul mot pour que je vous oublie.
J’ai hâte de vous revoir.
Karen. »

Albert rangea sa lettre dans son tiroir de chevet. Il était à la fois heureux et plus inquiet de cette si belle déclaration d’amour. Il sentit son cœur prêt à lui répondre que la porte était déjà ouverte pour elle mais ce maudit passé secret l’angoissait de plus en plus. Il fallait absolument qu’il recouvre la mémoire avant que Karen ne vienne à Chicago car il ne se sentait pas capable de lui promettre la lune sans certitude d’en avoir le droit. Il avait à nouveau rêvé d’un jardin de roses cette nuit, il regretta de n’avoir pas accepté qu’Alistair demande à sa tante l’autorisation d’aller visiter celui de Lakewood ; abandonner une piste sans la vérifier n’était pas malin, s’il fallait oser dire plutôt que supposer, il fallait aussi oser voir plutôt qu’imaginer. Mais il n’était pas trop tard, demain il appellera Alistair du zoo pour qu’il fasse cette demande à sa tante.

Il retourna en cuisine près de Candy, le thé était bien infusé et versé dans les tasses. Il s’installa face à elle, lui sourit puis lui dit :

- J’ai une surprise pour vous Candy !

- Oui nos amis me l’ont dit tout à l’heure ! Et quand je leur ai demandé : « Est-ce que cette surprise se mange ? » ils ont bien ri !

Albert s’esclaffa aussi puis répondit :

- Non pas cette surprise là où ce serait bien ennuyeux de le manger, le pauvre !

- Le pauvre ? Vous voulez dire que cette surprise est quelqu’un ?

- Oui mais en fait, ils sont deux.

- Deux ? Vous m’intriguez Albert ! Dites-m’en davantage !

- Eh bien! je préfère vous inviter à aller les rencontrer si vous n’êtes pas trop fatiguée pour une petite balade d’une heure.

- Oh non, je suis en forme, ça me fera du bien de marcher car je suis restée assise jusqu’ici, entre le train et la maison. Ca me fatiguera pour mieux dormir afin de reprendre le travail demain matin.

- Très bien alors allons-y Candy.

Elle se leva et partit chercher son manteau rouge à bord fourrés blancs, son bonnet assorti, remettre ses bottes puis ils s’aventurèrent tous trois dehors, puisque Bup était de nouveau juché sur l’épaule de son maître, vers la surprise annoncée d’Albert.

***



A New York, Karen et Terry jouaient leur huitième représentation de Roméo et Juliette et la salle était toujours pleine. Les applaudissements retentirent fortement à la fin, nourris de sifflements et bravos criés qui rendirent encore le metteur en scène dans un état euphorique.
Après le troisième rappel de la troupe, il s’avança en tenant les mains de ses deux étoiles montantes et annonça au public que le président de la république Woodrow Wilson et son épouse souhaitaient voir la pièce à Washington et donc la troupe Stratford était invitée à y jouer pour le passage à la nouvelle année, soit le premier janvier 1916.
Les comédiens apprirent aussi cette nouvelle, le privilège était grand, Terry et Karen se regardèrent en partageant la même pensée : Candy et Albert allaient être heureux de ce bel honneur.

***



Le petit rescapé de la route allait mieux, il accueillit Albert d’un jappement et d’un remuement de la queue en trottinant d’une démarche un peu de guingois sous son gros bandage ventral. Candy qui suivait, regarda son ami caresser la petite tête du chien aux yeux plein de reconnaissance. Bup alla aussi renifler cet animal sans crainte, habitué depuis longtemps à voir toutes sortes d’animaux.

- Je vous présente la surprise Candy, il s’est fait renverser par un véhicule avant-hier mais il va mieux grâce au docteur Martin.

La jeune fille regarda l’homme en salopette installé sur son fauteuil, une pipe en bouche et un verre à la main.

- Vous êtes vétérinaire monsieur ?

- Oui on peut le dire mais je soigne les humains aussi car je suis médecin avant tout.

- Médecin ? Vous soignez des gens ici ?

- Tous ceux qui viennent me voir et en ont besoin, oui jeune fille.

- Oh ! fit Candy en observant mieux la pièce de cette cabane bien modeste et peu fonctionnelle. Puis elle revint sur l’homme qui fumait et buvait de l’alcool, en doutant de son sérieux. Pourtant elle le trouvait de bonne mine et l’air sympathique, elle s’abstint donc d’émettre oralement son avis.

Et puis le petit chien et Albert semblaient trouver normal ce docteur original. Ils se faisaient encore quelques confidences au sol. Enfin, Albert s’adressa au praticien :

- Quelqu’un s’est-il présenté ici suite à mes annonces docteur Martin ?

- Non, aucune visite pour réclamer ce petit ami, il va falloir envisager une adoption si vous ne pouvez pas l’héberger Albert !

- En fait, le directeur du zoo est d’accord pour que je l’emmène avec moi la journée mais je n’ai pas encore demandé à notre propriétaire s’il l’accepterait comme nouveau colocataire. Il n’a jamais rien dit pour Bup mais je me suis dit qu’il serait plus malléable si Candy s’ajoutait à ma prière.

Celle-ci croisa le regard évocateur d’Albert puis sourit.

- Je veux bien cohabiter avec un locataire de plus, surtout un si mignon ! Comment s’appelle-t-il ?

- Il n’a pas voulu nous le dire, il va falloir lui en trouver un Candy. Vous avez une idée ?

- C’est un garçon ?

- Oui un petit gars d’environ 6 mois, précisa le docteur d’un ton amusé.

- Alors on pourrait l’appeler Fripon ou Galopin ! Ou pourquoi pas Flocon ! s’exclama-t-elle en se souvenant de la légende des flocons de neige que lui avait racontée Terry, et vu le pelage blanc du chiot.

- Flocon est un joli nom, admit le docteur.

- Oui j’aime bien aussi, suivit Albert. Puis en s’adressant au chien qui continuait à battre de la queue et le regarder avec espoir :

- Qu’en dis-tu mon petit ? Ça te plaît comme nom Flocon ? On dirait que oui alors c’est d’accord, on te baptise Flocon, au moins tant que personne ne vient te réclamer.


***



Terry regardait la neige tomber sur le toit du théâtre Stratford. Il revivait ses plus beaux portraits de Candy en hiver mais un raclement de gorge le fit revenir à lui. Un homme qu’il reconnut comme un technicien de ce théâtre, à l’air un peu incertain voulait lui parler.

- Oui ? Il y a un problème monsieur ?

L’homme fut étonné un instant que cet acteur vedette lui dise monsieur, il le trouvait hautain ou indifférent depuis son arrivée mais peut-être qu’il était seulement solitaire et rêveur.

- Il n’y a pas de problème monsieur Grandchester, j’ai juste un pli à vous transmettre.

Terry tendit le bras pour saisir la lettre que lui remit l’homme, il lut son nom sur l’enveloppe, d’une écriture inconnue.

- Qui vous l’a remise ?

- Votre correspondante elle-même monsieur, vous saurez son nom en la lisant.

Terry allait la décacheter mais l’homme l’interrompit.

- Juste une minute encore, avant que vous ne la lisiez, sachez que je veille sur elle et veillerai tant qu’elle le voudra. Enfin… merci d’essayer de lui pardonner…

Terry regarda l’homme repartir, puis il fixa à nouveau l’enveloppe, cette écriture fine et nerveuse lui rappela de mauvais souvenirs. Il hésita, tenté de la laisser partir parmi les flocons de neige puis disparaître, fondre dans le ciel et se désintégrer pour ne pas avoir à y repenser. Pourtant, la voix de l’homme, son regard implorant, ses mots puis le doux visage de Candy qui, elle, aurait le courage et la générosité d’essayer de pardonner ou au moins comprendre, l’en empêcha. Il la décacheta puis parcourut la lettre de Susanna Marlowe.

« Terry,

Cette fois, je te jure que je suis sincère, je regrette infiniment tout le mal que je t’ai fait subir et qui heureusement a été détourné par la force de ton amour pour Candy, de celui de Candy pour toi, si évidents pour ceux qui vous côtoient et de cette bulle de bonheur que vous voulez tant retenir et méritez autant.
Je n’ai pas d’excuses Terry, pourtant je plaide tout de même la folie, celle de ma mère m’ayant poussée vers son rêve impossible en me faisant croire qu’il était le mien ; celle d’avoir cru être amoureuse de toi alors que je ne l’étais que de l’acteur talentueux pouvant incarner mon Roméo et aussi la folie d’avoir cru être une Juliette, une actrice douée. Je me suis réveillée de ma folie grâce à un homme qui serait resté toujours invisible et insignifiant pour moi dans mon monde factice et onirique ; il est aujourd’hui une belle réalité qui ne voit en moi que ce que je suis, ayant vu mes pires côtés, sachant toutes mes perfidies. Peut-être que la vie m’a donné une chance de me racheter, je veux la saisir, je pars demain pour Philadelphie recommencer une autre vie.
Je te souhaite maintenant sincèrement de garder ton bonheur et si bel amour avec Candy, non vous ne finirez pas comme Roméo et Juliette, vous méritez que ça dure toujours.
Pardonne-moi Terry, adieu.
Susanna »

Le jeune homme réfléchit en regardant les flocons voleter puis il en attrapa un dans sa main et dit tout haut:

« Je te pardonne Susanna, vole vers ton vrai destin en paix ! »

Il souffla sur sa main, le flocon reprit son chemin dans le ciel New-Yorkais.


Fin du chapitre 9
 
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view post Posted on 29/11/2016, 15:44
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Chapitre 10

Complots à vau-l’eau




Candy avait repris son travail, elle retrouva avec plaisir ses collègues et patients ; son sourire et sa bonne humeur étaient au plus haut, donc c’était visible et apportait encore un plus grand bienfait autour d’elle sans qu’elle en ait entièrement conscience. Mais le directeur Léonard en faisant sa ronde le remarqua et se félicita d’avoir su résister aux pressions exercées sur lui pour faire renvoyer la jeune infirmière. Le professeur Kliss était heureusement intervenu en faveur de mademoiselle André sinon son propre poids n’aurait pas suffi à faire pencher la balance du bon côté. Il retourna dans son bureau bien heureux de cette recrue aussi bénéfique à ses patients et à la joie si communicative.

Mais en ce lundi de rentrée Candy déjeuna le midi avec ses collègues Judith et Nathalie qui voulurent savoir tout de ses vacances à New York. Elle n’avait pas encore dit qu’elle était fiancée mais Nathalie était celle qui l’avait remplacée lors de sa garde de nuit ce fameux soir de la représentation du roi Lear à Chicago, et donc c’est elle qui avait réceptionné Terry avant que Flanny n’intervienne. Depuis, cette fille timide s’était montrée discrète, Judith plus spontanée et rondelette avait assisté à une des colères d’Elisa lorsqu’elle était venue crier au visage de Candy qu’elle ne pouvait pas être fiancée à Terry sans autorisation du grand-oncle William. Alors elle fit confiance aux deux filles et avoua être fiancée à l’acteur qui faisait en ce moment vibrer les cœurs des filles en Roméo, son Roméo à elle. Il faut dire que le succès de la pièce ne faisait que grandir, des journaux en avaient fait des articles jusqu’à Chicago et les infirmières espéraient aussi pouvoir voir la pièce bientôt ici. Candy ne pouvait s’empêcher d’être très fière de lui mais elle ne voulait pas non plus que se propagent trop ses infos ; ses deux collègues lui promirent discrétion, trop heureuses d’être les deux seules confidentes de la fiancée de Roméo.


***



Albert appela Alistair comme prévu ce midi à partir du téléphone du directeur du zoo. L’aîné des Cornwell approuva son choix de vérifier de ses yeux si Lakewood était la maison de son vague souvenir et lui dit qu’il allait demander la permission à sa grand-tante Elroy d’y faire une visite dès cet après-midi. Le jeune homme lui confia aussi qu’il avait toujours très envie de s’enrôler pour l’armée de l’air britannique en janvier et qu’il ne savait pas comment le dire à Patty. Albert lui demanda d’attendre encore un peu pour réfléchir ; autant laisser passer Noël sans qu’elle le sache, d’ici là il pouvait se passer plein de choses même si le jeune Alistair était toujours sûr de sa motivation. Albert une fois raccroché, se dit qu’il était peut-être possible de trouver un moyen pour qu’Alistair vive sa passion pour l’aviation et ait un rôle utile au conflit européen sans risquer sa vie là-bas. Il allait aussi se renseigner dès que possible sur les écoles ou industries de l’aéronautique, on ne sait jamais.

***



Elroy André écouta son petit neveu avec attention. Il lui racontait qu’il voulait pouvoir aller à Lakewood pour fureter dans les combles à la recherche de vieilles inventions qu’il avait laissées avant de partir en Angleterre. Il avait hésité mais son instinct lui disait de ne pas parler d’Albert. La vieille dame hésita aussi, l’évocation de cette période ayant suivi la mort de son cher petit Anthony était encore pénible. Alistair vit son front se durcir et devina sa pensée.

- Peut-être que je retrouverai aussi une invention que j’avais faite pour Anthony, un multi-arroseur à roses…

Elroy tiqua et observa son petit-neveu, d’abord agacée puis un peu émue de son air rêveur et triste en parlant d’Anthony. Elle regretta alors qu’Alistair soit si lunaire et passionné d’inventions loufoques mais elle le trouvait aujourd’hui le plus sympathique de ses descendants, voyant Archibald trop superficiel et caractériel et Daniel trop pleutre et sournois. Alors, elle se montra pour une fois conciliante sans imaginer une seconde qu’elle donnait ainsi à son neveu disparu si mal compris, un passe pour venir rencontrer son enfance et peut-être… s’en souvenir.

- Tu peux aller quand tu voudras à Lakewood, Alistair, je vais prévenir le personnel.

- Archibald pourra aussi m’y accompagner grand-tante ? Ainsi que… nos amies Annie et Patricia ? Elles aimeraient aussi voir la roseraie d’Anthony ?

- Si tu veux ! je suppose que cela fera du bien que cette maison revive un peu, vous pouvez y aller si vous voulez.

Elroy se rendit jusqu’ à la table gigogne près de la fenêtre décrocher le téléphone et Alistair entendit :

- Ici madame Elroy André, sachez que j’autorise à ce jour mes neveux et leurs amis à aller à Lakewood afin qu’elle ne tombe pas en décrépitude, c’est entendu ?

Alistair était content, il ne comptait pas y inviter ses cousins Legrand bien sûr ; Archie n’était pas au courant qu’Albert l’avait appelé ce matin, il était parti chez les parents d’Annie, les Brighton, pour faire sa cour dans les formes. Patty était chez sa grand-mère Martha qui était maintenant bénévole à la soupe populaire ; il pouvait aller chercher Albert à la fin de sa journée au zoo et aller à Lakewood, puisque sa tante avait même accepté des amis là-bas.

Elroy retourna à son ouvrage de broderie dans son fauteuil Voltaire. Si elle avait pu se douter qu’elle venait d’offrir un sésame à son neveu disparu et si mal aimé d’elle, pour rentrer dans sa demeure légale et filiale, donc chez lui ! Quelle ironie !

***



Elisa apprit que Candy était rentrée grâce à la domestique de la maison de la grand-tante Elroy, qu’elle soudoyait contre des informations. Les frères Cornwell en avaient parlé ce matin, Candice Neige André était revenue hier et devait avoir repris son travail à l’hôpital Ste-Johanna ce matin. Aussitôt la rousse diabolique alla voir son frère dans sa chambre et lui rappela sa promesse de persuader leur mère et la grand-tante qu’il était très amoureux de Candy et la voulait absolument comme épouse sinon il s’engagerait sur le front français. Niel fit la grimace à ce chantage qu’il ne risquait pas de respecter, préférant de loin épouser Candy. D’ailleurs cette idée avait fait son chemin depuis que sa sœur la lui avait mise dans la tête et aujourd’hui il la voyait plus plaisamment encore. Il regarda Elisa les bras croisés attendant qu’il obéisse instantanément, il se leva de son lit puis affirma :

- Ne t’inquiète pas, je vais le faire mais laisse-moi d’abord aller voir Candy pour la prévenir qu’elle sera ma femme bientôt.

- Tu ne peux pas faire ça Niel, elle refusera, elle est fiancée à Terry.

- Elle rompra pour m’épouser, entre un bâtard d’acteur et moi c’est tout vu, c’est un grand honneur que je vais lui faire !

Elisa se dit que son frère était soit trop stupide soit trop prétentieux, même les deux. Elle savait que Candy ne risquait pas de rompre avec Terry pour Niel, rien ne la ferait choisir son frère comme époux sauf si on l’y obligeait. Elle réfléchit, il lui fallait guider Niel si elle voulait réussir ce projet pour libérer Terry de cette Candy et peut-être même réussir ensuite à le récupérer après lui avoir ouvert les yeux sur cette fille puis le consoler.

- C’est certain que tu lui feras un immense honneur Niel, que peut espérer une orpheline obligée de travailler pour vivre à part Terry, qui bien que de grande famille au départ n’est pas un bon parti en tant qu’acteur pour une fille de qualité. Mais tu connais Candy, elle est stupide, elle pourrait faire des histoires juste pour se venger de nous ou vite prévenir Terry qui risque de la croire alors et venir ici te secouer les puces, tu le connais aussi! Non Niel, il est mieux de ne rien dire à Candy et d’abord mettre maman et grand-tante Elroy de notre côté pour que cette union semble venir d’elles et qui fera donc que Candy n’aura aucune raison de refuser ce qui lui permettra enfin d’être une vraie André par union et non par la lubie d’un vieil excentrique grand-oncle William qu’on n’a jamais vu !

Daniel réfléchit, la perspective que l’anglais risque de venir le secouer le convainquit plus que celle que Candy refuse sa proposition par esprit de contradiction. Il suivit donc sa sœur toujours si maligne.

Quelques minutes après, tous deux expliquaient à leur mère ce projet machiavélique. D’abord abasourdie d’entendre son fils annoncer qu’il était amoureux de Candy, puis horrifiée qu’il menace de partir à la guerre si on l’empêchait d’épouser cette fille, et enfin après avoir accepté d’entendre toute l’argumentation de sa fille sur le bénéfice de cette union : être certains de garder l’héritage des André dans leur famille et surtout les poches des Legrand, Sarah se rendit à cette idée.

Une heure après, elle partait chez sa tante pour lui émettre ce plan aux oreilles. Elroy ne montra par contre aucune humeur ni signe visible des différentes émotions qu’avait traversé sa nièce en entendant tous ces arguments. Elle n’interrompit pas non plus Sarah mais une fois celle-ci sans plus rien à dire, elle se leva de son fauteuil Voltaire et partit face à la fenêtre pour méditer tout ceci. Elle repensa à l’appel de Georges il y a deux jours pour lui dire qu’il était arrivé trop tard à New York, William Albert était déjà parti en laissant Candy avec l’acteur Terrence Grandchester qu’elle fréquentait depuis le collège. Puis, qu’il n’avait pas retrouvé non plus la trace de son neveu au retour à Chicago, qu’il présumait qu’il avait dû partir encore, peut-être pour retourner en Afrique. Cette nouvelle l’avait alors soulagée, si William Albert était reparti pour courir le monde, en Afrique ou ailleurs, c’était mieux ainsi et peut-être même qu’il ne reviendrait plus avec un peu de chance. Ainsi elle pouvait continuer à diriger les affaires de la famille même sans sa signature, comme elle le faisait depuis son premier départ en Afrique. Mais si son neveu disparaissait trop longtemps ou définitivement, tôt ou tard il faudrait obéir à sa stupide adoption qu’il avait mise aux mains de notaires et avocats et donc qu’elle ne pouvait pas résilier légalement. Par contre si Candy se mariait avec Daniel, il serait facile en effet de reprendre le contrôle de la fortune des André puisqu’il était de la famille. En vérité, elle hésita en se disant que ce serait peut-être mieux de faire épouser Candy par Alistair qui était plus intelligent que Niel, écartant d’office Archibald qu’elle trouvait trop rétif à obéir et qu’elle voyait bien épouser la fille des Brighton qui avaient une belle fortune non négligeable en plus d’un patronyme très respectable. Mais peut-être qu’Alistair était trop honnête pour accepter cette union d’intelligences, Daniel serait bien plus malléable. Et puisque Sarah prétendait qu’il était amoureux de Candy et menaçait de s’engager à la guerre en France s’il ne l’épousait pas, autant choisir cette voie au moins facile d’un côté. Pourtant elle n’imaginait pas une seconde que Daniel irait au bout de son chantage, le sachant bien trop couard ; mais s’il avait le caprice d’épouser Candy, grand bien lui fasse. Enfin, satisfaite de sa réflexion qui dura quelques minutes qui parurent bien longues à Sarah, Elroy opina de la tête puis signifia à sa nièce :

- C’est d’accord, ton fils épousera Candy, j’approuve cette union.

Sa nièce eut un éclair de victoire dans l’œil, se promettant que dès que Candy deviendra légalement sa belle-fille, elle allait lui apprendre à devenir une femme du monde, de gré ou de force, et même si ça lui semblait bien difficile qu’une telle souillon et mal élevée soit un jour présentable.

***



Alistair était allé chercher Albert au zoo comme prévu à l’heure où il finissait son travail, soit dix-huit heures puis il l’emmena dans son camping-car jusqu’à Lakewood. Cette fois le portail s’ouvrit, la jeune bonne de l’autre jour les salua et leur dit que madame Elroy avait donné son consentement, donc ils pouvaient rester autant qu’ils voulaient dans la propriété. Puis elle les laissa, Alistair emmena donc son ami jusqu’à la roseraie qui à cette époque était hélas dénuée de fleurs. Pourtant cette vue sonnait comme quelque chose de connu à l’amnésique, Alistair le vit très troublé mais le laissa déambuler dans les allées sans lui poser de questions. Un moment après, Albert passa les mains dans ses cheveux puis dit :

- Je suis certain d’être déjà venu ici Alistair mais je ne me rappelle pas pourquoi. Et cette maison ressemble tant à celle que j’ai vu dans ma tête l’autre jour, oui j’y ai vu aussi cette gloriette et ses anges, c’est étrange !

- Peut-être que vous y êtes venu enfant avec quelqu’un, mon frère et moi ne sommes revenus d’Arabie Saoudite qu’en 1910, nous ne savons pas qui la fréquentait avant. Mon cousin Anthony y vivait avec sa mère Rosemary, elle est morte en 1903, lui en 1912. Il doit bien y avoir un moyen de savoir qui venait ici avant 1910, le personnel est trop récent mais… peut-être que des albums photos ou un registre pourrait nous aider. Venez Albert, allons dans la maison, ma grand-tante m’a autorisé à aller fureter même les combles, c’est valable pour chercher aussi autre chose que mes vieilles inventions, je suis sûr que la preuve que vous êtes déjà venu ici se trouve dans la maison, vous ne croyez pas ?

Albert observa encore la grande demeure, un sentiment bizarre le parcourut, oui il était déjà venu ici mais il ne voyait pas cette maison comme la sienne, elle lui faisait l’effet d’une prison, d’un lieu inhospitalier, d’une ennemie même.

- Je ne sais pas Alistair, cette maison ne me rassure pas, pour tout vous dire !

- Je crois qu’elle cache des secrets Albert, en fait je sentais déjà quand j’y ai habité avec Archie et Anthony puis Candy, qu’elle était pleine de secrets et j’ai très envie de les découvrir, surtout si cela permet de vous faire retrouver votre passé !

- Et si ces secrets nous révèlent des choses que nous préférerions ne jamais savoir ?

- C’est un risque Albert, savoir est-il mieux que d’ignorer pour devenir quelqu’un qui sait qui il est et l’assume ?

- Vous êtes décidément très intelligent Alistair, trop pour aller vous enrôler en France comme simple volontaire et pilote de chasse, je suis sûr que vous pouvez faire votre devoir en utilisant encore mieux vos compétences et vos idées si originales et sages mon cher ami. Qu’en pensez-vous ?

- Je ne sais pas Albert mais… je veux bien y réfléchir au delà de la date fatidique que j’ai promise à Candy si vous acceptez qu’on fouille cette propriété de fond en comble jusqu’à ce qu’on y déterre ses secrets pour vous donner une identité ou au moins une autre piste pour la trouver ? Qu’en dites-vous ?

- Que j’accepte ce challenge mon cher Ali, pareille offre ne peut se refuser, surtout par peur de l’inconnu ! Merci !

- Merci à vous Albert, je crois en effet que notre avenir sera meilleur si on prends le temps d’étudier toutes les opportunités et points de vue.

***




Dès qu’il apprit par sa mère que la grand-tante Elroy avait donné son accord pour qu’il prenne Candy pour épouse, Daniel voulut aller immédiatement à l’hôpital Ste-Johanna pour voir sa « promise » et lui signifier qu’elle devait arrêter tout de suite ce travail dégradant puisqu’elle avait le privilège de devenir bientôt sa femme, porter son nom et désormais se conduire comme une fille du monde. Elisa qui s’attendait à pareil emportement de la part de son frère l’en empêcha en lui redisant qu’il valait mieux que Candy ignore encore son futur sort. Elle imaginait plutôt utiliser une ruse pour faire venir seule et confiante sa pire ennemie jusqu’à leur maison et la séquestrer si elle refusait d’obéir aux ordres de la grand-tante. Elisa était maligne, quoi qu’elle méprise plus que quiconque cette maudite orpheline, elle ne la prenait pas pour une idiote au point de renoncer à Terry pour son frère qu’elle savait bien loin de valoir sur bien des plans le bel aristocrate acteur. Elle tenait à ce que ce plan là réussisse, Candy devenant une Legrand lui permettrait aussi de l’avoir à l’œil et de lui faire subir mille tourments pour son plaisir, jusqu’à ce qu’enfin elle soit brisée et que son sourire de bécasse et sa soi-disant force mentale à toujours se relever quoi qu’elle subisse ne soit plus qu’un passé mort et enterré. C’était surtout cela qu’Elisa ne supportait pas et pourquoi elle ne pouvait renoncer à haïr cette fille ; elle l’aurait sûrement oubliée si elle avait pleuré, baissé la tête, supplié et accepté d’être ce qu’elle était : une orpheline seule et pauvre, tout ce qu’Elisa n’aurait pu supporté de vivre et encore moins avec un grand sourire. Candy était forte, elle le reconnaissait mais elle ne pouvait pas être insubmersible, elle perdra vite sa superbe une fois devenue la femme de Niel et surtout entre ses griffes à elle, foi d’Elisa !


***



Candy ne trouva que Bup et Flocon en rentrant à la maison ce soir. Albert avait laissé une note disant qu’il avait ramené ses amis après son travail car il devait aller voir un endroit où ils ne seraient pas autorisés. Il ne savait pas à quelle heure il rentrerait et lui disait de dîner sans l’attendre s’il était en retard. Candy ne se posa pas de questions sur cet endroit mystérieux, confiante toujours en son ami. Elle fit donc sa toilette puis prépara les gamelles de Flocon et Bup. Flocon avait encore son bandage, le propriétaire monsieur Trevord aimait bien les chiens, il n’avait émis aucuns reproches à ce qu’il vive ici aussi. Le jeune chien était calme pour le moment, il n’avait aboyé que quand monsieur Trevord avait frappé à la porte hier soir pour lui apporter un os à moelle. Il avait dit que c’était normal, il faisait son métier de chien de garde, ainsi la maison avait aussi un bon gardien désormais, quoi qu’il soit petit, il savait au moins alerter le voisinage en cas d’intrusion.

A dix-neuf heures, Candy décida de préparer le souper. Elle était beaucoup moins douée qu’Albert mais elle voulait apprendre pour offrir à Terry plus tard une épouse capable aussi de lui plaire gastronomiquement. Elle prit donc un livre de recettes que lui avait donné Kate et commença à confectionner une pâte brisée pour en faire une quiche au jambon. Elle l’étala, la garnit de crème et d’ œufs puis de morceaux de jambons. Elle la mit au four puis s’aperçut qu’elle avait oublié de saler et poivrer, elle répara donc cet oubli en espérant que ce serait bon. Une fois enfournée, elle regarda à la fenêtre, il neigeotait mais il ne faisait pas suffisamment froid, elle fondait instantanément. Flocon la regardait dans son panier, elle décida de sortir pour qu’il fasse ses besoins et ainsi il verrait d’où venait son nom.

- Tu viens Flocon, on va aller dehors voir les jolis flocons blancs comme toi pendant que la quiche cuit tranquillement !

Le jeune chiot se leva en battant de la queue en voyant sa maîtresse enfiler ses bottes et son manteau et bonnet. Il la suivit dans l’escalier sans courir, sa blessure étant encore récente. Une fois dehors, il leva son petit museau, curieux de ces flocons volant mais en découvrant que c’était mouillé, il secoua la tête et les oreilles faisant rire Candy. Puis il alla lever la patte sur le muret et se soulagea. Il suivit ensuite la jeune fille le long du trottoir, elle le fit marcher cinq minutes puis décida de faire demi-tour. Elle arrivait vers le portail de sa maison lorsque un moteur se fit entendre. Elle reconnut le camping-car d’Alistair. Il s’arrêta près d’elle et il sortit pour la saluer, suivi par Albert du siège passager.

- Bonsoir Candy, bonsoir Flocon !

- Ah, vous étiez ensemble les garçons ! Bonsoir Alistair ! Albert, tout va bien ?

- Très bien Candy ! Je crois que j’ai déjà été à Lakewood dans mon passé, on a vu des photos qui m’ont rappelé un souvenir !

- Oh ! C’est vrai ? Vous avez vécu là-bas ?

- Vécu je ne sais pas mais j’ai peut-être été là-bas à un moment, le portrait de Rosemary Brown, ses traits, je suis certain de l’avoir connue !

- On y retournera bientôt pour trouver d’autres indices Albert, dit Alistair, la grand-tante Elroy a accepté qu’on y aille quand on veut, précisa-t-il à Candy. Tu pourrais aussi nous accompagner Candy, la prochaine fois !

- Retourner à Lakewood ! Oh ! Ce serait si émouvant de revoir la roseraie d’Anthony oui mais… tu crois que la grand-tante accepterait que j’y retourne ?

- Eh bien… en vérité, elle n’a pas mentionné ton nom Candy mais elle m’a accordé d’y aller avec des amis donc je ne lui désobéirai pas si tu viens !

- Pourquoi pas oui !

- Très bien, alors on ira vendredi étant donné que vous finirez plus tôt votre travail, dit Albert.

- C’est entendu les amis. Alistair, tu veux venir souper avec nous, j’ai fait une quiche !

- C’est gentil Candy mais j’ai dit à grand-tante que je dînerai avec elle vu qu’Archibald est chez les Brighton. Une prochaine fois !

- Oui une prochaine fois ! Alors bonne soirée avec grand-tante Elroy, salue-la bien de ma part !

- Je n’y manquerai pas ! A bientôt Candy ! A bientôt Albert !

- Merci pour tout Alistair, à bientôt !

Une fois le camping-car parti, Albert caressa Flocon puis dit :

- Vous avez fait une quiche Candy ? J’en salive d’avance !

- J’espère qu’elle sera bonne ! Il vaut mieux rentrer, je ne veux pas qu’elle brûle!

Elle n’était ni brûlée ni mangeable car Candy avait oublié d’allumer le gaz, le four était froid. Albert éclata de rire et répara cette bévue. Il partit ensuite faire sa toilette pendant que la quiche cuisait, Candy lut un peu puis ils se mirent à table à plus de vingt heures mais la quiche s’avéra succulente alors Candy se coucha contente d’elle quand même.

***


A New York, Kate accueillit James de son retour de Philadelphie. Elle lui raconta la visite de Georges Johnson et donc l’identité d’Albert.

- Albert William André ? De la famille André de Chicago ? Qui possède des usines et des affaires d’import-export ? Ca alors ! Et tu dis qu’il est le chef de famille, enfin qu’il devrait l’être s’il n’était pas amnésique et qu’il voulait réclamer ses droits à sa tante qui l’a toujours mis à l’écart pour son désir de liberté, de voyages et son altruisme envers les animaux ! Et donc il est légalement le tuteur de Candy, c’est lui qui l’a adoptée et qui pourrait lui donner l’autorisation d’épouser Terry avant sa majorité ! Incroyable !

- Oui n’est-ce pas ? Mais crois-tu qu’on doive le garder pour nous, Terry devrait peut-être le savoir aussi non ? Monsieur Johnson pense qu’il faudrait attendre qu’Albert retrouve la mémoire mais je me sens coupable depuis son départ vis à vis de notre Roméo.

- Oui c’est un sacré dilemme. Ce serait en effet la plus simple solution que Terry le sache, que Candy le sache et ainsi qu’Albert soit informé en douceur de son identité qui réglerait les problèmes de tous ! Seulement… si monsieur Johnson pense qu’il faut attendre, de quel droit nous proclamer les tenants de la vérité universelle ! J’ai peur que nous fassions du mal en croyant faire bien, nous n’avons pas toutes les cartes en main comme monsieur Johnson qui doit savoir mieux que nous. Il vaut mieux garder cela pour nous encore, Terry partira en tournée début janvier, si d’ici là nous n’avons pas de nouvelles informations on avisera.

- Oui tu as sûrement raison chéri, attendons encore un peu.

- Tu sais, j’ai justement parlé à Philadelphie avec un banquier de Chicago qui doit bien connaître la famille André. On s’est échangé nos adresses et téléphones, je pourrais lui demander s’il connaît Georges Johnson ou tout autre représentant de cette famille, on ne sait jamais, qu’en penses-tu Kate ?

- J’ai confiance en monsieur Johnson mais comme tu dis, on peut toujours apprendre un renseignement pouvant aider nos chers amis. Contacte-le dès que possible James !

***



Le lendemain, Candy eut la surprise de trouver Daniel devant l’hôpital Ste-Johanna, l’apostrophant à sa sortie pour rentrer chez elle. Elle ne l’aurait peut-être pas vu s’il n’avait klaxonné à son passage au volant d’une voiture neuve et probablement très coûteuse. Il baissa sa vitre et lui cria alors qu’elle s’arrêta pour savoir ce qu’il lui voulait :

- Bonjour Candy ! Veux-tu que je te ramène chez toi dans ma voiture ?

La jeune fille fut étonnée par son offre mais sa réponse n’eut pas besoin de longue réflexion.

- Non merci Niel, je préfère marcher.

- Allez, ne te fais pas prier, je suis venu faire la paix et redémarrer nos rapports plus gentiment !

- Eh bien, si tu veux la paix entre nous, je suis d’accord, prouve-le moi en me laissant tranquille à l’avenir !

- Candy, tu pourras vite constater que je ne te veux plus de mal, monte sans crainte, je te ramène chez toi pour te prouver que j’ai changé !

- Changé ? Et qu’est-ce qui t’a fait changer Niel, dis-moi ?

- Oh ! au retour de New York j’ai réfléchi, j’ai réalisé que j’avais été dur avec toi, ma sœur avait décidé que tu n’avais pas ta place chez nous et j’ai suivi son idée. Tu connais Elisa, difficile de la contredire !

- Oui je connais bien ta sœur Niel, pour mon malheur mais je me souviens que tu exécutais avec plaisir ses tours pendables, parfois même tu n’avais pas besoin d’elle !

- J’étais aussi plus bête mais je te dis que j’ai changé, je ne veux plus te faire du mal, je t’assure !

- D’accord, je te donne une chance de le prouver Niel, pour autant, je ne veux pas monter dans ta voiture, comprend-le !

- Tu crois que je vais te faire un mauvais coup si tu montes ? Ok je comprend ta méfiance mais je n’ai pas de mauvaises intentions, promis ! Mais comme je ne peux pas te le prouver, je ne vais pas insister et te laisser. Alors au revoir Candy et passe une belle soirée !

La jeune fille ne sut réagir à son sourire et ces propos, elle le regarda partir puis se secoua en se demandant quelle mouche avait piqué Niel !

***



Dès rentré chez lui, Niel alla faire son rapport à sa sœur.

- Je lui ai dit tout ce que tu voulais Elisa, elle a refusé que je la ramène chez elle mais elle a été bien surprise et veut bien croire que j’ai changé.

- C’est parfait Niel, tu iras encore la chercher demain et je te parie qu’elle acceptera de monter ! Et souviens-toi qu’il faudra la ramener sagement chez elle, ainsi elle ne se méfiera plus du tout de toi bientôt ! Ce sera ensuite un jeu d’enfant de la conduire ici au troisième coup et bien plus simple de lui expliquer que vous allez vous marier pour respecter les volontés de la famille !

- Tu es toujours la plus maligne sœurette !

- En effet frérot ! Tu vas épouser Candy et puisque tu la trouves maintenant « jolie », tu pourras t’amuser avec elle autant que tu voudras !

« Et moi j’aurai enfin ma vengeance pour faire de cette maudite orpheline qui m’a volé Anthony puis Terry, une esclave à mon service ! »


Fin du chapitre 10
 
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10 replies since 25/7/2014, 11:05   3569 views
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